Plan du site - Retour page d’accueil - Biographie de Charles Taze Russell - La vérité sur son œuvre - Volume 1er Le divin plan des âges - Les 6 volumes - Autres écrits de C.T. Russell - Questions sur : la vie, la mort, l’au-delà

 

LE TEMPS EST PROCHE

ÉTUDE IX

L'HOMME DU PÉCHÉ — L'ANTICHRIST

 

*  *  *

            L'Antichrist doit être développé, manifesté et détruit avant le jour du Seigneur. — Considération d'une vue opposée à celle-ci sur ce sujet. — Esquisse prophétique. — La naissance de l'Antichrist. — Son développement rapide. — Le tableau qu'en donne l'histoire et sa description par la Bible s'accordent. — Son royaume est une contrefaçon. — Sa tête et sa bouche remarquables. — Ses grandes et arrogantes paroles de blasphème. — Ses enseignements blasphématoires. — II extermine les saints du Très-Haut. — Son règne millénaire. — L'antichrist frappé par l'épée de l'Esprit. — Sa lutte finale et sa fin.

            « Que personne ne vous séduise en aucune manière, car ce jour-là ne viendra pas que l'apostasie ne soit arrivée auparavant et que l'homme de péché n'ait été révélé, le fils de perdition ». — 2 Thessaloniciens 2 : 3.

*  *  *

            En regard de ces paroles de l'apôtre Paul montrant qu'un personnage qu'il appelle « l'homme du péché » doit précéder la venue du jour du Seigneur — qui, comme nous l'avons démontré, a déjà commencé à poindre, il est important que nous regardions autour de nous pour voir si un tel personnage est réellement apparu. Paul et les autres apôtres l'ont si soigneusement décrit que s'il n'est pas encore venu, les paroles ci-dessus devraient être comprises comme un veto de Paul à tous les autres témoignages concernant la présence du Seigneur et l'établissement de son royaume maintenant. Ce veto doit subsister comme un argument irréfutable jusqu'à ce que cet homme du péché soit reconnu et qu'il corresponde par chaque détail à la description prophétique. 

            Il est clairement déclaré que, non seulement cet homme du péché doit premièrement se lever, mais qu'il doit se développer et prospérer avant que le Jour du Seigneur vienne. Avant le jour de Christ, la prospérité et l'influence de cette puissance auront atteint leur point culminant et seront sur leur déclin ; c'est par la lueur éclatante de la présence du Seigneur à son second avènement que cet homme du péché sera entièrement détruit. Il nous faut observer ces circonstances prédites, afin de savoir si cet avertissement à l'Église dans les jours de Paul sont encore applicables de nos jours. Aujourd'hui, après dix-huit siècles, nous prétendons de nouveau que le jour de Christ est venu ; et cette importante question se présente : Y a-t-il quelque chose dans ce que Paul a dit pour corriger l'erreur des Thessaloniciens qui soit maintenant une objection à cette prétention ?

            L'apôtre exhorte l'église à veiller pour le retour du Seigneur et à prêter attention à la ferme parole prophétique. Par le soin avec lequel il indique les signes de la présence de Christ et le caractère de son œuvre dans ce temps-là, etc., il est évident qu'il était tout aussi soucieux que l'église sache reconnaître la présence du Seigneur lorsqu'il sera venu, que de ce qu'elle ne soit jamais déçue par l'erreur qui consistait à croire qu'il serait venu avant le temps de sa présence. Ceux qui, au commencement de cet âge, tombèrent dans cette  dernière erreur, furent exposés aux tromperies du principe de l'Antichrist qui agissait déjà à ce moment-là, de même que ceux qui manquent de reconnaître le jour du Seigneur et sa présence au bon moment sont exposés à de continuelles séductions, aux fausses doctrines de l'Antichrist, et sont rendus aveugles quant aux grandes  vérités et aux privilèges spéciaux de ce jour. Voilà pourquoi l'apôtre est si soucieux pour l'église du commencement comme pour celle de la fin de cet âge ; de là son avertissement : « Que personne ne vous séduise d'aucune manière ». De là aussi la description exacte de l'homme du péché, afin qu'il puisse être reconnu dans son temps.

            Tandis que les chrétiens à la fin de cet âge sont portés à oublier même la promesse du retour du Seigneur, ou n'y pensent que pour l'envisager avec terreur et sous de mauvais présages, l'église primitive l'attendait avec un ardent désir et avec une joyeuse anticipation, comme la réalisation de toutes ses espérances, la récompense de toute sa fidélité et la fin de toutes ses afflictions. C'est pour cela que les premiers croyants étaient disposés à écouter diligemment tout enseignement qui prétendait que le Jour du Seigneur était ou très proche ou présent. Ils étaient par conséquent en danger d'être séduits sur ce point s'ils n'étudiaient pas avec soin les enseignements des apôtres sur ce sujet.

            L'église de Thessalonique, influencée par les enseignements erronés de quelques-uns que le Seigneur était de retour et qu'ils vivaient dans son jour supposait évidemment que l'idée était en harmonie avec les enseignements de Paul dans la première épître qu'il leur avait écrite et dans laquelle il dit (1 Thessaloniciens  5 :1-5) que le jour du Seigneur viendrait à la dérobée, tranquillement et inaperçu, comme un voleur dans la nuit ; qu'eux, les saints, en auraient la pleine intelligence tandis que les autres s'y trouveraient sans le savoir. Apprenant l'erreur sérieuse dans laquelle ils étaient tombés, de croire que le Seigneur était déjà là, présent, Paul leur écrivit une seconde épître dont la pensée centrale fut de corriger cette erreur. Il dit : « Pour ce qui concerne la présence de notre Seigneur Jésus-Christ et notre réunion avec lui, nous vous prions, frères, de ne pas vous laisser facilement ébranler dans votre bon sens, et de ne pas vous laisser troubler, soit par quelque inspiration, soit par quelque parole, ou par quelque lettre qu'on dirait venir de nous, comme si le jour du Seigneur était déjà là [enistemi, est présent]. Que personne ne vous séduise d'aucune manière, parce [qu'il ne viendra pas] que l'apostasie ne soit venue auparavant et que ne soit révélé l'homme du péché, le fils de la perdition, celui qui s'oppose et qui s'élève au-dessus de tout ce qu'on appelle dieu [ou puissant gouverneur] ou de ce qu'on adore, jusqu'à s'asseoir dans le Temple de Dieu, se proclamant lui-même un dieu. Ne vous souvenez-vous pas que je vous disais ces choses lorsque j'étais encore avec vous ? Et maintenant, vous savez ce qui le retient, afin qu'il [Christ] soit révélé en son propre temps. Car le mystère de l'iniquité [l'insubordination à Christ] agit déjà ; il faut seulement que celui qui le retient encore ait disparu. Et alors paraîtra l'impie que le Seigneur Jésus détruira par le souffle de sa bouche, et qu'il anéantira par l'éclat de sa [parousia] présence ». Paul pouvait écrire ainsi positivement du développement de l'homme du péché avant le jour du Seigneur, à cause de son étude de la prophétie de Daniel, de laquelle aussi notre Seigneur parle (Matthieu 24 : 15) ; et probablement aussi parce qu'à Paul lui-même, dans ses  « visions et révélations », avait été montrée la grande dévastation que ce système devait faire dans l'Église.

            Il faut remarquer que Paul n'usa pas d'arguments tels que certains aujourd'hui sont enclins à employer contre la prétention que le jour du Seigneur est commencé. Il ne dit pas : O ! Thessaloniciens insensés, ne savez-vous pas que lorsque Christ viendra, vos yeux le contempleront et vos oreilles entendront le terrible son de la trompette de Dieu ; que vous en aurez en outre la preuve dans l'ébranlement des tombes et dans la sortie des saints de celles-ci. N'est-il pas évident que si un semblable raisonnement avait été approprié, Paul se serait empressé de se servir d'un argument aussi simple et facile à saisir ? Le fait qu'il ne s'en servit pas ne prouve-t-il pas que cet argument n'est pas et ne  peut pas être fondé sur la vérité ?

            Le fait que dans ses efforts énergiques à corriger leur erreur, Paul n'offrait que cette seule objection à leur prétention, est en lui-même une preuve évidente qu'il regardait leur idée générale sur le jour du Seigneur comme correcte, que ce jour pouvait venir sans être signalé par des démonstrations extérieures et qu'il pouvait être commencé tandis que beaucoup l'ignoreraient.. Paul n'avait que cette raison pour son objection, c'est que premièrement l'apostasie devait venir et, comme suite à celle-ci, le développement de l'homme du péché, — quel qu'il fût (un simple individu ou un grand système anti-chrétien qu'il personnifierait de la sorte) — qu'il devait apparaître, fleurir et commencer ensuite à décliner, avant le jour de la présence du  Seigneur. Ainsi donc, si cette seule objection faite par Paul n'est plus un obstacle, si nous constatons clairement et actuellement l'existence de cet homme du péché, dont l'histoire corresponde dans chacune de ses particularités à la description prophétique, depuis le commencement de son existence jusqu'au temps présent, — alors l'objection de Paul qui, elle seule, était à sa place en son temps, n'est plus aujourd'hui une objection valable contre la prétention actuelle que nous vivons dans le jour du Seigneur, le jour de sa présence. De plus, si l'homme du péché peut être facilement distingué, si son apparition, son développement et son déclin peuvent être clairement vus, ce fait devient alors une autre preuve corroborative des enseignements des chapitres précédents, qui montrent que nous sommes maintenant dans le Jour du Seigneur.

ESQUISSE PROPHÉTIQUE DE L'HOMME DU PÉCHÉ

            Celui qui étudie la prophétie y trouvera que l'homme du péché est distinctement indiqué dans les saintes Écritures, qui non seulement décrivent clairement son caractère, mais montrent aussi les temps et les lieux de son commencement, de sa prospérité et de son déclin.

            C'est justement par les noms que lui appliquent les écrivains inspirés que son caractère est dépeint avec beaucoup de vigueur. Paul l'appelle : « Ce méchant ou cet impie », « l'homme du péché », le mystère de l'iniquité », l'antichrist » et « le fils de perdition ». Le prophète Daniel l'appelle : L'abomination qui cause la désolation » (Daniel 11 : 31 ; 12 : 11) ; notre Seigneur parle de ce même caractère comme de « l'abomination de la désolation », dont a parlé le prophète Daniel (Matthieu 24 :15) et de nouveau comme d'une « bête » (Apocalypse 13 : 1-8). Ce même caractère fut aussi préfiguré par une petite corne, ou pouvoir, sortant d'une terrible bête que Daniel vit dans sa vision prophétique, avec des yeux, et une bouche qui proférait de grandes choses ; elle prospérait, faisait la guerre contre les saints et elle les vainquit (Daniel 7 : 8, 21). Jean vit aussi ce caractère et il en avertit l'église en disant : « Vous avez entendu dire que l'antichrist vient » ; il leur montre alors comment ils peuvent échapper à son influence (1 Jean 2 :18-27). Le livre de l'Apocalypse, également, est dans une large mesure une prophétie symbolique détaillée sur ce même antichrist ; mais nous ne pouvons que l'effleurer ici, réservant son examen plus particulier pour un volume suivant.

            Ces diverses appellations et brèves descriptions montrent un caractère subtil, trompeur, hypocrite, tyrannique et cruel qui s'est développé au sein de l'église chrétienne. C'est un caractère s'insinuant d'abord d'une manière graduelle et s'élevant ensuite rapidement en puissance et en influence pour en arriver à l'apogée de la puissance, de la richesse et de la gloire terrestres, tout en exerçant son influence contre la vérité, contre les saints et pour son propre agrandissement, prétendant jusqu'au bout avoir reçu la sainteté, l'autorité et la puissance de Dieu.

            Nous nous proposons de démontrer dans ce chapitre que l'homme du péché est un système et non un simple individu, comme beaucoup semblent le croire ; de même que le Christ consiste dans le vrai Seigneur et dans la vraie Église, ainsi l'antichrist est un système de contrefaçon, consistant en un faux seigneur et en une église apostate, à qui il fut permis pour un temps de dénaturer la vérité, de pratiquer la tromperie, de contrefaire l'autorité et le règne futurs du vrai Seigneur et de son Église, et d'enivrer les nations par de fausses et présomptueuses prétentions.

            Nous espérons prouver à la satisfaction de tout lecteur consciencieux que cette grande apostasie ou chute mentionnée par Paul, est venue, et que cet homme du péché a été développé, qu'il s'est « assis dans le temple de Dieu » (le temple réel, non le typique) ; qu'il a accompli toutes les prédictions des apôtres et des prophètes concernant son caractère, son œuvre, etc. ; qu'il a été révélé et que maintenant, depuis 1799, il se consume par l'esprit de la bouche du Seigneur [la vérité] ; et qu'il sera entièrement anéanti durant ce jour de la colère de l'Éternel, jour qui a déjà commencé à se révéler par le feu de flammes de la rétribution.

            Sans vouloir traiter à la légère les opinions des autres, nous croyons néanmoins nécessaire d'indiquer au lecteur quelques-unes des absurdités en rapport avec ce qui est généralement cru sur l'antichrist, afin que la dignité et le caractère raisonnable de la vérité sur ce sujet puissent être estimés convenablement par contraste avec cette affirmation étroite que tout ce que les Écritures ont prédit concernant ce caractère s'accomplirait par un seul homme au sens propre. Cet homme, prétend-on, exercera une telle influence sur le monde entier  qu'en peu d'années il accaparera les hommages et l'adoration de tous les hommes ; qu'il saura si bien s'imposer aux hommes et les tromper qu'ils le prendraient pour Dieu et l'adoreraient comme le Tout-Puissant Jéhovah, dans un temple juif rebâti. Tout cela se passerait, disent-ils, avec une rapidité foudroyante, — en trois ans et demi, — interprétant aussi mal le temps symbolique que « l'homme » symbolique lui-même.

            Les fables, les légendes absurdes et les contes d'enfants les plus imaginaires ne fournissent rien de semblable à ces vues extrêmes de quelques chers enfants de Dieu qui trébuchent et tombent sur une interprétation littérale du langage de Paul. En agissant ainsi, ils  s'aveuglent eux-mêmes et en aveuglent d'autres relativement à de nombreuses et précieuses vérités, lesquelles à cause de l'erreur sur ce sujet, ils ne sont pas préparés à voir clairement et sans préjugés. Peu importe jusqu'à quel point nous pouvons sympathiser avec eux, leur foi aveugle fait forcément sourire lorsqu'ils parlent d'un ton sérieux des différents symboles de l'Apocalypse qu'ils ne comprennent pas, en les attribuant littéralement à leur homme merveilleux. Ne veulent-ils pas nous faire croire que dans ce siècle, le plus sceptique que le monde ait jamais connu, il aurait dans ces courts trois ans et demi tout le monde à ses pieds, l'adorant comme  un Dieu, tandis que les César, les Alexandre, les Napoléon, les Mahomet et d'autres durent traverser les mers de sang et employer plusieurs fois trois ans et demi sans avoir accompli la millième partie de ce que ferait cet homme.

            Cependant ces conquérants avaient tous les avantages de l'ignorance et de la superstition profondes pour les aider, tandis qu'aujourd'hui nous vivons dans des conditions bien plus défavorables à un semblable développement de tromperie et de fraude ; dans un temps où les choses cachées sont manifestées comme jamais auparavant ; dans un temps où une fraude de cette sorte serait pas trop absurde et ridicule pour être prise en considération. La tendance de nos jours est en effet plutôt dans la direction d'un manque de respect pour les hommes, quels que soient leurs talents, leur bonté, leurs capacités, les postes de confiance et d'autorité qu'ils peuvent occuper. Cela est tellement vrai qu'on verrait plus vite le monde entier nier qu'il y ait un Dieu quelconque que de le voir adorer un de ses semblables comme le Dieu Tout-Puissant.

            Un grand obstacle pour beaucoup lorsqu'ils considèrent ce sujet, est la fausse idée qu'on se fait généralement sur le terme dieu ; on ne voit pas que le mot theos (dieu) ne s'applique pas uniquement à Jéhovah. Ce mot signifie un puissant, un gouverneur, et plus spécialement un gouverneur religieux ou ecclésiastique. Dans le Nouveau Testament le mot theos est rarement employé, excepté lorsqu'il est question de Jéhovah, parce que les apôtres, dans leurs discours, parlaient rarement et peu des faux systèmes de religion et rarement s'arrêtaient sur leurs dieux ou dirigeants sacrés.  Dans les textes suivants, le mot dieu (theos) est cependant employé pour être appliqué à d'autres qu'à l'Être suprême : Jéhovah. — Jean 10 : 34, 35 ; Actes 7 : 40, 43 ;  17 : 23 ; 1 Corinthiens 8 : 5.

            Reconnaissant l'ampleur du mot grec theos, on verra de suite que la déclaration de l'apôtre concernant l'antichrist — qu'il s'assiéra dans le temple de Dieu, voulant passer pour un dieu — n'implique pas nécessairement l'idée que l'antichrist doit s'élever lui-même au-dessus de Jéhovah, ni même qu'il veut essayer de se mettre à la place de Jéhovah. Elle veut simplement dire que ce personnage se présentera lui-même comme un gouverneur religieux, prétendant à l'autorité et l'exerçant sur et au-dessus de tout autre gouvernement religieux, allant même jusqu'à s'élever dans l'Église qui est le vrai temple de Dieu, où il prétend exercer et où il exerce une autorité seigneuriale comme son chef ou gouverneur autorisé. Partout où la signification du mot theos, dans le  grec, pourrait prêter à l'équivoque, il est précédé par l'article grec quand il se rapporte à Jéhovah ; c'est comme si en français on disait le Dieu. Dans les textes ci-dessus qui parlent d'autres dieux et dans celui-ci (2 Thessaloniciens 2 : 4) qui parle de l'antichrist, il n'y a pas une telle accentuation.

            Si cela est bien compris, une grande pierre d'achoppement sera éloignée ; l'esprit sera préparé à chercher les choses appropriées comme accomplissement de cette prédiction : non pas un Antichrist prétendant être Jéhovah et demandant à être adoré comme tel, mais quelqu'un qui prétend être le principal et suprême maître ou docteur religieux dans l'Église, et qui par cela même tente d'usurper l'autorité de Christ, le Chef, Seigneur et Maître divinement désigné.

            Il est aussi assez étrange que ceux qui ont cette vue littérale concernant l'homme du péché sont généralement ceux qui croient à la venue prémillénaire du Seigneur, qui cherchent et attendent que le Seigneur vienne à « tout moment maintenant ». Pourquoi tous ne peuvent-ils pas saisir la pensée de l'apôtre lorsqu'il déclare positivement que le Jour du Seigneur (le Jour de sa présence) ne peut venir et ne doit pas être attendu avant que l'homme du péché ait été révélé ? Il avait fallu plus de quarante ans pour bâtir le premier temple juif et il faudrait sûrement dix à vingt ans pour construire le nouveau temple à Jérusalem avec une magnificence plus grande que la précédente où ils attendent qu'un homme du péché au sens propre s'installe et soit adoré comme Dieu. Comment donc ceux qui croient de cette manière peuvent-ils attendre la venue du Seigneur à un moment quelconque maintenant ? Une telle manière de voir est en désaccord avec la raison, aussi bien qu'avec la prophétie de l'apôtre. Ou bien ils devraient, logiquement, cesser de croire à une venue du Seigneur à un moment quelconque ou bien abandonner leur attente d'un futur homme du péché ; car le Jour de la présence du Seigneur ne peut venir avant que l'apostasie soit arrivée et que l'homme du péché se soit développé et ait été révélé par cette apostasie.

             Mais lorsque nous comprenons correctement les paroles de l'apôtre et avons en même temps des idées exactes sur la manière dont doit se faire la venue du Seigneur, nous ne trouvons pas d'absurdités et de contradictions de ce genre, mais un parfait accord  et une harmonie convaincante. Aussi, c'est une telle vue que nous désirons présenter maintenant ; le lecteur lui-même se convaincra qu'elle est scripturale.

            Les différents titres appliqués à ce système sont évidemment symboliques ; ils ne désignent pas les noms d'un simple individu, mais bien les traits caractéristiques d'une combinaison religieuse et civile corrompue qui s'est développée dans l'église chrétienne nominale et qui, par son opposition subtile à Christ, le chef, et à sa véritable Église, son corps, mérite bien le nom d'Antichrist. Un tel système pouvait accomplir toutes les prédictions faites concernant l'antichrist, ou l'homme du péché, ce qu'un seul homme ne pouvait faire. Il est en outre évident que ce système antichrist n'est pas un des systèmes païens de religion, tels que le mahométisme ou le brahmanisme, parce que l'église chrétienne n'a jamais été sous l'autorité d'aucun système semblable et aucun de ces systèmes n'a son origine dans l'église chrétienne. Ils sont et ont toujours été indépendants de celle-ci.

            Le système qui répond pleinement à la description donnée par inspiration doit être un système professant le christianisme et doit contenir une grande majorité de ceux qui prétendent être chrétiens. Il doit de même avoir débuté par une apostasie, c'est-à-dire par une désertion de la vraie foi chrétienne — une apostasie secrète et furtive jusqu'à ce que les circonstances aient favorisé son élévation au pouvoir ; il faut chercher son commencement clandestin dans les jours des apôtres — dans le désir de quelques docteurs d'occuper une  place prépondérante.

            Il n'est pas nécessaire de chercher longuement pour trouver un caractère s'adaptant parfaitement à toutes ces exigences ; un caractère qui, décrit par les historiens profanes ainsi que par ses propres serviteurs abusés, s'accorde exactement avec les esquisses prophétiques concernant l'Antichrist. Mais lorsque nous déclarons que le seul et unique système dont l'histoire s'adapte à ces prophéties est la Papauté, que l'on ne nous interprète pas comme voulant dire que chaque catholique romain est un homme du péché, ou que les prêtres  ou même les papes de l'église de Rome sont ou ont été l'Antichrist. Aucun homme n'est l'Antichrist, « l'homme du péché », décrit dans les prophéties. Papes, évêques et autres, sont tout au plus des parties ou des membres du système de l'Antichrist, de même que tous ceux de la sacrificature royale ne sont que des membres du vrai Christ, sous Jésus leur tête, et de la même manière que ceux-ci, dans leur condition présente, sont dans leur ensemble l'Élie-antitype, bien qu'aucun d'eux ne soit l'Élie ou le Christ prédit. Remarquons en outre que l'église de Rome, considérée seulement comme système ecclésiastique, n'est pas l'homme du péché » et n'est jamais représenté par un homme dans aucune figure. Au contraire, le symbole employé pour indiquer une église considérée indépendamment de son Seigneur et Chef, est toujours une femme. La véritable Église est symbolisée par une « vierge chaste », tandis que l'église apostate qui est déchue de sa chasteté et de sa fidélité primitives au Seigneur est symboliquement appelée « une prostituée ». De même que la vraie Église « vierge » continue à être telle jusqu'à la fin de l'âge, moment où elle sera unie à son Seigneur et prendra son nom, — Christ — ainsi l'église apostate ne fut pas l'Antichrist ou l'homme du péché avant qu'elle fût unie à son seigneur et chef, le pape, et qu'elle soit devenue un empire religieux, faussement appelé chrétienté — c'est-à-dire royaume de Christ.

            Papauté, tel est le nom de ce faux royaume ; il fut établi sur une vérité faussement appliquée — sur cette vérité que les membres de l'église sont appelés à être des rois et des prêtres de Dieu et à régner sur la terre. Mais le temps de ce règne n'était pas encore venu ; l'âge  de l'Évangile n'avait pas été fixé dans ce but, mais pour la sélection, le développement, la discipline, l'humiliation et le sacrifice de l'Église qui doit suivre l'empreinte des pieds de son Seigneur en veillant et souffrant patiemment jusqu'au temps déterminé pour l'exaltation et  le glorieux règne promis — l'âge millénaire.

            Le Seigneur avait vu à l'avance que le christianisme nominal s'étendrait sur le monde et qu'en devenant populaire, il serait embrassé par un grand nombre qui  en adopteraient la forme extérieure sans pénétrer l'esprit de son organisation. Il avait vu par avance qu'au fur et à mesure que les masses de ces gens s'identifieraient avec l'Église, l'esprit mondain — lequel est l'opposé de l'esprit d'abnégation et de sacrifice de soi-même — y entrerait avec elles ; que l'égoïsme et le désir d'être grand et de dominer, s'introduisant ainsi, n'auraient pas à attendre longtemps une occasion favorable ; que c'est ainsi que l'Église chercherait à dominer le monde avant le temps — ou plutôt que l'élément mondain qui entrerait dans l'église ferait sentir son influence et, au nom de la véritable Église, saisirait le pouvoir civil de la terre que Dieu avait donné aux nations et qui ne peut pas passer pleinement entre les mains de la véritable Église avant la fin des «  temps des nations » en 1914.

            C'est ainsi que les choses se passèrent réellement : l'église nominale commença à déchoir, à mesure qu'elle croissait en nombre sous les enseignements et l'exemple d'hommes ambitieux dont les idées s'inclinaient de plus en plus en faveur de l'influence et du pouvoir mondains que le nombre et la richesse apportaient avec eux. L'esprit de l'église devint graduellement mondain et les choses du monde furent convoitées. La suggestion ambitieuse était celle-ci : « Si le grand Empire Romain, avec tout son pouvoir et son influence, ses armées et ses richesses, devenait seulement le soutien de l'église, combien il serait honorable et noble alors d'être un chrétien ! Combien alors les persécutions païennes cesseraient vite ! Non seulement nous pourrions alors leur en imposer, mais nous pourrions aussi les contraindre à adhérer à l'église, à la croix et au nom de Christ. Il est évident que ce n'était pas l'intention de Dieu que l'Église soit à tout jamais assujettie au monde et persécutée par lui ; les paroles de l'apôtre : « Ne savez-vous pas que les saints jugeront le monde ? » aussi bien que les promesses de notre Seigneur que nous régnerons avec lui et toutes ces prophéties qui parlent du règne de l'Église indiquent clairement que tel est le plan de Dieu. Il est vrai que l'apôtre écrivit que notre Seigneur reviendrait premièrement et exalterait l'Église, et qu'il nous exhorte à l'attendre ; mais plusieurs siècles sont maintenant passés et nous ne voyons aucun signe de la venue du Seigneur. Il  nous faut en conclure que les apôtres ont été quelque peu dans l'erreur. Pour nous, il semble clair que nous pouvons et devons employer tous les moyens pour obtenir le pouvoir sur le gouvernement civil et conquérir le monde pour le Seigneur. Il faudrait aussi que l'église ait un chef, quelqu'un qui représentât le Seigneur absent et l'église devant le monde — quelqu'un qui pût recevoir l'hommage du monde, exercer l'autorité de Christ et gouverner le monde avec une verge de fer, comme le prophète David l'a prédit. » C'est ainsi que graduellement, par un lent processus de raisonnements qui dura des siècles, l'attente réelle de l'église dans la seconde venue du Seigneur, en vue de son exaltation et de la bénédiction du monde, fut perdue de vue et qu'une nouvelle attente prit place — l'attente du succès sans le Seigneur, sous la suprématie et la direction d'une lignée de papes. Et c'est ainsi que par des connivences, des intrigues et des échanges de faveurs avec le monde, l'attente de l'église devint une fausse attente, un piège  trompeur par lequel Satan la conduisit d'erreurs en erreurs et de maux en maux, tant par la doctrine que par la pratique.

            Le moment où l'apostasie se développa comme « l'homme du péché » fut celui où la hiérarchie papale s'exalta elle-même sous la suprématie d'une lignée de papes, et où elle usurpa le gouvernement de la terre et commença à régner au nom du Royaume Millénaire de Christ et prétendit être ce Royaume. C'était un royaume frauduleux et contrefait quelle que fût la sincérité à le croire de certains de ses partisans. C'était un royaume frauduleusement imité, quelle qu'ait été la sincérité de certains de ses organisateurs et soutiens. Ce royaume était celui de l'Antichrist, peu importe la prétention de ses partisans à croire qu'il était le règne, la puissance et la gloire du vrai Christ sur la terre. C'est une erreur ; de croire qu'être consciencieux veut toujours dire avoir raison. Il n'y a pas de doute que tous les systèmes d'erreur ont autant et même plus de disciples consciencieux, quoique égarés, que d'hypocrites. Être consciencieux, c'est posséder l'honnêteté morale et cela n'a rien à faire avec la connaissance. Les païens mal informés adorent les idoles et leur sacrifient consciencieusement. Saul, renseigné faussement, persécutait les saints en toute bonne conscience ; de même aussi, beaucoup de papistes, mal enseignés, firent consciencieusement violence aux prophéties, persécutèrent les vrais saints et organisèrent le grand système de l'Antichrist. Pendant des centaines d'années, la papauté a non seulement trompé les rois de la terre, quant à son pouvoir, à sa prétention à les gouverner par droit divin et régné sur eux, mais elle s'est assise dans l'église, le temple de Dieu, où Christ seul doit être reconnu comme Chef et Maître, prétendant être le seul maître et législateur; et avec cela, elle a trompe tout le monde, excepté un petit nombre de fidèles, par son succès phénoménal et par son arrogante prétention. « Toute la terre était dans l'admiration » — étonnée, égarée, confondue, — « tous ceux dont les noms n'ont pas été écrits dans le livre de vie de l'Agneau » ; et beaucoup de ceux dont les noms sont écrits comme saints de Dieu ont été sérieusement ébranlés et dans la perplexité. Cette tromperie fut d'autant plus forte que ces desseins ambitieux ne se montrèrent que petit à petit et qu'ils se réalisèrent d'une manière encore plus graduelle. Cette séduction dura des siècles ; elle existait déjà secrètement sous forme d'ambition aux jours de Paul. Ce fut un lent processus au cours duquel une erreur suivit une autre erreur, — les déclarations d'un homme ambitieux s'ajoutant aux déclarations d'un autre et ainsi de suite dans le cours des temps. Ainsi, insidieusement, Satan sema et arrosa les semences de l'erreur et développa le système le plus grand et le plus influent que le monde ait jamais connu — l'Antichrist.

            Le mot Antichrist a une double signification : premièrement il veut dire contre (c'est-à-dire opposé à) Christ ; secondement il signifie à la place, ou une contrefaçon de Christ. Dans le premier sens, c'est une expression générale qui peut s'appliquer à tout ennemi s'opposant à Christ. Dans ce sens, Saul, plus tard appelé Paul, tous les Juifs, tous les Mahométans, tous les empereurs païens et tout le peuple de Rome furent des antichrists — adversaires de Christ (Actes 9 : 4). Mais ce n'est pas dans ce sens que les Écritures emploient le nom Antichrist ; elles négligent de semblables ennemis et appliquent le terme Antichrist dans le sens donné ci-dessus à la seconde signification, c'est-à-dire contre, dans le sens de dénaturer, de contrefaire, de prendre la place du vrai Christ. Ainsi Jean remarque : « Vous avez entendu que l’Antichrist vient ; — même maintenant il y a plusieurs antichrists » (1 Jean 2 : 18, 19). [Le grec fait la distinction entre l'Antichrist spécial et les autres en grand nombre qui sont moindres]. Et les remarques suivantes de Jean montrent qu'il ne parle pas de tous ceux qui sont opposés à Christ et à l'Église, mais d'une  certaine classe de ceux qui tout en professant être du corps de Christ, l'Église, ont abandonné les principes fondamentaux de la vérité, et par cela même, non seulement la dénaturèrent, mais prirent aux yeux du monde la place et le nom de la véritable Église — contrefaisant  ainsi réellement les vrais saints. Jean dit, en parlant d'eux : « Ils sont sortis du milieu de nous, mais ils n'étaient pas des nôtres » ; ils ne nous représentent pas, quand même ils peuvent se tromper eux-mêmes et le monde sur ce sujet. Jean déclare dans la même épître que ceux qu'il mentionne comme plusieurs antichrists ont l'esprit de l’Antichrist.

            Nous trouvons donc ici ce à quoi nous pouvions nous attendre, et nous le trouvons dans la papauté : Non une opposition au nom de Christ, mais un ennemi ou adversaire de Christ, en ce qu'il porte faussement son nom, contrefait son royaume et son autorité et dénature son caractère, ses plans et ses doctrines devant le monde — un adversaire et un ennemi en vérité plus pernicieux qu'un ennemi déclaré — tout ce qu'il y a de pire en fait d'ennemi. Cela est vrai, on ne peut trop le répéter, alors même que quelques-uns de ceux qui sont rattachés à ce système sont consciencieusement égarés, « séduisant et étant séduits ».

            Après ces indications sur l'identité et les caractéristiques de l'homme du péché, et sachant dans quel lieu et dans quelles circonstances nous pouvons le chercher, nous allons procéder à l'examen de quelques preuves historiques, prouvant, au-delà, de tout doute, que toutes les prédictions concernant l'Antichrist ont été accomplies dans le système papal d'une manière et à un degré tels qu'à la lumière de nos jours, tous doivent admettre que cela ne saurait se répéter. L'espace dont nous disposons nous oblige à ne donner qu'une simple esquisse de la grande masse du témoignage historique. Nous nous sommes bornés aux historiens reconnus les plus dignes de foi et nous avons cité en plusieurs cas les témoignages et les faits admis par des écrivains catholiques romains.

LES CIRCONSTANCES AYANT DONNE 

NAISSANCE A L'HOMME DU PÉCHÉ  

            UNE GRANDE APOSTASIE. Nous demandons d'abord : L'histoire nous parle-t-elle d'un accomplissement de la prophétie de Paul touchant une grande déchéance de la simplicité et de la pureté originelles des doctrines et de la vie de l'Église chrétienne et les agissements mystérieux d'une influence inique et ambitieuse dans l'Église avant le développement de la papauté, l'homme du péché — c'est-à-dire avant que le pape fût reconnu comme le chef de l'église ?

            Oui, et cela bien clairement ; la hiérarchie papale ne naquit que plusieurs siècles après que le Seigneur et les apôtres eurent fondé l'Église. Au sujet de cet intervalle, nous lisons:* [* Fisher. — Histoire universelle, page 193.]

            « Comme l'église croissait en nombre et en richesse, de magnifiques édifices furent construits pour le culte ; les services furent rendus plus somptueux et, dans le but d'aider à la dévotion, des sculptures et des peintures furent employées. Des reliques de saints et de martyrs furent chéries comme des possessions sacrées ; les observances religieuses furent multipliées, et l'église sous les empereurs chrétiens [au IVe siècle] avec la pompe de son clergé et ses cérémonies imposantes, prit beaucoup de la grandeur et de la splendeur visible du système païen qu'elle avait supplanté. » 

            Nous lisons encore:** [** White. — Histoire universelle, page 156. ]

            « Simultanément avec cet établissement [du christianisme comme religion de l'empire au IVe siècle] progressa une grande et générale corruption qui avait commencé deux siècles auparavant. La superstition et l'ignorance revêtaient les ecclésiastiques d'un pouvoir dont ils se servaient pour leur propre agrandissement. »

            Rapin fait observer que :

            « Au cinquième siècle, le christianisme fut corrompu par un grand nombre d'inventions humaines ; la simplicité de son gouvernement et de sa discipline furent réduits à un système de pouvoir clérical ; son culte fut profané par des cérémonies empruntées au paganisme. »

            « Dans son «  Histoire du Christianisme », Mosheim suit l'Église dans la déchéance de sa pureté et de sa  simplicité primitives ; comment elle descendit degré par degré dans sa profonde dégradation qui culmina dans le développement de « l'homme du péché ». Il ne ressort pas de cet ouvrage si son auteur a reconnu ou non l'Antichrist, mais il a tracé d’une façon magistrale les agissements du « mystère de l'iniquité » dans l’Église jusqu'au commencement du IVème siècle, — lorsque son travail fut soudainement arrêté par la mort. La place dont nous disposons ne nous permet pas de faire d'autres citations de son excellent et volumineux ouvrage mais nous en recommandons la lecture comme  grandement instructive par ce qu'elle nous apprend sur ce sujet.

            Nous citons une brève et frappante esquisse tirée de « L'Ancien Monde Romain » de Lord, sur l'histoire de l'église pendant les quatre premiers siècles, laquelle montre d'une manière claire et concise son déclin graduel et sa rapide dégénérescence après que l'obstacle dont parle saint Paul eut été éloigné. Il dit :

            « Au premier siècle peu de sages et de nobles furent appelés ; aucun grand nom ne nous est rapporte : ni philosophes, ni hommes d'état, ni nobles, ni généraux, ni gouverneurs, ni juges, ni magistrats. Les chrétiens n’étaient pas assez importants au premier siècle pour être généralement persécutés par le gouvernement. Ils n’avaient pas même retenu l'attention publique. Personne n'a écrit contre eux, pas même les philosophes grecs. Nous  ne lisons aucune protestation, ni apologie faite par les chrétiens eux-mêmes. Ils n'avaient pas, dans leurs rangs de grands hommes en fait de science, de talents, de richesse ou qui aient occupé une position sociale. Il n'y a rien de plus stérile, dans l'histoire, que les annales de l’église dans le premier siècle pour autant qu'il est question de grands noms. Cependant, dans ce siècle, les convertis se  multiplièrent dans chaque ville et les traditions indiquent le martyre de ceux qui étaient le plus en vue, y compris  à peu près tous les apôtres. »

            « Au second siècle, il n'y eut pas d'autres noms plus grands que ceux de Polycarpe, Ignace, Justin Martyr, Clément, Mélito et Appolonius, évêques paisibles ou intrépides martyrs, qui enseignaient leurs troupeaux dans  les chambres hautes et n'occupaient aucun rang dans le monde. Renommés seulement pour leur sainteté et leur simplicité de caractère, ils ne furent cités qu'à cause de leur foi et de leurs souffrances. En fait de martyrs, parmi lesquels quelques-uns ont écrit des apologies et des traités de valeur, nous ne trouvons parmi eux personne d'un rang élevé. C'était une disgrâce, aux yeux des grands et des puissants, que d'être chrétien. La première littérature chrétienne est principalement apologétique ; le caractère doctrinal en est simple et pratique. Il y eut des controverses dans l'Église, une vie religieuse intense, de grandes activités, de grandes vertus, mais pas de conflits extérieurs, ni d'histoire séculière. Elle n'avait pas encore attaqué le gouvernement ou les grandes institutions sociales de l'empire. Elle n'était qu'une petite troupe d'hommes purs et irréprochables qui n'aspiraient pas à diriger la société. Mais ils avaient attiré l'attention du gouvernement et étaient maintenant d'une importance suffisante pour être persécutés. Ils étaient regardés comme des fanatiques qui cherchaient à détruire le respect dû aux institutions existantes.

[L'ÉGLISE S'ORGANISE POUR GOUVERNER]

            « Dans ce siècle, la politique de l'église s'organisa tranquillement. Il y eut une association organisée entre ses membres ; les évêques étaient devenus influents, non dans la société, mais parmi les chrétiens ; des diocèses et des paroisses furent établis ; il y eut une distinction entre les évêques des villes et ceux de la campagne ; des  délégués des églises s'assemblèrent pour discuter des articles de foi ou supprimer des hérésies naissantes ; le système diocésain fut développé et la centralisation ecclésiastique commença ; on se mit à considérer les diacres comme faisant partie du haut clergé ; les armes d'excommunication furent forgées ; des efforts missionnaires furent poursuivis ; les fêtes de l'église furent créées ; le gnosticisme fut embrassé par nombre des principaux esprits ; des écoles de catéchistes enseignèrent systématiquement la foi ; les formules du baptême et les sacrements prirent une grande importance et le monachisme devint populaire. L'église posait ainsi le fondement de sa future politique et de sa puissance.

            « Le troisième siècle vit l'Église comme une institution plus puissante. Des synodes réguliers furent tenus dans les grandes villes de l'empire ; le système métropolitain était mûr ; les canons de l'Église furent définitivement fixés ; de grandes écoles de théologie attirèrent les esprits chercheurs ; les doctrines furent systématisées [définies, limitées et formulées dans les credo et confessions de foi]. Le Christianisme s'était tellement étendu qu'il ne pouvait être que persécuté ou légalement reconnu. De grands évêques gouvernaient l'église croissante ; de grands docteurs [en théologie] discutaient sur les questions [de philosophie et de science faussement ainsi nommées] qui avaient agité les écoles grecques ; les édifices des églises furent agrandis et des banquets institués en l'honneur des martyrs. L'Église s'avançait rapidement vers une position qui attirait sur elle l'attention de l'humanité.

            « Ce ne fut qu'au quatrième siècle — lorsque la persécution impériale eut cessé, que [l'Empereur Romain] Constantin fut converti ; que l'église se fut alliée avec l'État ; lorsque la foi primitive fut corrompue ; que la superstition et la vaine philosophie eurent pénétré dans les rangs des fidèles ; que les évêques furent devenus courtisans et les églises riches et splendides ; lorsque les synodes furent amenés sous l'influence politique ; que les monachistes [moines] eurent établi de faux principes de vertu ; que les politiciens et les dogmaticiens eurent marché la main dans la main, que les empereurs eurent renforcé les décrets des conciles ecclésiastiques, que les hommes haut placés y entrèrent. Lorsque le Christianisme fut devenu la religion de la cour et des classes aristocratiques, il servit à soutenir les maux mêmes contre lesquels il protestait à l'origine. L'église fut non seulement imprégnée par les erreurs de la philosophie païenne, mais elle adopta beaucoup des cérémonies compliquées et magnifiques du culte oriental. Les églises devinrent, au IVe  siècle, aussi imposantes que les anciens temples des idoles. Les fêtes devinrent fréquentes et imposantes. Le peuple y adhéra parce qu'il y trouvait de l'émotion et la suspension du travail. La vénération des martyrs aboutit à l'introduction de statues, future source de l'idolâtrie populaire. Le christianisme fut rehaussé par de pompeuses cérémonies. La vénération des saints se rapprocha de leur déification et la superstition exalta la mère de notre Seigneur comme un objet de culte absolu. Les tables de communion devinrent d'imposants autels dans le genre des autels des sacrifices judaïques, et les reliques des martyrs furent conservées comme des amulettes sacrées. La vie monastique mûrit en un grand système de pénitence et de rites expiatoires. Des armées de moines se retirèrent dans des lieux tristes et solitaires et s'adonnèrent à des rapsodies, à des jeûnes et à des pénitences. Ils formaient une triste et fanatique catégorie d'hommes qui méconnaissaient le but pratique de la vie.

            « Le clergé, ambitieux et mondain, recherchait le rang et la distinction. Il assiégeait même les cours des princes et aspirait aux honneurs temporels. Il ne fut plus soutenu par les contributions volontaires des fidèles, mais par des revenus fournis par le gouvernement et par des propriétés héritées des anciens temples païens. De gros legs furent faits à l'église par des riches et l'administration en fut confiée au clergé. Ces dons devinrent la source de la plus grande opulence. Comme ces richesses allaient croissant et furent confiées aux prêtres, ceux-ci devinrent indifférents aux besoins du peuple qui ne les soutenait plus. Ils devinrent paresseux, arrogants et indépendants. Le peuple fut exclu du gouvernement de l'église. L'évêque devint un grand personnage qui nommait son clergé et le dirigeait. L'église s'allia avec l'État et les dogmes religieux furent renforcés par l'épée du magistrat. »

UNE IMPOSANTE HIÉRARCHIE AVEC DES GRADES VARIES FUT ÉTABLIE, AYANT A SA TÊTE L'ÉVÊQUE DE ROME

            « L'empereur tranchait les points de la foi et le clergé fut exempté des charges de l'État. Lorsque le clergé eut obtenu un si grand pouvoir et fut devenu si riche, il y eut une grande affluence pour l'office de prêtre ; les hommes furent élevés à de grands sièges [évêchés], non à cause de leur piété ou de leurs talents, mais par suite de leur influence chez les grands. La mission de l'Église fut perdue de vue dans une alliance dégradante avec l'état. Le christianisme fut une parade, un ritualisme, un bras de l'état, une vaine philosophie, une superstition, une formule. »

            Ainsi la grande apostasie, prédite par l'apôtre Paul, est un fait établi par l'histoire. Tous les historiens en témoignent, même ceux qui approuvent l'élévation au pouvoir et louent les principaux acteurs du système.  Nous regrettons que l'espace dont nous disposons limite  nos citations à quelques-unes des expressions les plus significatives. L'apostasie, couvrant une période de siècles, fut si graduelle qu'elle fut beaucoup moins remarquable pour ceux qui vivaient de son temps que pour nous qui la voyons dans son ensemble ; elle fut d'autant  plus séduisante que chaque pas fait en avant vers l'organisation et vers l'influence et la puissance sur l'Église et sur le monde, fut fait au nom de Christ et, comme on le prétendait, pour le glorifier et accomplir ses plans décrits dans les Écritures. C'est ainsi que se développa le grand Antichrist, — le plus dangereux, le plus subtil et le plus persistant adversaire du vrai Christianisme et le persécuteur le plus âpre des vrais saints.

L'OBSTACLE ENLÈVE

            L'apôtre Paul prédit que ce principe d'iniquité travaillerait secrètement pendant un temps, tandis que quelque chose s'opposant à lui serait sur son chemin, jusqu'à ce que, l'obstacle enlevé, il puisse avoir libre cours et progresser rapidement jusqu'au développement  de l'Antichrist. Il dit : « II faut seulement que celui qui le retient encore ait disparu » (2 Thessaloniciens 2 : 7). Que dit l'histoire pour montrer l'accomplissement de cette prédiction ? Nous y trouvons que ce qui empêchait le développement rapide de l'Antichrist était le fait que  la place à laquelle il aspirait était déjà occupée par un autre. L'empire romain avait non seulement conquis le monde et lui avait donné sa politique et ses lois, mais ayant reconnu que les superstitions religieuses étaient les plus fortes chaînes par lesquelles on peut tenir et diriger un peuple, il adopta un plan qui avait son origine à Babylone dans le temps de sa grandeur, lorsqu'elle dominait sur le monde entier. Ce plan consistait en ce que l'empereur devait être considéré comme dirigeant et gouvernant les affaires religieuses aussi bien que les affaires civiles. Pour appuyer cela, il fut prétendu que l'empereur était un demi-dieu, descendant en quelque sorte de leurs divinités païennes. C'est comme tel qu'on lui rendait un culte et que ses statues étaient adorées ; et c'est comme tel qu'il fut appelé Pontifex Maximus, chef des prêtres ou le plus grand gouverneur en matière de religion. Et c'est là le titre même qui a été donné aux pontifes ou papes de la hiérarchie romaine, depuis que l'Antichrist a obtenu « la puissance, le trône et la grande autorité » des anciens gouverneurs de Rome. — Apocalypse 13 : 2.

            Mais l'ancienne Rome païenne et Babylone n'avaient qu'un simple squelette de pouvoir sacerdotal, comparé à l'organisation complexe et minutieuse, aux inventions de doctrines et de pratiques de la Rome papale, le successeur triomphant de leur système qui, maintenant, après des siècles de ruse et d'habileté, est si puissamment retranché que même aujourd'hui, où son pouvoir est extérieurement brisé et où il est dépouillé de toute domination civile, il régit le monde et dirige les royaumes secrètement, d'une manière déguisée, bien plus complètement que les empereurs romains ne surent gouverner les rois qui leur étaient subordonnés.

            Qu'il soit rapporté à leur honneur que pas un des empereurs romains n'a exercé, comme Pontifex Maximus, ou principal gouverneur religieux, la tyrannie de quelques-uns de leurs successeurs sur le trône papal. Sur ce point, Gibbon dit (Vol. II, p. 85).

            « On doit admettre que le nombre de protestants qui furent exécutés dans une seule province et pendant un seul règne, excéda de beaucoup celui des premiers martyrs pendant trois siècles sous l'empire romain tout entier. » Selon la coutume de leur temps, ils favorisèrent les dieux les plus populaires ; mais partout où leurs armées pénétrèrent, les dieux et le culte des peuples conquis étaient généralement respectés. On en vit la preuve en Palestine ; ce pays, quoique gouverné par les Romains, avait la liberté religieuse et la liberté de conscience généralement respectées par le Pontifex Maximus impérial qui montrait ainsi, comme gouverneur religieux, sa clémence envers le peuple et son harmonie avec tous les dieux populaires.

            Nous voyons donc ainsi que ce qui empêchait le hâtif développement de l'Antichrist était le fait que le siège convoité de la suprématie spirituelle était occupé par les représentants de l'empire le plus solide que le monde ait jamais connu, et que tous ceux qui auraient essayé de déployer ouvertement de l'ambition dans cette direction se seraient exposés à la colère des maîtres du monde. Ainsi, cette inique ambition agit premièrement en secret, prétendant n'avoir aucune ambition de se saisir du pouvoir ou de l'autorité, — jusqu'à ce qu'une occasion favorable se présentât, — lorsque l'église nominale se fut agrandie et eut pris de l'influence et que le pouvoir impérial divisé par les dissensions politiques eût commencé à décroître.

            Le pouvoir de Rome déclina rapidement et sa force et son unité furent divisées entre les six prétendants aux honneurs impériaux quand Constantin devint empereur. Qu'il ait adopté le christianisme, en partie du moins, dans le but de fortifier et d'unifier son empire, il est raisonnable de le supposer. Sur ce point, l'histoire dit :

            « Quant à savoir si Constantin a embrassé le christianisme par conviction de sa vérité ou par politique, il  y a là matière à discussion. Il est certain que cette religion, quoique méprisée secrètement, ou même persécutée activement par le pouvoir romain, s'était répandue parmi le peuple de sorte que Constantin s'affermit lui-même dans l’affection de ses soldats en l'adoptant... C'est par ambition mondaine que Constantin se déclara chrétien  et non par l'esprit de Christ qui dit : « Mon royaume  n’est pas de ce monde ». Constantin fit du christianisme la religion de l'empire et c'est de ce moment  que nous  trouvons son influence souillée par les choses terrestres… Aucun évêque particulier n'était regardé comme le chef de l’église entière, tandis que l'empereur l'était. C'est en cette qualité qu'il convoqua le Concile de Nicée ; et ayant pris parti contre Arius dans la controverse que celui-ci eut avec Athanase le concile se mit du côté de l'empereur » * [Willard : Histoire universelle, page 163.]

            « Quels qu’aient été les avantages résultant de l'acquisition d’un prosélyte impérial, celui-ci se distingua entre les milliers de ses sujets qui avaient embrassé le christianisme plutôt par la splendeur de la pourpre que par la supériorité de sa sagesse ou de ses vertus... La  même année de son règne où il convoqua le concile de Nicée fut flétrie par l'exécution de son fils aîné. La gratitude de l'église a exalté les vertus et excusé les fautes d’un patron généreux, qui avait assis le christianisme sur le trône du monde romain. » ** [ Gibbon, volume II, page 269]

            Ainsi donc, sous le règne de Constantin l'opposition de l’empire au christianisme fut favorable à ce dernier et l’impérial Pontifex Maximus devint le Patron de celle qui professait être l’Église de Christ mais qui était en réalité l’église apostate ; il la pris par la main et  l’aida à prendre une place de popularité et de splendeur de laquelle elle fut capable plus tard, lorsque le pouvoir impérial se fut affaibli, d'élever ses propres représentants sur le trône religieux du monde comme principal gouverneur religieux — Pontifex Maximus.

            Mais c'est une erreur de supposer, comme le font beaucoup de personnes, que l'église était dans ce temps-là une église pure (vierge), soudainement élevée à une dignité et à un pouvoir qui devinrent son occasion de chute. C'est tout à fait le contraire. Comme nous l'avons déjà dit, une grande apostasie avait, eu lieu et l'église avait déchu de sa pureté primitive, de sa simplicité et de sa liberté, et était tombée dans l'esclavage des credo et dans les factions ambitieuses. Ses erreurs et ses cérémonies ressemblant à celles de philosophies païennes, ornées de quelques vérités et renforcées et reliées avec la doctrine du tourment éternel, amenèrent dans l'église de grandes multitudes dont le nombre et l'influence devinrent de précieux auxiliaires pour Constantin, et qui furent par conséquent respectés et employés par lui. Il n'est aucun de ces hommes mondains qui ait jamais pensé sérieusement à épouser la cause de l'humble « petit troupeau » ressemblant à Christ — de l'Église vraiment consacrée, dont les noms sont écrits dans les cieux. La popularité qu'il avait parmi ses soldats, mentionnée par les historiens, est tout à fait différente de la popularité qui doit exister entre les vrais soldats de la croix.

            Comme preuve de cela, nous citons ici quelques mots de l'histoire concernant l'état de la société religieuse sous Dioclétien, le prédécesseur de Constantin, qui, vers la fin de son règne, croyant que les chrétiens avaient essayé de lui ôter la vie, devint leur ennemi, les persécuta en ordonnant la destruction des Bibles, le bannissement des évêques, et finalement en décrétant la mort de tous ceux qui s'opposaient à ses ordonnances. Gibbon * [Gibbon, volume II, pages 53 et 57.] dit de cette époque :

            « Dioclétien et ses collègues conféraient souvent les charges les plus importantes aux personnes qui avouaient abhorrer le culte des dieux, mais qui déployaient de l’habileté pour le service de l'État. Les évêques occupaient un rang honorable dans leurs provinces respectives et ils étaient traités avec distinction et respect, non seulement par le peuple, mais par les magistrats eux-mêmes. Dans chaque ville, les anciennes églises furent  jugées insuffisantes pour contenir le nombre croissant  des prosélytes et on érigea à leur place des édifices plus imposants et plus spacieux pour le culte public des fidèles. La corruption des mœurs et des principes, dont Eusèbe se plaignit si fortement, peut être considérée non seulement comme une conséquence, mais comme une preuve de la liberté dont les chrétiens jouirent sous le règne de Dioclétien et dont ils abusèrent. La prospérité avait relâché les règles de la discipline. La tromperie, l'envie et la malice prévalaient dans chaque assemblée. Les prosélytes aspiraient aux charges épiscopales qui devenaient de jour en jour un objet plus digne de leur ambition. Les évêques qui luttaient les uns contre les autres pour la prééminence ecclésiastique, paraissaient par leur conduite prétendre à un pouvoir séculier et tyrannique dans l'église ; et la foi vivante qui distinguait encore les chrétiens des Gentils, se montrait beaucoup moins dans leur vie que dans leurs écrits de controverse.

            « L'histoire de Paul de Samosate qui occupa le siège métropolitain [l'évêché] d'Antioche, tandis que l'Orient était entre les mains d'Odénath et de Zénobie, peut servir à illustrer les conditions et le caractère de ces temps (270 Ap. J.C.). Paul considérait le service de l'église comme une profession très lucrative. Sa juridiction ecclésiastique était vénale et rapace ; il arrachait de fréquentes contributions aux plus opulents des fidèles et employait pour son usage personnel une considérable partie des revenus publics. [La critique a prétendu, dit Gibbon, que Paul remplissait l'office de Ducenarius ou procurateur, avec un salaire annuel de 200 sesterces, — environ 77.000 $] (27 millions de frs 1953 — Trad.) Par l'orgueil et le luxe de Paul, la religion chrétienne devint odieuse aux yeux des Gentils. Sa salle de conseil, son trône, la splendeur avec laquelle il paraissait en public, la foule suppliante qui sollicitait son attention : la quantité de lettres et de suppliques pour lesquelles il dictait ses réponses, la hâte perpétuelle des affaires dans lesquelles il était engagé, étaient des conditions qui auraient mieux convenu aux fonctions d'un magistrat qu'à l'humilité d'un évêque primitif. Lorsqu'il haranguait son peuple du haut de la chaire, Paul affectait le style figuré et les gestes théâtraux des sophistes de l'Asie, tandis que la cathédrale résonnait des acclamations les plus extravagantes à la louange de son éloquence divine. Le prélat d'Antioche était arrogant, raide et inexorable vis-à-vis de ceux qui résistaient à son pouvoir et qui refusaient de flatter sa vanité ; mais il se relâchait de sa discipline et il était prodigue des trésors de l'Église pour le clergé qu'il protégeait. »

            Ainsi, sous le règne de Constantin, tout obstacle fut finalement enlevé et, comme nous allons le voir, l'organisation de la Papauté — l'église nominale sous la suprématie de l'évêque de Rome comme pape — s'effectua bien vite.

DÉVELOPPEMENT RAPIDE DE L'ANTICHRIST

            Le développement rapide de la hiérarchie papale après l'adhésion de Constantin est un trait vraiment remarquable de son histoire. « Le prince de ce monde » tint sa promesse de donner comme récompense le pouvoir et la domination à ceux qui l'adoreraient et lui obéiraient (Matthieu 4 : 8, 9). Par l'édit de Milan, Constantin donna une sécurité légale aux possessions de l'église et les chrétiens rentrèrent en possession des terres qui leur avaient été enlevées tout d'abord. Un second édit, en l'an 321, autorisa de faire à l'église des legs de propriétés, tandis que Constantin donnait lui-même un exemple de libéralité en prodiguant sans mesure les biens et les richesses au clergé chrétien. Cet exemple, donné par l'empereur, fut suivi par des milliers de ses sujets, dont les offrandes pendant la vie et les legs à l'heure de la mort affluaient dans les trésors ecclésiastiques. White dit : * [White : Histoire universelle, page 155.]

            « L'église de Rome, en raison de sa position dans la ville capitale, comme aussi du nombre et de la richesse de ses convertis, commença de bonne heure par s'assurer l'autorité sur les autres [sur les églises des autres villes et pays]. De nombreuses circonstances concoururent à augmenter l'influence de son évêque, bien que son ambition et son usurpation fussent pour un temps vigoureusement repoussées. Le transfert, [par Constantin, du siège du pouvoir de Rome à Constantinople en 334],  accrut le pouvoir de l'église d'occident, en conférant à l'évêque la principale magistrature. De plus, il faut y ajouter la sanction, donnée par Gratien et Valentinien,  à la coutume d'en appeler à Rome, et les pèlerinages fréquents aux tombes de saint Pierre, de saint Paul et d'autres martyrs. »

            Après la mort de Constantin, les chances variées de l'empire romain paraissent avoir coopéré à l'avancement de l'église apostate et au développement de l'Antichrist ; car l'église n'avait pas encore été unifiée sous un chef ou pape, regardé comme le représentant ou vice-gérant de Christ. Les empereurs qui succédèrent à Constantin jusqu'à Théodose continuèrent à se considérer comme les chefs de l'Église, en qui se concentrait l'autorité divine. Bien qu'aucun des 1800 évêques de l'empire ne fût encore préparé pour demander à être reconnu comme le chef ou pape, plusieurs avaient jeté les yeux sur cette bonne fortune et montraient aux empereurs le peu de fondement de leurs prétentions au titre de Pontifex Maximus, en se servant de cet argument que puisqu'ils adoraient les saints morts, ils ne devaient pas avoir moins de respect pour leurs représentants vivants — les évêques. Néanmoins dans leurs édits, les empereurs firent fréquemment allusion à l'empire comme à une hiérarchie divine et à eux-mêmes comme à des personnages divins.* [ Voy. Gibbon, volume II, page 108.]

            La puissance et la suprématie de l'évêque de Rome augmentèrent à vue d'œil : cinquante ans après que le christianisme eut été légalement établi, son opulence et sa dignité comme évêque de la ville capitale du monde étaient vraiment grandes. Ammianus, historien contemporain, décrivant son opulence et son ostentation, dit : « II surpassait les rois en splendeur et en magnificence, se faisant traîner dans de majestueux chariots ; parés de fins atours, il se distinguait par son luxe et son orgueil. » Le transfert à Constantinople du siège de l'empire, la menace pour la ville de Rome de l'invasion des barbares du nord, le changement continuel des généraux et des gouverneurs dans l'empire en décadence, faisaient de l'évêque de Rome l'être officiel le plus honoré, comme y étant le plus stable ; son prestige croissant graduellement s'augmenta encore, aussi bien par le transfert des splendeurs rivales de la cour impériale à Constantinople que par la vénération attachée au nom de Rome par tous les peuples du monde.

            Pour illustrer cela, nous faisons remarquer que, en l'an 455, lorsque la ville de Rome fut envahie et pillée par les vandales et que tous les environs étaient dans la détresse et la désolation, Léon, l'évêque de Rome, crut le moment opportun de proclamer le pouvoir spirituel pour impressionner les barbares et les Romains. Il se montra aux grossiers et superstitieux barbares, déjà fortement impressionnés par ce qu'ils voyaient autour d'eux de la grandeur de Rome et de ses richesses, revêtu de ses vêtements pontificaux en s'écriant : « Méfiez-vous, je suis le successeur de saint Pierre, celui à qui Dieu a donné les clefs du royaume des cieux et contre qui les portes de l'enfer ne peuvent prévaloir ; je suis le représentant vivant du pouvoir divin sur la terre ; je suis César, un César chrétien, gouvernant dans l'amour et à qui tous les chrétiens doivent obéissance ; Je tiens en mes mains et les malédictions de l'enfer et les bénédictions du ciel ; je relève tous les sujets de l'obéissance aux rois ; je donne et j'enlève, par droit divin, tous les trônes et toutes les principautés de la chrétienté. Prenez garde maintenant de profaner le patrimoine qui m'est donné par votre invisible roi ; pliez devant moi vôtre cou et priez pour que la colère de Dieu soit écartée. »

            L'évêque de Rome se hâta de profiter des avantages que lui donnait la vénération du nom et de la place ; il prétendit bientôt à la supériorité sur tous les autres évêques, gouverneurs et maîtres. Il prétendit non seulement à la domination ecclésiastique du monde, mais aussi à la domination civile. Dieu, disait-il, ayant investi l'église de Rome de la domination de la terre, par droit d'héritage avec le droit de couronner et de découronner, d'élever et d'abaisser tous les gouverneurs du vieil empire romain. Ces prétentions furent si souvent émises et si souvent repoussées par des évêques concurrents qu'il est presque impossible de fixer la date exacte où elle commencèrent. La Papauté, elle, prétend qu'elle fut organisée dans les jours des apôtres et que Pierre fut le premier pape ; mais cela est non seulement sans preuve, mais très positivement contredit par l'histoire tout entière. Cette dernière montre que quoique l'iniquité de l'ambition travaillât secrètement pendant un temps, assez long, elle fut empêchée de se développer en Antichrist jusqu'à ce que l'empire romain ait commencé à se désagréger.

            Dès maintenant nous avons affaire avec l'Antichrist dont le développement graduel et l'organisation provenant d'une ambition agissant secrètement ont été un prélude frappant du terrible caractère qui s'est déployé après que le pouvoir convoité eut été saisi — de l'an 539 à l'an 1799, soit pendant 1260 ans. De cette période, les 300 premières années marquent l'augmentation de son pouvoir temporel ; les 300 dernières marquent son déclin sous l'influence de la Réformation et de la civilisation ; la période intermédiaire de sept siècles embrasse le temps de la gloire de la Papauté et les « âges de ténèbres » du monde, pleins d'impostures et de tromperies faites au nom de Christ et de la vraie religion.

            Un écrivain catholique romain appuie pleinement nos conclurions sur ce sujet et nous présentons ses paroles, sans nous occuper autrement de leur apprêt, comme étant un témoignage corroboratif. Il donne, avec un enthousiasme ardent, une description du développement de la Papauté et la décrit comme une plante d'origine céleste et, par suite, de croissance rapide et de haute exaltation dans le monde, disant :

            « L'accroissement du pouvoir temporel des papes présente à l'esprit un des phénomènes les plus extraordinaires que les annales de la race humaine aient offert à notre stupéfaction et à notre admiration. Par une singulière combinaison de concours de circonstances, un nouveau pouvoir, une nouvelle domination s'éleva silencieusement et de façon continue sur les ruines de cet empire  romain qui avait établi son influence sur presque toutes les nations et races qui vivaient pendant la période de sa force et de sa gloire et s'était fait respecter par elles. Cette nouvelle puissance exerça bientôt une plus grande autorité que l'empire dont elle vit les ruines gigantesques se briser en fragments et tomber en poussière. Dans Rome même, le pouvoir du successeur de Pierre crût côte à côte avec celui de l'empereur et sous son ombre protectrice ; l'influence croissante des papes fut telle que la  majesté du souverain pontife semblait vouloir bien vite éclipser la splendeur de la pourpre.

            « Le transfert, par Constantin, du siège de l'empire de l'occident en orient, des rives historiques du Tibre aux merveilleuses côtes du Bosphore, posa la base d'une souveraineté qui commença en réalité lors de cet important changement. En effet, c'est presque de ce jour que Rome, qui avait été témoin de la naissance, de la jeunesse, de  la splendeur et du déclin de la puissante race qui avait transporté son nom avec ses aigles dans les régions lointaines du monde connu alors, fut graduellement abandonnée par les héritiers de son renom, et ce peuple romain, déserté par les empereurs, en proie facile aux ravages des barbares auxquels ils n'avaient plus le courage de résister, mit sa confiance dans l'évêque de Rome,  son gardien, son protecteur, son père. D'année en année, l'autorité temporelle des papes prit plus de forme et augmenta en force, sans violence, sans effusion de sang,  sans fraude, par la force de circonstances irrésistibles,  amenées visiblement comme par la main de Dieu. »

            Tandis que les catholiques romains représentent ainsi l'élévation de la Papauté sur les ruines de la Rome païenne, comme un triomphe du christianisme, ceux qui connaissent le véritable esprit de ce dernier cherchent en vain quelque trace de cet esprit dans la prostitution de l'église et dans son alliance impure avec le monde. Le vrai chrétien ne peut voir, dans les avantages fournis par l'ignorance, la superstition, les calamités et les différentes circonstances des temps dont l'église de Rome tira parti, aucune évidence d'une intervention divine en sa faveur. Il n'est pas non plus possible de découvrir dans l'exaltation de l'église de Rome au pouvoir et à la gloire terrestres, aucune preuve des promesses du Seigneur à la véritable Église, quant à son exaltation dans le propre temps — après que l'Antichrist serait venu et s'en serait allé ; car l'exaltation de la véritable Église ne sera pas sur un trône taché de sang et souillé de crimes comme le trône de la Papauté l'a été depuis son commencement ; et le vrai Christ n'aura  jamais besoin d'en appeler aux rois de la terre pour établir son pouvoir ou le défendre. Les signes qui distinguent la contrefaçon du vrai royaume de Christ sont facilement reconnaissables pour ceux qui sont instruits par les Écritures, de ce qu'est le vrai Christ et son corps, la véritable Église, les principes sur lesquels son royaume sera établi et le but de son établissement.

            Mais personne ne doit supposer que, même en ces temps corrompus, l'Église réelle de Christ se soit jamais éteinte ou ait été perdue de vue. « Le Seigneur connaît ceux qui sont siens » dans tous les âges et dans n'importe quelle condition. Dieu permit que, comme blé, ils crussent au milieu d'un champ rempli d'ivraie ; que, comme or, ils fussent dans la fournaise, pour être purifiés et éprouvés et rendus  « propres pour l'héritage des saints dans la lumière ». Il est vrai que la course de la multitude de ceux qui s'appelaient chrétiens occupe la place la plus proéminente dans les pages de l'histoire, mais il n'y a aucun doute que, au milieu de toutes les séductions du mystère de l'iniquité et malgré toutes les persécutions, il ne soit resté un petit nombre de fidèles qui ont marché dignes de leur haut appel : il leur fut donné de se reposer, inscrits par Dieu comme héritiers de la couronne qui ne se flétrit pas et qui est réservée pour eux dans les cieux.

            Ainsi, le fait est clairement indiqué dans les pages de l'histoire que cet homme du péché, l'Antichrist, est né à Rome ; que malgré l'opposition qu'on lui fit au commencement, il s'éleva graduellement au pouvoir ; ou, ainsi que cela est exprimé dans la prophétie de Daniel, comme « une petite corne » il s'éleva, sortant de la tête de cette vieille bête romaine, cette « grande et terrible bête » pour laquelle Daniel ne trouva aucun nom, qui eut un tel pouvoir pour blesser et détruire. Et, par la suite, nous trouvons que l'histoire de l'Antichrist correspond exactement, non seulement avec la prophétie de Daniel, mais avec toutes les prophéties qui le concernent.

LE CARACTÈRE DE L'ANTICHRIST DANS L'HISTOIRE

            Ayant identifié l'Antichrist, nous voulons tout d'abord comparer les caractères de la Papauté avec les prophéties qui en parlent et qui décrivent le caractère et les agissements de l'Antichrist, ou l'homme du péché. 

            Quelques-uns pourraient demander s'il est juste de laisser de côté les empereurs de Rome (qui prétendaient au suprême gouvernement religieux), en n'appelant pas leur système l'Antichrist, mais en appliquant complètement et entièrement ce titre à l'organisation du système papal. Nous répondons que cela est certainement juste, et nous renvoyons de nouveau le lecteur à la définition que nous avons déjà donnée de l'Antichrist, telle qu'elle est employée dans les Écritures, c'est-à-dire :  « à la place de »,  « au lieu de ». Pour répondre à cette  définition, il doit prétendre être un empire spirituel,  prétendre gouverner les royaumes de la terre par cette autorité spirituelle ; il doit, non seulement être un antagoniste, mais une contrefaçon, une fausse représentation, une prétention d'être le royaume de Christ et  exerçant ce qui, au temps marqué par Dieu, sera l'autorité du vrai Christ, l'Église glorifiée et complète sous le vrai Chef et Seigneur — le réel Pontifex Maximus.

            Non seulement la Papauté prétend être le royaume glorifié de Christ, promis par le Seigneur, par les apôtres et par les prophètes, mais elle applique à elle-même et à ses chefs successifs (les papes qui prétendent prendre la place de Christ comme pontifes, chefs ou  rois de ce royaume) tous les passages des prophètes qui décrivent la gloire millénaire du Christ. « Séduisant les autres et étant séduits » eux-mêmes par leurs fausses théories, développées lentement pendant des siècles par une ambition coupable des grandeurs, les papes ont arrangé les uns après les autres les titres de tous ceux qui sont associés dans cette hiérarchie, leurs vêtements splendides, leurs imposantes cérémonies, leurs grandes cathédrales avec des services solennels inspirant la crainte, cela sur une échelle qui correspondait autant qu'il était possible avec leurs prétentions — entourages splendides, vêtements et cérémonies, assortis dans la mesure du possible avec les gloires et la grandeur décrites par les prophètes.

            Nous lisons par exemple dans le Psaume 2 : 10-12 : « O rois de la terre !... baisez le Fils, de peur qu'il ne s'irrite et que vous ne périssiez dans votre voie ; car bientôt s'embrasera sa colère. » II n'est pas commandé ici de baiser littéralement, mais de se rendre volontairement à notre Seigneur, par une soumission joyeuse. Cela s'applique à l'heure présente, à notre époque préparatoire du grand et véritable règne millénaire du vrai Christ, où les rois et les grands de la terre, au point de vue politique, social, financier et ecclésiastique, seront jugés d'après leur bonne ou mauvaise volonté à s'incliner devant les justes règlements qui doivent entrer en œuvre maintenant. Ceux qui résistent à la justice, résistent au sceptre de ce Roi de gloire, et tous ceux-là seront renversés dans le grand temps de détresse qui introduira le règne millénaire du nouveau Roi. Tous ceux qui ne voudront pas de lui pour régner sur eux seront détruits (Luc 19 : 27). « Ses ennemis mordront la poussière », seront vaincus.

            En appliquant à tort cette prophétie à son imitation  du royaume, le chef représentant de l'Antichrist, le pape, a, dans les glorieux jours de sa prospérité, amené les rois et les empereurs à s'incliner devant lui comme devant Christ et à baiser son gros orteil, appliquant cela à l'accomplissement de cette prophétie.

            De semblables prétentions sont généralement considérées à la légère par ceux qui étudient les prophéties et par les écrivains, alors qu'ils recherchent et notent avec soin les immoralités ; en cela ils errent grandement, parce que les crimes ont été assez abondants  dans tous les âges, pour que de telles descriptions prophétiques spéciales, comme celles qui ont été données de l'Antichrist soient nécessaires. Quand bien même il serait prouvé que ceux qui se rattachaient au grand système papal ont été de vrais modèles de moralité, ce système ne serait pas moins identique au caractère indiqué dans les Écritures comme étant celui du grand Antichrist : le contrefacteur qui s'est arrogé les titres, les privilèges, les pouvoirs et la révérence appartenant à l'Oint de l'Éternel. Comme contrefacteur, il a aussi mal représenté le plan de Dieu quant à la sélection d'un  « petit troupeau » ou Église, dans le temps présent, et il a entièrement mis de côté la réelle espérance de  l'Église et les provisions du Seigneur pour les bénédictions du monde durant le règne millénaire de Christ — qu'il présente comme accompli par son propre règne.

            Il est presque impossible d'évaluer les mauvais effets d'une telle altération et défiguration du plan de Dieu. Ils ont été la source directe d'où jaillirent toutes les doctrines corrompues qui furent introduites les  unes après les autres pour aider aux prétentions et ajouter à la dignité de l'Antichrist. Bien que la Réformation ait introduit, il y a trois siècles, une ère d'étude de la Bible et de liberté de pensée et qu'elle ait conduit au rejet de beaucoup de maux et d'erreurs, la contrefaçon avait été élaborée et perfectionnée à un tel degré dans toutes ses parties et dans ses institutions, elle avait si pleinement trompé le monde entier que, même après que la Papauté eut été reconnue par Luther et beaucoup d'autres comme le résultat inévitable de la grande apostasie — l'Antichrist de la prophétie —, tandis qu'ils le dénonçaient comme système, ils tenaient fermement à la fausse théorie qui conduisit aux erreurs particulières, soit de doctrine soit de pratique, de la  Papauté. Jusqu'à nos jours, la grande majorité des protestants acceptent la théorie de l'Antichrist : que le royaume de Christ a été établi. Quelques-uns se sont efforcés de faire comme la Papauté, d'organiser leur église avec une personne à leur tête, tandis que d'autres remplacent la tête par un concile ou un synode ; mais tous sont sous l'illusion imposée par la fausse et trompeuse interprétation des doctrines des Écritures lancée par l'Antichrist que le règne du royaume de Christ a lieu maintenant et non pas dans un temps à venir ; et niant l'âge à venir, comme le fait l'Antichrist, ils sont indifférents, comme ce système l'a été, au plein développement de la sainteté parmi les croyants et sont plutôt zélés pour accomplir maintenant le travail qui doit se faire dans l'âge prochain, la conversion du monde ; ce faisant, ils dénaturent souvent volontairement le plan de Dieu et sa Parole. Ils inventent des théories pour effrayer le monde et le pousser à faire profession de piété ; et volontairement aussi ils ont retours à des méthodes mondaines et contestables qui s'ajoutent à leurs moyens d'attraction pour rendre le plus séduisants possible leurs divers systèmes aux inconvertis ; et, comme l'Antichrist, ils sont soucieux  d'avoir ces inconvertis et de les enregistrer dans leurs  rangs pour en augmenter le nombre, et cela par orgueil afin d'en faire parade.

            Ceux-là trouvent difficile de voir que la Papauté est l'Antichrist. Comment le pourraient-ils, tant que leur foi n'est pas libérée du poison et que leur raison est toujours fortement aveuglée par l'essence même des erreurs de l'Antichrist. La magnificence, la grandeur  et la nécessité du royaume millénaire de Christ et de son œuvre de bénir toutes les familles de la terre, doivent être vues avant que l'énormité de la contrefaçon de l'Antichrist puisse être reconnue, ou avant que le  dégât qu'il a causé à la vérité et que son influence de souillure et de désolation dans l'église nominale, ou temple de Dieu, puissent être justement estimés.

            Il n'y a pas lieu d'être surpris de la perfection de cette contrefaçon, lorsque nous réfléchissons qu'elle est l’œuvre de Satan et qu'elle a été copiée sur les types et les illustrations de la gloire à venir présentés dans les Écritures. Lorsque le grand adversaire vit que le temps pour la sélection de l'Église était venu et que les vérités implantées par notre Seigneur et par les apôtres gagnaient rapidement du terrain sur les religions païennes, cherchant les humbles partout où il y en avait, il essaya de détruire la pureté de l'Église et de conduire dans de fausses voies ce qu'il ne pouvait plus arrêter. Ainsi, le triomphe de l'Antichrist, aussi bien que sa puissance actuelle, a été réellement un succès de Satan. Mais nous admirons ici la sagesse de Dieu ; car, tandis que le succès de l'Antichrist, ainsi que son pouvoir présent, semblait le présage de la défaite du plan de Dieu, il coopérait réellement, bien qu'à son insu, à en assurer le succès ; parce que les vrais consacrés n'auraient pu être en aucune autre façon si complètement éprouvés, ni leur fidélité à la Parole de Dieu si pleinement mise à l'épreuve que par la permission de cette grande contrefaçon.

L'ÉGLISE DE DIEU

LA SACRIFICATURE ROYALE

LE VRAI TYPE 

Aaron,

et ses successeurs — le Souverain Sacrificateur ou grand prêtre, chef, représentant et porte-parole.

LA RÉALITÉ

Pendant le millénium

Christ-Jésus,

notre Seigneur, Chef et représentant ; le Souverain Sacrificateur de notre profession ou ordre.

LA CONTREFAÇON

Les Papes,

chacun à son tour, souverain pontife de la hiérarchie Papale ; son seigneur, chef et porte-parole.

 

Les sous-prêtres recevant leur dignité officielle, leurs droits et privilèges de service par le moyen d'Aaron, dont ils représentaient le corps, lequel typifiait l'Église de Christ. L'Église glorifiée, le corps de Christ, participe à sa gloire, à sa majesté et à sa charge de gouverneur ; la position de chaque membre différera comme une étoile diffère en éclat d'une autre. L'église de Rome se compose d'évêques et de prélats qui participent aux dignités de la hiérarchie, mais chacun selon son grade d'honneur : cardinal, évêque, etc.

SOUS CES HIÉRARCHIES SONT DES ASSISTANTS INFÉRIEURS, SAVOIR :

Les Lévites

qui faisaient le service du tabernacle typique — qui enseignaient, etc., etc. Un ordre inférieur de prêtres qui ne devaient pas entrer ni regarder dans le Saint des saints (lequel servait de type à la nature spirituelle).

La phase terrestre

du royaume de Dieu qui sera l'intermédiaire de l'Église glorifiée pour gouverner et instruire le monde, etc., et sera en communion intime avec l'Église spirituelle en gloire.
Les Prêtres de la papauté qui ne font pas partie et ne sont pas des membres de l'église ou de la hiérarchie, mais sont appelés « frères » et « sœurs ». Parmi eux sont recrutés le corps enseignant, les infirmières, etc. Ils sont en contact direct avec le peuple, aussi bien qu'avec la hiérarchie.

Tout Israël était enseigné et dirigé par la hiérarchie sus-mentionnée. Dans Moïse qui fut un type du Christ complet, ils avaient réuni en un seul, le prophète, le prêtre et le roi, type de l'autorité millénaire du Christ. — Actes 3 : 22.

Le monde sera instruit, conduit, gouverné et aidé par le Royaume de Dieu, ci-dessus mentionné et ses représentants terrestres. Tout pouvoir leur sera donné et les hommes devront leur obéir ; celui qui ne les écoutera pas « sera exterminé ». — Actes 3 : 23. La papauté exige que le monde obéisse et se conforme à ses prescriptions et à ses enseignements comme étant le Royaume de Dieu sur la terre. Le bas clergé est son agent. Pendant qu'elle avait la puissance, elle s'efforçait de faire valoir ses ordonnances et d'exterminer ceux qui ne lui obéissaient pas.

            Le tableau précédent servira à montrer combien la contrefaçon du royaume de Christ à venir, par la Papauté, a été complète et comment elle a été tirée du type sacerdotal Juif.

            Mosheim, expliquant la naissance du système hiérarchique, dans l'Église, montre très clairement cette contrefaçon en disant, au volume I, page 337 : « Tant qu'il resta quelque probabilité que Jérusalem pourrait prochainement à un moment ou l'autre relever la tête de la poussière, les docteurs chrétiens et les anciens ne se donnèrent aucun titre ou distinction. Mais lorsque le sort de cette ville eut été décidé par Adrien (en l'an 135) et que les Juifs ne purent plus garder le plus faible espoir de voir leur ancien gouvernement rétabli, ces mêmes pasteurs et ministres conçurent l'idée de faire croire à leur troupeau qu'ils avaient succédé aux droits de la sacrificature juive. C'est pourquoi les évêques s'ingénièrent à inculquer la notion qu'ils étaient investis d'un caractère ressemblant à celui du Grand Prêtre des Juifs et étaient, par conséquent, revêtus de tous les droits qui avaient été reconnus comme appartenant au Pontife Juif. Les fonctions des prêtres juifs ordinaires furent transmis de la même manière, mais sous une forme plus parfaite, aux anciens de l'Église Chrétienne, et finalement les diacres furent placés sur le même pied que les Lévites ou ministres inférieurs ».

LA TÊTE ET LA BOUCHE DE L'ANTICHRIST 

LES GRANDES CHOSES QU'IL PROFÉRAIT

            Le pape (chaque pape à son tour) est la tête de la fausse église, qui est son corps, de même que Christ Jésus est la tête de la véritable Église, qui est son corps. Puisque la tête est le représentant du corps et que sa bouche parle pour le corps, nous trouvons, ainsi que nous devions nous y attendre, ce trait de l'Antichrist exprimé dans les Écritures d'une façon marquante. Dans Daniel 7 : 8, 11, 25 et dans Apocalypse 13 : 5, 6, la bouche de l'Antichrist nous est montrée d'une façon particulière comme une de ses principales caractéristiques. Daniel dit que cette corne « avait des yeux comme des yeux d'homme », symbole de l'intelligence et d'une politique clairvoyante. Cette « corne » devait être différente de tous les autres pouvoirs ; elle devait être plus sage, plus habile que les autres empires qui essayèrent de gouverner le monde ; mais sa puissance résidait plutôt dans sa bouche (ses expressions), guidée par ses yeux (sa connaissance), que dans sa force physique. Il n'est personne d'initié avec l'histoire de la Papauté qui puisse nier que les figures employées pour illustrer son pouvoir et ses méthodes ne soient remarquablement justes.

            « Et il lui fut donné une bouche qui proférait de grandes choses... Elle ouvrit sa bouche en blasphèmes contre Dieu, pour blasphémer son nom et son habitation, et ceux qui habitent dans le ciel. » « Et il proférera des paroles contre le Très-Haut. » – Apocalypse 13 : 5, 6 ; Daniel 7 : 8, 25, D.

            Il ne faut pas oublier que ces expressions sont figuratives et descriptives du caractère et des prétentions d'une « bête » symbolique (gouvernement) et d’une  « corne » (pouvoir) qui sort de l'ancienne bête ou empire Romain. A certains égards la Papauté fut un nouveau gouvernement (« bête ») distinct de l'ancien empire romain, et à d'autres égards, elle fut une corne ou  puissance parmi d'autres sorties de cet empire, et qui, pour un temps, exerça une autorité supérieure sur les autres cornes ou pouvoirs. C'est pour la désigner plus exactement et pour la localiser qu'elle est présentée en symbole sous ces deux apparences.

            Les grandes paroles orgueilleuses, ou blasphématoires, de l'Antichrist couvrent la période tout entière de sa longue carrière. L'expression  « blasphème » est habituellement employée de nos jours dans le sens le plus commun et est appliquée seulement aux formes les plus vulgaires de malédiction et de profanation. Mais le mot « blasphème » dans sa vraie signification s’applique à toute indignité vis-à-vis de Dieu. Bouvier le définit ainsi : « Blasphémer », c'est attribuer à Dieu ce qui est contraire à sa nature, ce qui ne lui appartient pas,  et nier ce qui lui appartient ».  — Voyez le dictionnaire de Webster aux mots blasphème et blasphématoire. (*) [Larousse. — Parole ou discours impie qui outrage la divinité, la religion.] C'est là le sens dans lequel le mot blasphème est employé dans les Écritures, comme nous le montre la manière dont notre Seigneur et les pharisiens employaient ce mot. Les Juifs répondirent : « Ce n’est pas pour une bonne œuvre que nous te lapidons, mais c’est  pour un blasphème, et parce qu'étant un homme tu te fais Dieu Jésus leur répondit : Dites-vous, tu blasphèmes, à moi que le Père a sanctifié et qu'il a envoyé dans le monde, parce que j'ai dit : Je suis le Fils de Dieu ? » — Jean 10 : 33, 36 ; voy. aussi Marc 14 : 61-64.

            Ayant ainsi devant nous la définition convenable du mot « blasphème », il devient évident, même pour les plus simples, que les paroles orgueilleuses et arrogantes et les prétentions vantardes de la Papauté ont toutes été des blasphèmes. L'établissement d'une contrefaçon du royaume de Dieu fut une diffamation contre le gouvernement de Dieu, un grossier blasphème et une représentation mensongère de son caractère, de son plan et de sa Parole. Le caractère de Dieu, c'est-à-dire son  « nom », fut blasphémé par les milliers d'édits monstrueux, de bulles et de décrets donnés en son nom, par la longue lignée de ceux qui, en tant que vice-gérants (vicaires), ont prétendu représenter son Fils ; le tabernacle de Dieu, la véritable Église, fut blasphémé par le faux système qui prétendit prendre sa place, disant que ses fidèles étaient le vrai et seul tabernacle ou Église de Dieu. Mais nous devons laisser l'histoire nous parler de ces grandes paroles orgueilleuses, de ces présomptions blasphématoires que les différents papes ont émises et approuvées comme chefs de l'Antichrist.

            Dans un travail intitulé : « Le Pape, Vicaire de Christ, Chef de l'Église », par un célèbre catholique romain, Mgr Capel, se trouve une liste ne comprenant pas moins de soixante-deux titres blasphématoires appliqués au pape ; et, comme on peut le remarquer, ce ne sont pas des titres morts du passé, vu qu'ils ont été fixés par un de leurs plus grands écrivains, vivant encore.

            Nous citons de cette liste les vingt-sept titres suivants :

« Le plus Divin de tous les Chefs.

Saint Père des Pères.

Pontife Suprême au-dessus de tous les Prélats.

Administrateur de la Religion Chrétienne.

Souverain Pasteur, —  le Pasteur des pasteurs.

Christ par Onction.

Abraham par Patriarcat.

Melchisédec selon l'Ordre.

Moïse en Autorité.

Samuel dans l'Office de Juge. 

Souverain Sacrificateur, Suprême Évêque. 

Prince des Évêques,

Héritier des Apôtres, — Pierre en Puissance. 

Porteur des Clefs du Royaume des Cieux. 

Ayant la charge de Pontife avec Pleins Pouvoirs.

Vicaire de Christ. 

Souverain-Sacrificateur.

Tête de toutes les Saintes Églises.

Chef de l'Église Universelle.

Souverain Pontife, qui est l'Évêque des évêques.

Gouverneur de la Maison du Seigneur.

Seigneur Apostolique et Père des pères.

Principal Pasteur et Docteur.

Médecin des Âmes.

Rocher contre lequel les portes orgueilleuses de l'enfer ne prévalent pas. 

Pape Infaillible.

Chef de tous les Saints Prêtres de Dieu. »

            L'auteur ajoute à la longue liste des titres, dont  ceux ci-dessus ne sont que des exemples, les citations suivantes d'une lettre que saint Bernard, Abbé de Clairvaux, écrivait au pape Eugène III, en l'an 1150 :

            « Qui es-tu ? — Le Grand Prêtre, le Suprême Évêque. Tu es le prince des Évêques, l'Héritier des Apôtres. Tu es Abel en primauté, Noé en domination, Abraham par rang patriarcal, Melchisédec selon l'ordre,  Aaron en dignité, Moïse en autorité ; Samuel dans l'office de juge ; Pierre en puissance ; et CHRIST EN ONCTION. Tu es celui à qui ont été données les clefs du royaume des cieux ; à qui ont été confiées les brebis. Il y a en vérité d'autres portiers du ciel et d'autres bergers des troupeaux, mais tu es le plus glorieux, comme ce que tu as de différentes façons hérité de ces deux noms avant tous les autres... La puissance des autres a des limites bien établies ; la tienne s'étend même sur ceux qui ont reçu autorité sur les autres. Ne peux-tu pas, lorsqu'une juste raison se présente,  fermer les cieux à un évêque, le déposer de sa charge épiscopale et le livrer à Satan ? Ainsi, ton privilège est immuable, aussi bien pour les clefs qui t'ont été remises que pour les brebis confiées à tes soins.

            Tous ces titres flatteurs et blasphématoires furent appliqués aux pontifes Romains et reçus par eux avec complaisance et une satisfaction marquée, comme leur appartenant légitimement.

            Nous avons du pape Boniface VIII le décret suivant qui existe encore dans la loi commune : « Nous déclarons, disons, jugeons et prononçons qu'il est nécessaire au salut, pour toute créature humaine, d'être assujettie au pontife romain ». Le pape Grégoire VII qui, dans l'année 1063, ordonna que le pape serait appelé le « père des pères », tire ce qui suit de Genèse 1 : 16 pour appuyer ses prétentions papales : « Dieu fit deux grandes luminaires dans l'étendue du ciel ; le  plus grand pour dominer sur le jour, le moindre pour dominer sur la nuit ; grands tous deux, mais l'un est le plus grand. Dans le firmament des cieux qui est l'Église universelle, Dieu fit deux grands luminaires,  c’est-à-dire qu'il institua deux dignités, qui sont l'autorité pontificale et le pouvoir royal ; mais c'est celui qui préside sur le jour, le spirituel, qui est le plus grand ; celui qui préside sur les choses charnelles est  le moindre ; car comme le soleil diffère de la lune, ainsi les papes : diffèrent des rois. » D'autres papes ont également adopté cette interprétation qui n'a fait que renforcer l'idée de la suprématie papale.

            Saint Antoine, archevêque de Florence, après avoir cité le Psaume 8 : 4-8 :       

            « Tu l'as fait un peu moindre que les anges », etc., et l'avoir appliqué à Christ, le transfère au pape par les paroles suivantes : « Parce qu'il nous a quittés corporellement, il a laissé son vicaire (substitut) sur la terre... le pape. Car le pape, d'après Hostiensis, est plus grand qu'un homme et moindre qu'un ange, étant mortel ; cependant il est plus grand en autorité et en puissance. Car un ange ne peut consacrer le corps et le sang de Christ, ni absoudre ou lier, pouvoir que les papes possèdent au plus haut degré. Un ange ne peut pas non plus ordonner ou accorder des indulgences. Il est couronné de gloire et d'honneur ; la gloire des éloges, parce que non seulement il est appelé saint, mais très-saint. Qui pourrait hésiter  à l'appeler saint, lui que l'expression suprême d'une telle haute dignité a exalté ? Il est couronné de l'honneur de la vénération, au point que le fidèle peut baiser ses pieds. Nulle plus grande vénération ne peut exister. « Prosternez-vous devant son marchepied ! » (Psaume 99 : 5). Il est couronné de la magnificence de l'autorité, parce qu'il peut juger tout le monde et ne peut être jugé par personne ; à moins qu'il ne soit prouvé qu'il ait dévié de la foi [de l'Antichrist, naturellement]. En conséquence, il est couronné d'une triple couronne d'or, et est établi sur toute l'œuvre de ses mains pour disposer de tous ses inférieurs. Il ouvre les cieux, envoie les coupables en enfer, confirme les empires et régit le clergé tout entier ».

            Le Concile de Latran, dans sa première session, appela le pape le « Prince de l'Univers » ; dans sa seconde session, « Prêtre et Roi qui doit être adoré par tout le peuple et qui est vraiment semblable à Dieu » ; et dans sa cinquième session, il attribue à Léon X les prophéties, qui se rapportent au glorieux règne de Christ, en ces termes : « Ne pleure point, fille de Sion, car voici le Lion de la tribu de Juda, la racine de David : voici, Dieu t'a suscité un Sauveur. »

            Du Dictionnaire Ecclésiastique de Ferrari, ouvrage classique de l'autorité catholique romaine, nous citons le rapport condensé suivant sur le pouvoir papal, sous le mot papa (article 2) :

            « Le pape est d'une telle dignité et grandeur, qu'il n'est pas simplement un homme, mais pour ainsi dire comme Dieu et le vicaire [représentant] de Dieu... Ainsi le pape  est couronné de la triple couronne comme roi des cieux,  de la terre, et de l'enfer. Non, que disons-nous, l'excellence et la puissance du pape s'étendent non seulement  aux choses célestes, terrestres et infernales, mais il est au-dessus des anges et est leur supérieur ; de sorte que s’il était possible que les anges se détournassent de la foi, ou entretinssent des sentiments qui lui fussent opposés, ils pourraient être jugés et excommuniés par le pape... Il a une telle dignité et un tel pouvoir qu'il occupe un seul et même tribunal avec Christ, et que tout ce qu’il fait semble sortir de la bouche de Dieu Le pape est en quelque sorte Dieu sur la terre, le seul prince des fidèles de Christ, le plus grand roi de tous les rois, possédant la plénitude du pouvoir, auquel le gouvernement du royaume terrestre et céleste a été confié ». Il ajoute plus loin : « Le pape a si grande puissance et autorité qu'il peut modifier, révéler ou interpréter la loi divine ». « Le pape peut parfois contrecarrer la loi divine, en la limitait et en l’expliquant, etc. » 

            Ainsi, non seulement l'Antichrist s'efforça d'établir l'église en puissance avant le temps du Seigneur, mais il fut assez audacieux pour essayer de « contrecarrer » et « modifier » les lois divines afin de faciliter ses propres plans. Il a de cette manière accompli la prophétie qui, plus d'un millier d'années auparavant, avait déclaré : « II pensera changer les temps et la loi ». — Daniel 7 : 25.

            Dans une bulle ou édit, Sixte V déclare :

            « L'autorité donnée à saint Pierre et à ses successeurs par l'immense puissance de l'éternel Roi, est au-dessus de tous les pouvoirs des rois et princes terrestres ; elle prononce des décisions définitives sur eux tous. Et si quelqu'un d'entre eux résiste aux ordres de Dieu, cette autorité se venge sur eux plus sévèrement, en les faisant tomber de leurs trônes, quelque puissants qu'ils puissent être et en les jetant dans les parties les plus basses de la terre, comme ministres de l'ambitieux Lucifer. »

            Une bulle du pape Pie V, ayant pour titre : « La damnation et l'excommunication d'Élisabeth, reine d'Angleterre et de ses adhérents — avec addition d'autres châtiments », dit ce qui suit :

            « Celui qui règne en haut, à qui tout pouvoir a été donné dans les cieux et sur la terre, a institué une sainte église catholique, apostolique (hors de laquelle il n'y a pas de salut) et il a donné plénitude de pouvoir pour la  gouverner à un seul, savoir Pierre, le prince des apôtres et au successeur de Pierre, l'évêque de Rome. Lui seul est fait prince sur tout le peuple et sur tous les royaumes pour arracher, détruire, disperser, consumer, planter et bâtir. »

            Saint Bernard affirme que « personne, si ce n'est Dieu, n'est semblable au pape, ni dans les cieux, ni sur la terre ».

            Le pape Nicolas I dit de l'empereur Constantin qu’il  conféra l'appellation de Dieu au pape, lequel étant Dieu,  ne peut en conséquence être Jugé par l'homme.

            Le pape Innocent III dit : « Le pape occupe la place du vrai Dieu » ; et la loi-canon, dans le commentaire, appelle le pape : « notre Seigneur Dieu ».

            Innocent et Jacobatius rapportent que « le pape peut faire à peu près tout ce que Dieu peut faire », tandis que Décius rejette le mot  « à peu près » comme n'étant pas nécessaire. Jacobatius et Durand assurent « qu'on  n'ose pas lui dire, pas plus qu'à Dieu : Éternel, que fais-tu ? Et Antonin écrit :

            « C'est à lui [au pape] qu'il appartient d'ordonner les choses qui favorisent le bien public et d'éloigner celles qui l'entravent, tels que les vices et les abus qui éloignent l'homme de Dieu... Et cela d'après Jérémie 1 : 10 [Ici encore une prophétie qui appartient au règne millénaire de Christ est attribuée à l'Antichrist]. « Regarde, je t'ai  établi ce jour-ci sur les nations et sur les royaumes pour arracher et pour démolir, pour détruire et pour renverser » quant à ce qui regarde les vices, « pour bâtir et pour planter » en ce qui concerne les vertus. Pour ce qui est du pouvoir des papes sur ceux qui sont en enfer, désignés par les poissons de la mer (Psaume 8), parce que de la même manière que les poissons sont continuellement agités par les vagues de la mer, ainsi ceux qui sont dans le purgatoire sont continuellement maintenus en mouvement par les afflictions du châtiment. Dieu a aussi assujetti au pape les poissons de la mer, c'est-à-dire ceux qui  sont dans le purgatoire pour les soulager par des  indulgences.

            « Les païens sont assujettis au pape qui préside dans le monde à la place de Christ, Christ ayant plein pouvoir sur toute créature. Le pape est le vicaire de Christ et personne ne peut légitimement se soustraire à son obéissance, comme personne ne peut se soustraire légitimement à l'obéissance à Dieu... Le pape peut punir les païens et  les nations barbares... Si les païens ne peuvent être punis par le châtiment spirituel de l'excommunication et d'autres semblables, ils peuvent toutefois être punis par l'Église au moyen de châtiments pécuniaires, et de peines corporelles par les princes... L'Église peut punir indirectement les Juifs par des châtiments spirituels, en excommuniant les princes chrétiens auxquels tous les Juifs sont assujettis, s'ils négligent de les châtier par des peines corporelles, lorsqu'ils font quelque chose contre les chrétiens...  Si l'on désire la conversion de certains, on peut les y contraindre par la terreur et les coups, non en vérité pour qu'ils reçoivent la foi, mais parce qu'ils ne doivent opposer aucun obstacle à la foi par une obstination volontaire ; car le jugement de Dieu devrait être imité pour la conversion des incrédules. »

            Ceci illustre très bien comment les erreurs de doctrine produisent l'injustice. Les hommes peuvent être rapidement amenés à toutes les formes de cruauté et d'oppression, si, premièrement, ils peuvent se convaincre eux-mêmes que dans l'exercice de telles dépravations ils sont le plus semblables à Dieu — des imitateurs de Dieu. Il est vraiment étonnant qu'avec toutes les fausses idées et les terribles doctrines concernant le plan de Dieu envers les hommes, par lesquelles Satan les a aveuglés et trompés au moyen de la source papale de l'erreur, leur enseignant une ligne de conduite en rapport avec leur nature déchue, les hommes soient demeurés si doux et si modérés. Le même auteur continue ainsi :

            « Le pouvoir du pape s'exerce sur les hérétiques et les schismatiques, désignés aussi par les bœufs, parce qu'ils résistent à la vérité avec les cornes de l'orgueil. Dieu les a aussi assujettis sous les pieds du pape pour être punis au quadruple, c'est-à-dire par l'excommunication, la déposition, la privation de leurs biens temporels et la persécution militaire. Mais ils ne doivent être pris pour hérétiques que lorsqu'ils refusent de renoncer à leurs doctrines pestilentielles et s'entêtent réellement à les défendre... Le pape peut choisir ou élire l'empereur. L'empereur est le ministre [serviteur] du pape, dans ce sens qu'il est le ministre de Dieu, dont la place est remplie par le pape ; car Dieu a député l'empereur comme ministre du pape... Je suppose qu'on peut dire en vérité que le pape, le vicaire de Christ, a une juridiction universelle des choses spirituelles et temporelles dans le monde entier, à la place du Dieu vivant. »

            Les proclamations suivantes des papes, glanées dans les  « Actes et Monuments » de Fox, par H. G. Guinness, un écrivain anglais connu, méritent une place marquante, et nous pouvons sympathiser de cœur avec ses commentaires sur le système dont la bouche prononce de telles choses, lorsqu'il dit : « Si celui qui s'élève sera abaissé, quelle dégradation pourra être proportionnée à une exaltation de soi-même telle que celle-ci ? »

            « C'est pourquoi, vu qu'un tel pouvoir est donné à Pierre, et à moi par Pierre, comme son successeur, qui est celui dans le monde entier qui ne doive pas être assujetti à mes décrets, qui ont tel pouvoir dans le ciel, dans l'enfer et sur la terre, sur les vivants et les morts ?... La plénitude de mon pouvoir est si grande par la juridiction de la clef qui m'a été donnée que tandis que tous me sont assujettis, oui, et les empereurs eux-mêmes devraient me soumettre leurs arrêts, moi seul ne suis assujetti  aucune créature, ni à moi-même...; tous doivent me suivre, m'obéir ; personne ne doit me juger ou m'accuser d'aucun crime ; et nul ne peut me déposer, si ce n'est moi-même. Personne ne peut m'excommunier, lors même que j'aurais des rapports avec les excommuniés ; car aucun canon ne me lie. Personne n'oserait me mentir, car si quelqu'un me mentait, il ne serait qu'un hérétique et un excommunié. Nous voyons donc ainsi que la grandeur de la sacriflcature commença en Melchisédec, fut solennisée en Aaron, perfectionnée en Christ, représentée en Pierre, exaltée dans la juridiction universelle et manifestée dans le pape. Ainsi, par la prééminence de ma sacrificature, toutes choses m'étant assujetties, ce qui fut dit de Christ : Tu as assujetti toutes choses sous ses pieds, semble se trouver bien vérifié en moi.

            « Et de même, il faut admettre que l'évêque de cette Église est toujours bon et saint. S'il tombe dans l'homicide ou dans l'adultère, il peut pécher, mais il ne peut cependant être accusé mais plutôt excusé par les meurtres de Samson et les vols des Hébreux, etc. Toute la terre est mon diocèse et je suis l'Ordinaire (juge - trad.) de tous les hommes, ayant l'autorité du Roi de tous les rois sur ses sujets. Je suis tout en tous et au-dessus de tous à ce point, que Dieu lui-même et moi, le vicaire de Dieu, avons un seul consistoire ; je suis capable de faire à peu près  tout ce que Dieu peut faire. Dans tout ce que je désire, ma volonté tient lieu de raison, parce que je puis par la loi dispenser au-dessus de la loi et faire sortir la justice de l'injustice, en corrigeant les lois et en les changeant. Si donc on dit que les choses que je fais viennent non de l'homme, mais de Dieu, que pouvez-vous faire de moi,  sinon me faire Dieu ?… Il est en mon pouvoir de changer les temps et les saisons, d'altérer ou d'abroger les  lois et de dispenser de toutes choses, même les préceptes de Christ ; car si Christ ordonne à Pierre de remettre son épée dans le fourreau, et s'il engage ses disciples à n'user d'aucune force extérieure pour se venger eux-mêmes, n'écris-je pas, moi, pape Nicolas, aux évêques de France pour les exhorter à tirer leurs épées matérielles ?... Si Christ lui-même a été présent aux noces de Cana en Galilée, ne défends-je pas, moi, pape Martin, au clergé spirituel d'assister aux repas de mariage et aussi de se marier ? De plus, lorsque Christ ordonne de prêter sans espoir de gain, ne puis-je pas, moi, pape Martin, en donner la dispense ? Que dirais-je des meurtres, lorsque je fais passer comme n'étant pas un meurtre ou homicide, la mise à mort des excommuniés ? De même contre la loi naturelle, contre les apôtres et aussi contre le canon des apôtres, je peux faire et je fais des dispenses, car, bien que dans leur canon, ils commandent de déposer un prêtre pour fornication, j'altère la rigueur de cette constitution, par l'autorité de Sylvestre, considérant que les esprits et aussi les corps des hommes sont plus faibles qu'ils étaient alors... Si vous désirez écouter brièvement tous les cas qui appartiennent en propre à ma dispensation papale, il y a cent cinquante points pour lesquels aucun homme ne peut s'entremettre, si ce n'est moi seul. Je veux les réciter.  (Ici en suit la liste).

            « Après avoir ainsi suffisamment démontré combien mon pouvoir est grand sur la terre, au ciel et dans le purgatoire, je parlerai maintenant un peu de mes richesses et de mes grandes possessions, afin que chacun puisse voir mon opulence et l'abondance que j'ai de toutes choses — rentes, dîmes et tributs, mes soieries, mes mitres de pourpre, couronnes, or, argent, perles et diamants, terres  et seigneuries. Premièrement, la ville impériale de Rome m'appartient ; le palais de Latran ; le royaume de Sicile est à moi en propre ; l'Apulie et Capoue sont à moi.  De même les royaumes d'Angleterre et d'Irlande ne me sont-ils pas ou ne devraient-ils pas m'être tributaires ? Joignez à cela, à côté d'autres contrées et provinces en Orient et en Occident, ces provinces du nord au midi qui se nomment [Ici suit une longue liste de noms]. Que dirai-je de mes revenus journaliers, de mes prémices, annates, palliums, indulgences, bulles, confessions, faveurs et rescrits, testaments, dispenses, privilèges, élections, prébendes, maisons religieuses et tant d'autres choses qui ne me rapportent pas mal d'argent ?... par quoi on peut se faire une petite idée du gain qui rentre dans mes coffres... Mais que dois-je dire de l'Allemagne, puisque le monde entier est mon diocèse, comme le dit mon droit canon que tous les hommes doivent croire. C'est pourquoi je conclus comme j'ai débuté et je commande, déclare et prononce qu'il est nécessaire pour le salut de tous les hommes de m'être assujetti. »

            Beaucoup de personnes, de nos jours, semblent croire que ces jactances de la papauté appartiennent seulement au passé lointain, et qu'un grand changement s'est produit dans ce système ces derniers temps. Mais un peu de réflexion et d'observation démontrera que ces sentiments de la papauté sont toujours les mêmes. Nous devrions aussi nous rappeler que la prétention constante de la papauté est que ses doctrines sont immuables ; que les décrets de ses papes et de ses conciles sont infaillibles ; et que ces décrets, qui respirent le blasphème contre Dieu et la persécution contre les saints, sont toujours tenus comme sacrés par l'église catholique romaine d'aujourd'hui. Le seul changement survenu dans la papauté est la perte de pouvoir, amenée par le réveil de la Réformation. La volonté y  est toujours, mais le pouvoir d'exécution est restreint par l'accroissement de connaissance et de liberté, pour lequel la Bible a été le principal facteur. L'Antichrist  est  « rendu graduellement impuissant » par le vrai Christ, par l'esprit de sa bouche, sa Parole. Bientôt la lumière brillante de la présence d'Emmanuel détruira entièrement la vaine gloire de la contrefaçon, et libérera complètement le monde des chaînes de ses prétentions illusoires et de ses erreurs.

            Pour illustrer les présomptions des derniers temps, notez le fait que le dernier pape, en montant sur le trône prit le titre de Léon XIII, et peu après, y ajouta lui-même Léo de tribus Juda, c'est-à-dire « Le Lion de la tribu de Juda », un des titres du vrai Chef. Par ces prétentions présomptueuses, il n'est sûrement pas en retard sur ceux qui occupèrent le même office durant les sombres siècles passés.

            Ce qui suit, appelé L'Adoration, est encore une partie de la cérémonie en rapport avec l'installation d'un nouveau pape. Celui-ci, habillé de blanc, paré de nombreux diamants brillants, et revêtu de souliers rouges, garnis de grandes croix d'or en guise de boucles, est conduit à l'autel où il s'agenouille. Ensuite « le pape se lève et, ayant revêtu sa mitre, il est levé par les cardinaux et placé par eux sur le trône-autel pour s'y asseoir. Un des évêques s'agenouille, et le chant du Te deum (ô Dieu, nous te louons) commence. Pendant ce temps les cardinaux baisent les pieds, les mains et le visage du pape ». Une monnaie, représentant cette cérémonie et frappée à l'hôtel des monnaies du pape, porte les mots : « Ils adorent celui qu'ils ont créé » .

            Le cardinal Manning, le représentant en chef de la Papauté en Angleterre, attire l'attention du public sur la clause suivante de la foi catholique, tout en la confirmant :

            « Nous déclarons, affirmons, définissons et prononçons qu'il est nécessaire au salut de toute créature humaine qu'elle soit assujettie au Pontife Romain. » Dans un discours qui a été publié, il fait dire ce qui suit au pape : « Je prétends être le Juge Suprême et le Directeur des consciences des hommes ; du paysan qui laboure la terre au prince qui est assis sur le trône ; de la famille qui vit retirée au législateur qui donne des lois au royaume. Je suis le seul, dernier et Suprême Juge de ce qui est juste et injuste. »

            Nous ne devrions pas oublier, en observant ces exemples modernes « de discours enflés de vanité » de la Papauté, le remarquable décret du Concile Œcuménique, tenu à Rome en 1870, qui proclama l'infaillibilité du pape. Il est vrai que de tout temps les papes présomptueux avaient prétendu à l'infaillibilité et que des évêques et des princes, désireux de flatter leur orgueil, les avaient virtuellement appelés ainsi dans cette déclaration : « Tu es un autre dieu sur la terre » ; mais il restait à un concile papal, dans ce XIXme siècle de lumière, de faire connaître au monde, froidement et  délibérément, la grandeur de ce « dieu sur la terre » et de proclamer qu'il est presque aussi parfait que l'autre Dieu dans les cieux ; qu'il ne peut pas plus se tromper que l'autre ; que lorsqu'il parle ex-cathedra, le pape est infaillible — qu'il ne se trompe pas.

            Le vote du concile fut émis le 13 juillet 1870, et le 18, le décret fut formellement promulgué avec cérémonie dans la grande cathédrale de St-Pierre à Rome. On lira avec intérêt la description suivante de cet événement, donnée par le Dr. J. Cummings de Londres. Il dit : « Le pape avait un grand trône, érigé devant les fenêtres de la façade est de St-Pierre ; il s'enveloppa dans un véritable scintillement de pierres précieuses et s'environna de cardinaux, de patriarches et d'évêques en vêtements splendides, pour une représentation théâtrale des plus grandioses. Il avait choisi une heure matinale et les fenêtres à l'orient, afin que le soleil levant pût lancer ses pleins rayons sur sa magnificence et que, par ce fait, ses diamants, ses rubis et ses émeraudes les reflétassent et produisissent une telle réfraction qu'il devait apparaître, non un homme, mais ce que le décret le proclamait, un être ayant toute la gloire de Dieu... Le pape se plaça de bonne heure à la fenêtre à l'orient... mais le soleil refusa... de luire. L'aurore pâle et triste s'assombrit rapidement jusqu'à une très profonde obscurité. Le glorieux éblouissement ne put être produit. Les yeux usés de celui qui se prétendait Dieu ne pouvaient voir assez pour lire à la lumière du jour et il fallut apporter des chandelles. Cette lumière ayant encore plus fatigué ses nerfs visuels, le pape demanda à l'un des cardinaux de faire la lecture. Celui-ci commença à lire au milieu d'une obscurité croissante ; mais à peine avait-il lu quelques lignes que jaillirent du ciel d'un noir d'encre une lueur livide et un craquement étourdissant tels que jamais encore pareille chose n'avait été vue à Rome. Une grande terreur saisit toute l'assistance et le lecteur s'arrêta. Un cardinal sauta tout tremblant de sa chaise en s'écriant : « C'est la voix de Dieu qui parle, les tonnerres du Sinaï ».

            Parmi les prétentions blasphématoires de l'Antichrist, il est plusieurs de ses doctrines qui devraient être rappelées, particulièrement celle de la messe, dont nous parlerons dans un autre volume. Passant sur le culte rendu aux saints et à la vierge Marie, nous voulons indiquer quelques-unes des erreurs encore plus graves.

            L'infaillibilité de l'Église fut l'une des premières et elle prépara la voie aux autres. Proclamée avant que le pape fût reconnu comme tel, elle fut une erreur des plus sérieuses et barra le chemin à la rectification d'erreurs qui furent découvertes dans la suite. Elle plaça les décrets des conciles de l'église au-dessus de toute contradiction ou discussion, soit par la raison, soit par l'Écriture, et fit de l'ignorance, de la faiblesse et des fausses conceptions humaines la mesure ou règle de la foi à la place de la Parole de Dieu, la Bible ; car lorsqu'il fut établi que la voix des conciles de l'église était infaillible, toutes choses durent s'arranger pour s'y conformer ; et chaque concile se sentit lié de ne rendre aucune décision qui fût contraire à celle des conciles précédents ; ceux qui auraient fait autrement se seraient exposés à être répudiés. Ainsi lorsqu'une erreur avait été une fois affirmée, elle ne pouvait plus être niée, ni même abandonnée. La Bible et la raison durent être interprétées et tordues de manière à s'accorder avec les décrets infaillibles d'hommes faillibles. Il n'y a donc rien d'étonnant à ce qu'il ait été nécessaire de requérir de véritables experts en théologie pour  interpréter les Écritures et les faire concorder avec leurs soi-disant décrets Infaillibles.

            Proscription de la Bible. L'histoire de la Papauté  montre clairement que, tout en professant vénérer la Bible comme étant la Parole de Dieu, elle la plaçait à l'arrière-plan et mettait au premier rang ses propres paroles infaillibles. Non seulement cela, mais le pape proscrivit entièrement la Parole de Dieu, comme étant  peu propre à être lue, et dangereuse pour le peuple, afin que sa propre parole infaillible pût avoir une pleine autorité. Il savait très bien que la Bible était dangereuse pour son pouvoir et une dénonciation constante de ses prétentions blasphématoires.

            Dans les jours de la puissance papale, la possession ou la lecture de la Bible par le peuple étaient traitées comme une offense criminelle. L'art de l'imprimerie vers le XVIème siècle et la renaissance générale de l'instruction qui en fut le résultat, assurèrent la résurrection de la Bible hors du sépulcre des langues mortes, où l'Antichrist l'avait si longtemps tenue cachée en en interdisant la traduction sous peine de sévères châtiments. Lorsqu'un réveil de l'esprit d'indépendance commença à la répandre parmi le peuple par les langues vivantes, les Bibles furent souvent brûlées, et longues et terribles furent les malédictions impitoyables qui sortirent du Vatican contre les pécheurs audacieux qui osaient traduire, publier ou lire la Parole de Dieu.

            Lorsque Wiclef publia sa traduction, le pape Grégoire envoya une bulle à l'université d'Oxford, condamnant le traducteur comme « étant tombé dans un genre de crime détestable. » La traduction de Tyndale fut aussi condamnée ; et lorsque Luther publia sa traduction allemande, le pape Léon X lança une bulle contre lui. Mais l'œuvre n'en progressa pas moins avec rapidité ; la Bible devait avoir une résurrection complète et était destinée à déverser sa lumière sur les  hommes de toute nation et de toute langue. L'église de Rome s'en aperçut lentement et résolut pour cela de permettre la traduction des Écritures en langue moderne par des traducteurs catholiques, en y ajoutant des commentaires catholiques. Ce n'était pas cependant pour les donner au peuple, excepté dans le cas où il y avait danger que celui-ci ne reçût des traductions protestantes. La traduction de Reims le déclare.

            Ce qui suit montre le caractère de certaines des Notes de cette traduction de Reims - Douai (1578 — trad.), qui a été remplacée plus tard (1610 — trad.) par  la version de Douai, très ressemblante, mais avec moins de notes remarquables. Sur Matthieu 3, il est dit dans une de ces notes « Les hérétiques peuvent être punis et supprimés ; ils peuvent et doivent être châtiés ou exécutés par l'autorité publique. » Une autre note sur Galates 1 : 8 se lit : « Les catholiques ne devraient  pas épargner leurs propres parents s'ils sont hérétiques. » Sur Hébreux 5 : 7 la note dit  : « Les traducteurs de la Bible protestante devraient être envoyés dans les profondeurs de l'enfer ». Et sur Apocalypse 17 : 6 le  commentaire dit : « Mais le sang des protestants n'est pas appelé le sang des saints, pas plus que celui des voleurs, des meurtriers ou d'autres malfaiteurs répandu par ordre de la justice, et pour le meurtre desquels, aucun gouvernement n'a à répondre. »

            Nous donnons ici quelques-unes des restrictions qui furent imposées lorsqu'il fut reconnu que la lecture de la Bible ne pouvait pas être entièrement empêchée. L'article 4 de l'Index Expurgatoris dit :

            « Si quelqu'un a la témérité de lire ou de posséder la Bible sans autorisation écrite, il ne doit pas recevoir l'absolution avant d'avoir remis cette Bible au préposé. — Les libraires qui auront vendu ou disposé de quelque autre façon de Bibles en langues vulgaires à quelqu'un non pourvu d'une telle permission, perdront la valeur des livres... et seront soumis par l'évêque à tels autres châtiments que celui-ci jugera convenable, d'après la gravité de l'offense. »

            Le concile de Trente dit dans sa session de 1546 :

            « Afin de restreindre les esprits pétulants, le concile décrète que, en matière de foi et de morale et de quoi que ce soit concernant le maintien de la doctrine chrétienne, personne ne devra, se confiant en son propre jugement, oser tordre ou fausser les Écritures sacrées à son propre sens, contrairement à celui qui a été attaché et est encore maintenu par la sainte église-mère, qualifiée pour juger du sens véritable. »

            Ce qui suit est extrait de la bulle de Pie VII au Primat de Pologne, le 29 juin 1816, contre les Sociétés Bibliques :

            « Nous avons été vraiment affligé de cette invention pernicieuse par laquelle les fondements mêmes de la religion sont minés, et vu la grande importance du sujet, en ayant conféré en concile avec nos vénérables frères, les cardinaux de la sainte Église Romaine, nous avons, avec  le plus grand soin et une attention extrême, délibéré sur les mesures propres à être adoptées par notre autorité pontificale afin de remédier autant que possible à cette peste et de l'abolir. Vous avez déjà montré, de votre plein gré, un ardent désir de découvrir et de renverser les machinations impies de ces innovateurs, cependant, nous conformant à notre office, nous vous exhortons de plus en plus que tout ce que vous pouvez accomplir par votre pouvoir, préparer par conseil, ou effectuer par autorité, vous l'exécutiez journellement avec la plus grande ardeur…  La Bible imprimée par les hérétiques doit être mise au rang des autres livres prohibés, conformément aux règles de l'Index. »

            Le même pape, dans l'année 1819, lança une bulle contre ceux qui se servaient des Écritures dans les écoles d'Irlande ; nous en citons ce qui suit :

            « La congrégation du Saint-Office a été informée que des écoles de la Bible, soutenues par les fonds des hétérodoxes, ont été établies dans presque toutes les parties de l'Irlande, par lesquelles les personnes sans expérience des deux sexes ont été infectées du poison fatal de doctrines dépravées... C'est pourquoi tous les efforts possibles doivent être faits pour éloigner la jeunesse de ces écoles funestes... Travaillez de tout votre pouvoir pour éviter à la jeunesse orthodoxe d'être corrompue par eux ; ce qui pourra, je l'espère, être facilement obtenu par l'établissement d'écoles catholiques dans tout votre diocèse. »

            Nous avons ici l'aveu candide du but réel de l'établissement des écoles paroissiales catholiques en Angleterre et en Amérique du Nord, c'est-à-dire la protection du système catholique même. L'Antichrist n'a pas d'autre but en offrant l'instruction au peuple. L'ignorance et la superstition sont les remparts de la papauté, et les siècles de sa puissance, y compris ceux qui sont connus sous le nom d'âge des ténèbres, le prouvent.  L'instruction du clergé ne fut pas négligée, bien que sous certaines restrictions. Mais qu'aucun effort ne fut fait pour l'instruction du peuple, l'ignorance profonde de tous les vieux pays catholiques romains en est une forte preuve. Les écoles et la Bible ont toujours été les ennemis insupportables de l'Antichrist et ne furent tolérées que lorsqu'elles devinrent des nécessités ; — une fausse lumière dut encore être jetée sur ces écoles pour préserver l'existence de l'Antichrist.

            Nous citons ce qui suit d'une bulle de Léon XII, lancée en 1825 au clergé catholique d'Irlande :

            « Ce n'est pas un secret pour vous, vénérables frères, qu'une certaine société, vulgairement appelée la Société Biblique, se répand audacieusement dans le monde entier. Au mépris des traditions des saints pères, et en opposition au décret bien connu du Concile de Trente, cette Société a concentré toutes ses forces et dirige tous ses moyens vers un but : la traduction ou plutôt la perversion de la Bible dans la langue maternelle de toutes les nations. »

            Même le pape Pie IX exprima l'angoisse de son cœur de voir de tous côtés le triomphe de ce grand ennemi de l'Antichrist — la Bible, disant :

            « Maudites soient ces sociétés pleines de ruses et de tromperies, appelées Sociétés Bibliques, qui placent la Bible entre les mains de la jeunesse inexpérimentée. »

            II est vrai qu'en 1886, le Concile Plénier Catholique Romain de Baltimore décréta qu'une Bible approuvée serait permise dans les écoles catholiques des États-Unis. Cela ne signifie toutefois aucun changement dans les sentiments réels de l'Antichrist ; mais c'est  simplement un autre coup de sa politique clairvoyante, par déférence pour l'esprit de liberté régnant dans ce pays et qui déteste de telles restrictions. Ce concile savait très bien que c'était la liberté qui était demandée et non la Bible ; une enquête montre d'ailleurs que  maintenant, plusieurs années après, la Bible ne se trouve pas du tout dans les écoles catholiques de ce  Pays.

            La doctrine de l'immortalité naturelle et inhérente de l'homme (qu'une existence humaine qui a une fois commencé ne peut jamais cesser), fut une autre fertile erreur empruntée aux philosophes grecs. Une fois admise, elle conduisit naturellement à cette conclusion, que s'il faut que l'existence continue à toujours, les expressions de la Bible concernant la destruction finale des pécheurs volontaires, la seconde mort, etc., doivent être expliquées de manière à signifier juste le contraire de ce qu'elles disent, c'est-à-dire une vie éternelle en un état quelconque. Il fut facile après cela de décréter que pour le méchant cette existence serait une vie de souffrance ; et les tourments furent souvent peints sur les murs des églises aussi bien qu'ils étaient dépeints par les paroles de prêtres et de moines zélés. Cette erreur s'imprima d'autant plus facilement chez les nouveaux convertis que les philosophes grecs (alors les maîtres du monde en matière de science, de religion et de philosophie, — dont les idées, comme le montre Josèphe, avaient même commencé à colorer le judaïsme) avaient depuis longtemps soutenu et enseigné un châtiment pour les méchants après la mort. Il faut toutefois dire à leur décharge qu'ils ne sont jamais descendus jusqu'aux horribles blasphèmes contre le caractère de Dieu et son gouvernement, enseigné au monde par l'Antichrist. Il était tout indiqué, après cela, de fixer un lieu pour ce tourment, de l'appeler l'enfer et de chercher les passages de l'Écriture parlant du shéol, du hadès et de la géhenne, qui dépeignent le  salaire réel du péché, la première et la seconde morts,  et de les appliquer adroitement, ainsi que les paraboles de notre Seigneur et les symboles de l'Apocalypse, pour se tromper eux-mêmes sur ce sujet et le monde entier avec eux ; et, chose plus grave, pour diffamer  et  blasphémer le caractère et le plan de Dieu, notre tout sage et miséricordieux Père Céleste.

            Le purgatoire fut introduit pour adoucir ces affreuses doctrines, les rendre plus supportables et en même temps pour donner à l'Antichrist un moyen de mieux tenir le peuple sous sa dépendance. Il prétendit tenir les clefs du ciel et de l'enfer et avoir le pouvoir de remettre les peines du purgatoire : non seulement la peine adamique et les infirmités qui en découlèrent, mais aussi le châtiment pour les péchés volontaires et commis de propos délibéré. On peut facilement concevoir quel levier puissant ce fut sur un peuple ignorant — spécialement lorsque les empereurs et les princes de la terre acceptèrent le trompeur et s'inclinèrent devant lui.

            Les messes pour les morts suivirent ; et pour les avoir, riches et pauvres se firent un devoir de payer libéralement. L'efficacité des messes pour le soulagement des souffrances du purgatoire est reconnue omnipotente, — à tel point que ni même Jéhovah, ni Christ ne peuvent intervenir contre elles. Cela devint une source de grands revenus pour l'Antichrist ; parce que si le mourant était riche, les prêtres ne manquaient pas de lui rappeler qu'avant son départ il devait laisser des legs pour faire dire des messes pour lui-même, de peur que quelqu'un des héritiers de ses richesses ne négligeât  de le faire. En effet, nous trouvons cette même pensée exprimée dans des journaux catholiques romains, où il est recommandé de dépenser moins d'argent en fleurs pour les funérailles et un peu plus en messes pour les morts.

            Les indulgences s'introduisirent quelque temps avant les « croisades ». Nous savons que des indulgences furent offertes comme prime d'encouragement, afin de s'assurer des volontaires pour ces  « croisades » ou « guerres saintes ». Par un édit papal, quiconque voulait  s'engager dans ces guerres saintes recevait non seulement la rémission de ses péchés passés, mais méritait aussi que ses péchés futurs fussent effacés et qu'il fût ainsi garanti contre certaines souffrances du purgatoire. Les catholiques romains nous disent que ces indulgences ne sont pas données comme une licence pour faciliter le péché, mais en récompense du mérite qui rachète ou annule un certain nombre de jours ou d'années d'angoisse dans le purgatoire ; de sorte que si les péchés d'un homme lui avaient valu mille ans de souffrance et si cet homme s'était, en une ou plusieurs fois, assuré des indulgences pour mille ans, soit avec de l'argent, soit par des services rendus à la papauté, ou encore en faisant des pénitences, il s'en irait libre ; et s'il avait à son crédit des indulgences pour neuf cents ans, il n'aurait que cent ans de souffrances à endurer. Et il est probable que si le nombre de ses indulgences dépassait de beaucoup les peines qui lui étaient dues, il serait considéré comme un saint, possédant assez d'influence au ciel pour être prié et adoré. Nous en avons un exemple dans le croisé Louis, roi de France. Il fut canonisé et est maintenant prié et adoré sous le nom de saint Louis.

            S'il y a en effet une différence entre cette manière de comprendre les indulgences et celle qui estime qu'elles sont une licence pour commettre le péché, elle est cependant bien petite ; car la papauté fixa pour les différents péchés ordinaires un certain temps de souffrances. Non seulement les péchés passés pouvaient ainsi être anéantis et effacés, mais les personnes qui avaient des raisons de penser qu'elles pourraient commettre certains péchés dans l'avenir, pouvaient ainsi pourvoir par avance à leur annulation en faisant des œuvres méritoires. En outre, il y a certaines de ces indulgences appelées  « plénières » [complètes, entières] qui sont certainement comprises comme couvrant tous les péchés passés ou à venir.

            Il est presque incroyable que ces indulgences soient encore en vogue aujourd'hui même. Les catholiques romains ont certaines prières dont la répétition leur assure un droit d'indulgences pour une période limitée ; ils prétendent qu'en multipliant ces prières, cela les  protégera pour longtemps de la colère. Ainsi, à ceux qui disent le « Salut Sainte Reine ! », il est accordé  40 jours d'indulgence ; tandis qu'il est accordé une indulgence de 200 jours à celui qui récite « Les Litanies de la Bienheureuse Vierge ; et ceux qui disent le : «  Béni soit la sainte, immaculée et très pure conception dis la Vierge Marie » ont une garantie de 100 années d'indulgences, etc., etc. On peut facilement se faire une idée à quel degré de corruption conduisit cette doctrine blasphématoire, lorsque, dans l'âge des ténèbres, les indulgences étaient libéralement accordées pour de  l'argent ou pour les services rendus en persécutant les incrédules et les hérétiques.

            D'énormes peines étaient fixées pour les crimes commis généralement par les riches, qui pouvaient payer libéralement, tandis que les plus basses violations de la justice, plus communes parmi les classes plus pauvres, étaient facilement excusées. C'est ainsi que le mariage avec un cousin germain coûtait jusqu'à 1.500.000 francs d'aujourd'hui, tandis que le meurtre d'une femme ou d'un père coûtait seulement 45.000 francs. Spanheim dit : « L'institution des indulgences fut pour l'église romaine l'hôtel à frapper la monnaie, la mine d'or pour les neveux libertins et les enfants naturels des papes, le nerf des guerres papales, le moyen de liquider les dettes et l'intarissable fontaine de luxe des papes ».

            Pour régulariser ce trafic, une échelle graduée des peines fut établie pour les différents péchés — soit plusieurs jours ou des années de purgatoire pour chacun ; et une échelle de prix fut aussi arrangée pour y correspondre, afin que ceux qui obtenaient des indulgences pour un meurtre, un vol, un adultère, un parjure, ou autres péchés, pussent être taxés suivant le cas. Par ce moyen, les peines étaient rachetées et les tourments du purgatoire mitigés ou annulés selon le bon plaisir de la volonté de l'Antichrist. Nous ne pouvons donc pas nous étonner que le peuple comprit promptement que beaucoup d'argent payait beaucoup de péchés.

            Les crimes s'accrurent tellement par ces indulgences que les meilleures classes de la société s'indignèrent jusqu'à se rebeller contre l'église. Les yeux des hommes commencèrent à s'ouvrir et à voir que le clergé, depuis les plus hauts dignitaires de l'église jusqu'aux sous-prêtres et officiants, trempaient dans l'iniquité. 

            De même qu'une heure sombre précède la tempête, ainsi l'heure des plus grandes ténèbres morales du règne ténébreux de l'Antichrist eut lieu juste avant que commençât le grand mouvement de la Réformation. Ce fut le trafic public et honteux des indulgences qui produisit des nausées et conduisit Luther et d'autres papistes zélés à discuter et à examiner le système tout entier, d'abord sous son aspect moral, puis sous son aspect  doctrinal. Finalement, Luther conçut la pensée exacte, c'est-à-dire que la papauté était en vérité l'Antichrist. Une fois qu'il eut découvert cela, il indiqua sans crainte quelques-uns des symboles de l'Apocalypse et montra leur application et leur accomplissement, partiel dans la hiérarchie papale.

            A ce sujet nous citons ce qui suit de la plume de l'ecclésiastique bien connu, Lyman Abbott :

            « L'apport d'argent pour l'église était une des conditions pour lesquelles les indulgences étaient accordées autrefois plus que maintenant. Ce trafic atteignit son apogée au début du XVIe siècle sous Léon X qui publia que des indulgences seraient accordées à tous ceux qui contribueraient à l'érection de la cathédrale de St. Pierre à Rome. Son principal agent pour la vente des indulgences en Allemagne fut un nommé Jean Tetzel. Les vices notoires de ce Tetzel n'empêchèrent pas le choix qui fut fait de lui pour être le dispensateur de ces pardons accordés à d'autres âmes plus pieuses ; rien ne lui semblait trop extravagant pour remplir ses coffres d'argent. Il déclara que la croix rouge qui l'accompagnait partout où il allait avait une efficacité aussi grande que la croix de Christ — qu'il n'y avait pas de péché si grand qu'il ne pût le remettre ; que les indulgences ne sauvaient pas seulement les vivants, mais aussi les morts ; qu'au moment même où l'argent tintait au fond des caisses, les âmes quittaient le purgatoire pour s'envoler au ciel. Telles étaient quelques-unes de ses déclarations blasphématoires. Une échelle régulière de prix fut établie : La polygamie coûtait six ducats ; le sacrilège et le parjure, neuf ; le meurtre, huit ; la sorcellerie, deux. Ce fut ce trafic sans vergogne et à la vue de tous qui, plus que toute autre chose, conduisit à la Réformation. Les indulgences continuèrent à être accordées, non seulement pour des actes de culte, mais aussi pour des contributions en argent faites à l'église ; mais la vente publique et ouverte est maintenant pour la plus grande partie bannie de l'église de  Rome. »

            Un autre écrivain relate ainsi d'autres paroles de Tetzel :

            « Approchez-vous et je vous donnerai des lettres dûment scellées, par lesquelles même les péchés que vous désireriez commettre à l'avenir vous seront tous pardonnés. Il n'y a pas de péchés si grands que les indulgences ne puissent les remettre. Payez, mais payez largement, et vous serez pardonnés. Vous prêtres, vous nobles, vous négociants, vous femmes, vous jeunes filles, vous jeunes gens, écoutez la voix de vos parents et amis qui s'en sont allés et qui s'adressent à vous de l'abîme sans fond : Nous endurons l'horrible tourment ; une petite aumône peut nous délivrer ; vous pouvez la donner, ne lèverez-vous pas ? Avec dix sous allemands vous pouvez délivrer votre père du purgatoire. Notre Seigneur Dieu ne s'occupe plus de nous comme Dieu ; il a donné tout pouvoir au pape. »

            Ce qui suit est la copie d'une des formules employées par Tetzel, contenant le nom de l'acheteur, la nature de ses péchés, etc. :

            « Que notre Seigneur Jésus-Christ te fasse miséricorde... et t'absolve par les mérites de ses plus saintes souffrances. En vertu du pouvoir apostolique qui m'a été conféré, je t'absous de tous les... excès, péchés et crimes que tu pourrais avoir commis, quelque grands qu'ils puissent être et de quelque nature qu'ils soient... Je te fais remise des peines que tu aurais à endurer au purgatoire,... je te restaure à l'innocence et la pureté de ton baptême, afin qu'au moment de la mort, les portes du lieu de tourment te soient fermées et que celles du paradis te soient ouvertes. Et si tu dois vivre longtemps, cette grâce demeure inaltérable jusqu'au moment de ta fin. Au nom du Père, du Fils et du St Esprit, Amen. Le frère Jean Tetzel, commissaire, a signé ceci de sa propre main. — »

            Quant au présent immédiat, nous ne pouvons rien dire, mais nous savons qu'il y a seulement quelques années, des indulgences imprimées avec les prix fixés étaient en vente, sur des tables, dans certaines grandes églises catholiques romaines du Mexique et de Cuba.

« IL LUI FUT DONNÉ DE FAIRE LA GUERRE AUX SAINTS ET DE LES VAINCRE » — «  DE  CONSUMER LES SAINTS DU TRÈS-HAUT »

            La contrefaçon papale du royaume a-t-elle détenu et exercé le pouvoir sur les vrais enfants de Dieu consacrés, les a-t-elle vaincus, « réduits à l'extrémité » (Laus.) ou écrasés, comme le texte hébreu l'implique, par une longue période d'oppression ? Nous répondons : Oui. Tous les moyens qui purent être imaginés furent employés pour écraser et éteindre l'esprit ou l'essence du vrai christianisme (Jean 8 : 36 ; Galates 5 : 1 ; 2 Corinthiens 3 : 17) ; et y substituer l'esprit, les doctrines et les formes de l'Antichrist. Tout d'abord ce fut moins une attaque ouverte contre les fidèles qu'une lente, persistante et écrasante oppression, procédant spécialement contre les docteurs opposés, mettant à bout la patience et détruisant la foi chez beaucoup. Ce harcèlement persistant est bien illustré par l'institution du confessionnal, par lequel l'Antichrist prenait non seulement connaissance de toutes les critiques et de toutes les objections faites contre ce système et dites à l'oreille d'un confesseur, mais sous la menace de peines à venir, il contraignait à confesser toutes les pensées ou actes qui lui étaient opposés et à s'en repentir. Cela aussi fut bientôt si soutenu par le pouvoir civil que toute protestation contre l'église put être envisagée comme une trahison contre le pouvoir civil qui était soutenu par l'autorité papale.

            Pendant le premier éclat de l'exaltation papale, le peuple, dans son ensemble, était reconnu nominalement comme membre de l'église, ou sans cela il était païen ; et tous ceux qui professaient Christ étaient tenus de se conformer aux usages et aux règlements de la hiérarchie qui s'élevait graduellement. L'erreur, toujours plus populaire que la vérité quand elle est à l'influence et au pouvoir, la chassait, la proscrivait et la discréditait et persécutait ceux qui y étaient attachés. Ce fut le temps où, comme cela est dépeint dans l'Apocalypse, la véritable Église (la femme) s'enfuit dans le désert — dans la solitude (Apocalypse 12 : 6),— proscrite à cause de sa fidélité à la vérité et au vrai Seigneur et Chef de l'Église. Dans ce temps, où les apostats furent exaltés comme princes, les saints vraiment humbles firent l'expérience  de ce dont le Seigneur les avait avertis : que tous ceux qui (durant l'ère de l'Évangile) veulent vivre pieusement doivent s'attendre à être persécutés. La belle-mère s'élèvera contre la belle-fille, le père contre le fils, le frère contre le frère et l'homme aura pour ennemis les gens de sa maison. Pouvait-il être conçu quelque chose de plus propre à épuiser ou écraser les saints que de tels moyens, employés pendant des siècles ?

            Pour avoir une idée de l'implacable férocité de cette persécution, il nous faut encore retourner aux pages de l'histoire.

            Les persécutions des chrétiens sous la Rome païenne ne peuvent être comparées à celles de la Rome papale, ayant été moins fréquentes, plus limitées en étendue et beaucoup moins sévères. Il a été constaté, sur la parole digne de foi des premiers chrétiens, que la majorité des magistrats romains qui exerçaient l'autorité de l'empereur ou du sénat dans les provinces, qui possédaient le pouvoir de vie et de mort, se conduisaient en hommes polis, d'éducation libérale et respectaient les règles de la justice. Ils déclinaient fréquemment les devoirs odieux de la persécution, repoussaient avec mépris les accusations contre les chrétiens (comme Hérode et Pilate essayèrent de le faire dans le cas de notre Seigneur :  Luc 23 : 14-16, 20, 22 ; Matthieu 27 : 24), ou suggéraient aux chrétiens un moyen légal d'évasion. Ils employaient plus souvent leur pouvoir, lorsque cela était possible, pour délivrer les chrétiens plutôt que pour les opprimer. Les tribunaux païens furent souvent pour eux le plus sûr refuge, contre leurs accusateurs juifs *[ Gibbon, Vol. II, pages 31-33.]. La  cruelle persécution qui sévit sous l'exécrable tyran Néron, qui fit brûler des chrétiens pour éloigner les suspicions que le peuple avait contre lui-même, forme une des pages les plus obscures de l'histoire de la  Rome païenne ; mais elle fit relativement peu de victimes. Ce ne sont pas généralement ceux du commun peuple qui furent victimes des persécutions païennes, mais plutôt des individualités en vue. Mais même ces persécutions des principaux représentants n'étaient pas  tant une opposition fixe et persistante de la part du gouvernement que le résultat d'une clameur populaire irrésistible, éveillée par la superstition et qui semblait nécessaire aux gouvernants pour assurer l'ordre et la paix. Nous en trouvons plusieurs exemples dans la carrière de Paul et des autres apôtres. — Voy. Actes 19 : 35- 41 ; 25 : 24-27 ; 26 : 2, 3, 28. Les persécutions les plus générales, sous les empereurs romains, ne furent même que de courte durée, excepté celle qui eut lieu sous Dioclétien et qui se continua avec plus ou moins de sévérité pendant dix ans. Entre ces persécutions il y eut souvent de longues périodes de paix et de tranquillité. Sous les empereurs, la chrétienté, bien que fortement oppressée, ne fut pas réduite à l'extrémité, mais, comme nous l'avons vu, elle prospéra grandement. 

            Combien furent différentes les persécutions de la papauté, qui non seulement s'attaqua aux personnages en vue, mais à tous ; et ses persécutions ne duraient pas quelques mois seulement, mais ne cessèrent pas. Ce qui, sous les empereurs païens n'était qu'une rage ou frénésie passagère devint sous les papes un système organisé, animé par le fanatisme religieux, par des plans ambitieux, et inspiré par un zèle satanique avec une énergie et une cruauté sans parallèle dans les annales de l'histoire. L'église apostate mit de côté l'épée de l'Esprit, et, saisissant le bras de l'empire, tourna ses armes charnelles avec une fureur  sans pitié contre tous les faibles opposants qui se trouvaient sur le chemin de son ambition, tandis qu'elle courtisait, nattait et trompait ceux qui détenaient l'autorité, jusqu'à ce qu'elle eût  capté leur confiance et usurpé leur place et leur pouvoir.

             Le paganisme et l'hérésie devinrent alors des motifs de persécutions, — tout spécialement cette dernière. Le clergé soi-disant chrétien, dit Edgar, «  appliquait les lois de la théocratie juive et les transactions des annales judaïques dans le but vil et profane de réveiller le démon de la persécution contre les restes poussiéreux de la superstition [païenne] des Grecs et des Romains... Ils dissolvaient l'ancienne fabrique du polythéisme et faisaient bénéficier l'église, l'état et l'armée de leurs revenus... »  Le paganisme fut chassé du territoire romain... On substitua la contrainte à la conviction et la terreur à l'Évangile. On rougit de honte en lisant qu'un Symmaque et un Libanius, deux orateurs païens, plaidaient  pour la raison et la persuasion dans la propagation de  la religion, tandis qu'un Théodose et un Ambroise, un empereur chrétien et un évêque chrétien poussaient à la violence et à la contrainte.

            Quand Constantin eut été élevé à la souveraineté de Rome, il était disposé à tolérer toutes les religions, comme nous le montre le célèbre édit de Milan qui accordait la liberté religieuse à tout individu dans l'empire romain. Une telle mesure aurait dû être reçue avec joie par l'église chrétienne qui avait tant soupiré après la liberté au cours des persécutions précédentes ; mais tel ne fut pas le cas. Le véritable esprit du christianisme avait disparu et l'ambition de l'église était alors de s'exalter elle-même le plus rapidement possible en écrasant toute étincelle de liberté, et en soumettant toutes choses à sa volonté. D'accord avec cela, Gibbon dit : * [Vol. II, page 236. ] « Les ministres ecclésiastiques de Constantin en vinrent bientôt à réduire l'impartialité du magistrat et à éveiller le zèle du prosélyte.. ; tout espoir de paix et de tolérance fut détruit dès le moment où il rassembla trois cents évêques à l'intérieur de son palais ». Là on persuada à l'empereur de déclarer que ceux qui résisteraient au jugement de ce corps clérical en matière de foi, se prépareraient à l'exil immédiat ; et leurs décisions furent déclarées être d'autorité divine. Cet esprit d'intolérance se développa bientôt en d'arriérés et implacables  persécutions. Constantin promulgua deux lois pénales  contre l'hérésie, et son exemple fut suivi par les empereurs qui lui succédèrent — Valentinien, Gratien, Théodose, Arcadius, et Honorius. Théodose publia quinze, Arcadius douze et Honorius pas moins de dix-huit de ces statuts. Ils sont rapportés dans les codes de Théodose et de Justinien à la honte de leurs auteurs, prêtres  et empereurs.

            Ce qu'il plaisait à l'Antichrist d'appeler hérésie (le glus souvent c'était la vérité et la justice s'efforçant de prendre pied) était classé comme, pire que l'incrédulité ; les rois, les empereurs et les théologiens s'y opposèrent ; l'hérésie et l'incrédulité, spécialement la première, furent persécutées par l'Inquisition. Lorsque vers le commencement du treizième siècle il y eut une renaissance de l'instruction et que les hommes commencèrent à se réveiller de leur sommeil et des mauvais songes de l'âge des ténèbres, ceux chez qui le sentiment de la vérité n'était pas entièrement extirpé furent stimulés et l'étendard de la vérité fut levé en opposition aux erreurs grossières de l'Antichrist. C'est alors que l'esprit de persécution de l'Antichrist s'excita et commit des actes furieux afin d'écraser l'opposition.

            Les rois et les princes qui en quelque mesure pouvaient avoir encouru le déplaisir du pape, tremblaient pour la sécurité de leurs couronnes ; leurs royaumes pouvaient être mis au terrible ban de l'église, si eux ou leurs sujets refusaient une obéissance absolue aux commandements du pape qui les adjurait d'exterminer l'hérésie et les exhortait à purifier leurs provinces de la perversité hérétique, sous peine de se voir retirer leur gouvernement. Ceux d'entre les nobles qui négligeaient d'aider à la persécution perdaient leurs droits et possessions. C'est pourquoi rois et princes s'empressèrent d'exécuter les mandats qu'ils avaient reçus de la papauté ; et les barons et leurs partisans furent à leur service dans cette œuvre de destruction.            

            Même avant ce réveil, déjà en l'an 630, le Concile de Tolède força le roi d'Espagne, lors de son avènement au trône, de jurer qu'il ne tolérerait pas l'hérésie parmi ses sujets et dans toutes les possessions espagnoles ; et il fut spécifié que le souverain qui violerait un tel serment « serait maudit loin de la face du Dieu éternel et deviendrait le combustible du feu éternel ». Mais la terrible importance de telles exigences fut beaucoup plus complètement comprise lorsque le réveil commença et que l'Antichrist eut obtenu son maximum de puissance.

            Le Concile d'Oxford en 1160 livra au bras séculier comme châtiment, une compagnie de Vaudois du Piémont qui avaient émigré de Gascogne en Angleterre. En conséquence, le roi Henri II ordonna que les hommes et les femmes fussent fouettés publiquement, marqués à la joue par un fer rougi au feu et chassés demi nus hors de la ville, en plein hiver ; et il ne fut permis à personne de leur montrer de la pitié ou de leur accorder la moindre faveur.

            L'empereur d'Allemagne, Frédéric, en 1224, condamna les hérétiques à divers châtiments : à être brûlés vifs, à voir leurs propriétés confisquées et leur postérité vouée à l'infamie à moins qu'ils ne devinssent eux-mêmes persécuteurs. Louis, roi de France, publia en 1228 des lois pour extirper l'hérésie et les mit en vigueur. Il força Raymond, comte de Toulouse, à se charger de l'extermination de l'hérésie dans son domaine, sans épargner ami ou vassal.

            Il y eut dès le début une certaine résistance contre l'usurpation du pouvoir qui se développa peu à peu en système papal, mais cette résistance fut faite seulement par un petit nombre de fidèles ; et elle fit peu d'impression sur le flot écrasant de mondanité qui entra dans  l'église et la submergea. Quelques-uns, au fur et à mesure qu'ils discernaient l'erreur, se retirèrent tranquillement de la grande apostasie pour adorer Dieu selon ce que leur conscience leur dictait, malgré les risques de la persécution. Les plus notables furent les  Vaudois, les Albigeois, les Wicléfistes et les Huguenots. Tous, bien que connus sous des noms différents, ont eu, autant que nous pouvons en juger, une origine et une foi communes. « La doctrine des Vaudois », dit Rainerous (3, 4), le célèbre Inquisiteur du 13° siècle,  « est la plus ancienne hérésie ; elle existait, d'après quelques-uns, depuis le temps du pape Sylvestre et, suivant d'autres, depuis les jours des apôtres ». Sylvestre était pape lorsque l'empereur Constantin embrassa le christianisme ; nous voyons donc par cela que dès le début la vérité ne demeura pas sans adhérents qui, quoique humbles et sans popularité, résistèrent résolument, à la Papauté et aux doctrines papales du purgatoire, de l'adoration des statues, de l'invocation des saints, de l'adoration de la vierge Marie, des prières en faveur des morts, de la transsubstantiation, du célibat du clergé, des indulgences, de la messe, etc., et désapprouvèrent les pèlerinages, les fêtes, l'encens brûlé, les enterrements religieux, l'emploi de l'eau bénite, les vêtements sacerdotaux, les monastères, etc. Ils avaient compris que l'enseignement de l'Écriture sainte devait être maintenu en opposition aux traditions et prétentions de l'église de Rome. Ils regardaient le pape, comme le chef de toutes les erreurs et prétendaient que la rémission des péchés était obtenue seulement par les mérites du Seigneur Jésus.

            Par leur foi et leurs œuvres, ces gens formèrent la base d’une réformation et protestèrent contre l'erreur bien longtemps avant Luther. Eux et d'autres adversaires du romanisme furent chassés, détestés et persécutés avec une furie impitoyable par les émissaires du pape. Les Vaudois et les Albigeois furent les partis les plus nombreux qui protestèrent contre la Papauté  et lors du réveil littéraire du 13e  siècle, ce furent eux  surtout qui firent briller la vérité que Wyclef, Huss  Luther et d'autres reflétèrent et accentuèrent avec plus  de puissance. Leurs doctrines, qu'ils soutinrent avec simplicité et moralité, brillèrent d'un lustre plus grand encore par contraste avec l'orgueil pompeux et l'immoralité flagrante de la Papauté alors dans l'exaltation.

            C'est alors que les papes, les conciles, les théologiens, les rois, les croisés et les inquisiteurs combinèrent leur puissance diabolique pour exterminer tous les opposants et éteindre le moindre rayon de lumière qui se levait. Le pape Innocent III envoya tout d'abord des missionnaires dans les districts où les doctrines des Albigeois avaient pris pied, pour prêcher le romanisme, opérer des miracles, etc.; mais trouvant ces efforts insuffisants, il proclama une croisade contre eux et offrit à tous ceux qui s'y engageraient le pardon de tous leurs péchés et un passeport immédiat pour le ciel, sans passer par le purgatoire. Un demi-million d'hommes, — des Français, des Allemands, et des Italiens, pleins de confiance dans le pouvoir du pape de donner la récompense promise, se rallièrent sous l'étendard de la croix pour défendre le catholicisme et exterminer l'hérésie. Une série de batailles et de sièges se succédèrent alors durant 20 ans. La ville de Béziers fut prise et saccagée en 1209, et les bourgeois, sans distinction d'âge ou de sexe, périrent par l'épée au nombre de 60.000, comme plusieurs historiens le rapportent. Le sang de ceux qui se réfugièrent dans les églises et qui furent tués par les saints Croisés abreuva les autels et coula dans les rues.

            Lavaur fut assiégée en 1211. Le gouverneur fut pendu à un gibet, et sa femme, ayant été jetée dans un puits, y fut lapidée. Les citoyens furent mis à mort sans distinction, 400 furent brûlés vifs. La florissante contrée du Languedoc fut dévastée, ses villes brûlées et ses habitants balayés par le feu et l'épée. On estime que 100.000 Albigeois tombèrent en un seul jour ; leurs corps furent mis en tas et brûlés.

            Tous ces massacres et ces vilenies furent faits au nom de la religion, soi-disant pour la gloire de Dieu et l'honneur de l'église, mais en réalité pour soutenir l'Antichrist, assis dans le temple de Dieu [l'église] se donnant lui-même comme étant un dieu, c'est-à-dire un  puissant, capable de conquérir et de détruire ses ennemis. Le clergé remercia Dieu pour cette œuvre de destruction, et un hymne de louange à Dieu fut composé et chanté pour la glorieuse victoire de Lavaur. L'épouvantable carnage de Béziers fut considéré comme le jugement visible du ciel contre l'hérésie des Albigeois. Les croisés participèrent à la messe le matin, et le reste du jour ils dévastèrent la contrée du Languedoc et assassinèrent ses habitants.

            Qu'on se souvienne toutefois que ces croisades ouvertes contre les Vaudois et les Albigeois ne furent entreprises que parce que l'hérésie avait pris une extension considérable dans la plus grande partie de ces communautés. Ce serait une grande erreur de supposer que ces croisades furent les seules persécutions : le lent et constant écrasement des individus dont la masse se compta par milliers se poursuivit dans le vaste empire de la Papauté, — consumant ainsi sans interruption les saints du Très-Haut.

            Charles-Quint, empereur d'Allemagne, roi d'Espagne et des Pays-Bas, persécuta les amis de la Réforme dans toute l'immense étendue de son gouvernement.  Soutenu par la diète de Worms, il proscrivit Luther, ses disciples et ses écrits, condamna tous ceux qui aideraient Luther ou liraient ses livres à la confiscation de leurs biens, à être mis au ban de l'empire et à la peine de haute trahison. Dans les Pays-Bas, les hommes qui suivirent Luther furent décapités et les femmes enterrées vives ou, si elles s'obstinaient, livrées aux flammes. Quoique cette loi fût en grande partie suspendue,  l’œuvre de mort n'en continua pas moins sous toutes ses formes horribles. Le duc d'Albe se glorifia de l'exécution de 18.000 protestants en six semaines. Paolo estime à 50.000 le nombre de ceux qui furent exécutés dans les Pays-Bas à cause de leur religion ; et Grotius  donne une liste des martyrs de la Belgique s'élevant à 100.000. Charles exhorta jusqu'à son dernier souffle son fils, Philippe II, à achever l'œuvre de persécution et d'extermination de l'hérésie qu'il avait commencée. Philippe ne tarda pas à suivre ces conseils ; il stimula avec furie l'esprit de persécution et condamna les protestants aux flammes, sans distinction ni pitié.

            François et Henri, rois de France, suivirent l'exemple de Charles et de Philippe dans leur zèle pour le catholicisme et l'extermination de l'hérésie. Les massacres de Mérindol, d'Orange et de Paris sont de frappantes illustrations de leur zèle pour la cause de l'Antichrist. Le massacre de Mérindol, projeté par le roi de France et approuvé par le parlement, fut confié au président Oppède pour être exécuté. Le président fut chargé de massacrer la population, de brûler les villes et de démolir les châteaux des Vaudois qui résidaient en grand nombre dans cette contrée. Les historiens catholiques romains estiment que l'exécution de cette commission causa la mort de milliers de personnes, tant hommes que femmes et enfants ; 24 villes furent mises en ruines et le pays fut dévasté et désolé. Hommes, femmes et enfants cherchèrent à se sauver dans les bois et les montagnes ; ils y furent poursuivis et tués par l'épée. Beaucoup de ceux qui restèrent dans les villes y subirent un même ou pire sort. Cinq cents femmes furent jetées dans une grange à laquelle on mit le feu, et lorsque quelques-unes sautèrent par les fenêtres, elles furent reçues sur la pointe des lances. Les femmes furent violées, et les enfants égorgés sous les yeux de leurs parents, impuissants à les protéger. Quelques-unes furent jetées dans des précipices et d'autres traînées nues dans les rues.

            Le massacre d'Orange, en 1562, eut un caractère semblable à celui de Mérindol et il a été décrit avec précision par des écrivains catholiques. L'armée italienne, envoyée par le pape Pie IV, avait reçu l'ordre de massacrer les hommes, les femmes et les enfants ; et cet ordre fut exécuté avec une terrible cruauté. Les hérétiques sans défense furent tués par l'épée, précipités du haut des rochers, lancés sur des tranchants de  haches ou des pointes de poignards, pendus, rôtis à feu lent et exposés à la honte et à des tortures défiant toute description.

            Le massacre de Paris, le jour de la Saint-Barthélemy (24 Août 1572), égala en cruauté, mais dépassa en extension ceux de Mérindol et d'Orange. Il a aussi été décrit en détail par des historiens catholiques ; l'un d'eux, Thuanus, le stigmatise comme une  « féroce cruauté, n'ayant pas de parallèle dans toute l'antiquité ». Le 23 Août à minuit, le son du tocsin donna le signal de la destruction, et les épouvantables scènes de Mérindol et d'Orange éclatèrent à nouveau contre les huguenots détestés. Le carnaval de mort dura sept jours : des ruisseaux de sang humain coulèrent dans les rues ; le roi et la reine regardaient avec une extrême satisfaction les morts dont la cour du palais était remplie. Le corps de l'amiral Coligny fut traîné par les  rues et la Seine fut couverte de corps morts flottants. Le nombre évalué de ceux qui furent ainsi massacrés varie entre cinq et dix mille. L'œuvre de destruction ne se concentra pas seulement dans Paris, mais s'étendit très loin à travers toute la France. La veille, des messagers spéciaux avaient été dépêchés dans toutes les directions portant un ordre pour le massacre général  de tous les huguenots. Les mêmes scènes eurent lieu à peu près dans toutes les provinces et l'estimation du nombre des morts varie entre 25 et 70.000.

            L'Antichrist éprouvait une extrême satisfaction à ces épouvantables scènes de carnage. Le pape et sa cour exultaient à cause de la victoire du catholicisme sur les Vaudois à Mérindol et l'impie Oppède reçut le titre de « défenseur de la foi et héros du christianisme ».  Le roi de France s'en alla à la messe et rendit de solennelles actions de grâces à Dieu pour la victoire sur les huguenots de Paris et leur massacre. Ce carnage, sanctionné par le roi de France, son parlement et ses sujets catholiques romains, eut probablement lieu sous l'instigation directe du pape et de la hiérarchie papale. Le fait que la nouvelle en fut reçue à la cour papale avec de grandes réjouissances prouve qu'il fut du moins hautement approuvé. Le pape Grégoire XIII se rendit en grande procession à l'église de Saint-Louis afin de rendre grâces à Dieu pour cette victoire remarquable. Il proclama aussitôt un jubilé et envoya à la cour de  France un nonce, qui, au nom du pape, loua  « l'exploit si longuement médité et si habilement exécuté pour le bien de la religion. »  Une médaille fut frappée par le roi, en mémoire du massacre, avec cette inscription :  « Pietas exitavit justitiam »” — La piété excita la justice.

            Des médailles commémoratives de l'événement furent aussi frappées à l'hôtel papal des monnaies, par ordre du pape. Une de celles-ci est exposée à l'Hôtel  du Souvenir de Philadelphie, Pie. L'avers présente une  figure sublime du pape, avec cette inscription abrégée : Gregorius XIII, Pontifex Maximus, anno I, la première année de son pontificat, 1572. Au revers de cette médaille est une représentation d'un ange destructeur portant dans la main gauche une croix et dans la main droite une épée ; au-dessous de lui, prosternés et fuyants, une bande de huguenots, hommes, femmes et enfants  sont représentés avec des visages et des traits empreints d'horreur et de désespoir. Sous cette scène se trouvent les mots : Ugonottorum Strages 1572, ce qui signifie : « Le massacre dès Huguenots en 1572. »

            Une peinture du massacre de la St. Barthélemy fut suspendue dans le Vatican, avec cette inscription en latin : Le pontife approuve le meurtre de Coligny. Coligny était chef des huguenots et un des premiers qui devaient tomber. Après qu'il eut été assassiné, sa tête fut séparée de son corps et portée à la reine, qui après l'avoir fait embaumer, l'envoya à Rome comme un trophée, tandis que son corps fut traîné dans les rues de Paris par la populace. Le roi fut bientôt saisi par les horreurs des remords et il ne s'en remit jamais. Son médecin particulier rapporte qu'il disait : « Je ne sais pas ce qui m'est arrivé, mais je suis agité dans mon corps et dans mon esprit comme par la fièvre, que je dorme ou que je sois éveillé, il me semble à tout moment voir des corps mutilés se présenter à moi, avec des  faces hideuses et couvertes de sang. » II mourut dans  une grande agonie, couvert d'une sueur de sang. 

            En 1641, l'Antichrist proclama une guerre de religion en Irlande et fit appel au peuple pour le massacre des protestants, par tous les moyens qui étaient en leur  pouvoir. Le peuple trompé écouta ce commandement comme émanant de Dieu et s'empressa d'exécuter cette charge. Le sang des protestants coula à flots dans toute l'Irlande ; des maisons furent réduites en cendres, des villes et des villages furent presque détruits. Quelques-uns furent forcés de tuer les membres de leur parenté et ensuite de s'ôter la vie. Les derniers mots que ces prêtres faisaient retentir à leurs oreilles étaient que leur agonie n'était que le commencement du tourment éternel. Des milliers moururent de froid et de faim, en cherchant à émigrer dans d'autres pays. A Cavan, le  chemin était taché sur une longueur de près de 15  kilomètres du sang des fugitifs traqués ; 60 enfants furent abandonnés par leurs parents dans leur fuite, et  il fut déclaré que quiconque leur viendrait en aide serait  enterré à côté d'eux, 70 adultes furent enterrés vivants à Fermaugh et 72 à Kilkenny. Dans la seule province d'Ulster plus de 154.000 protestants furent massacrés  ou expulsés de l'Irlande.

            O'Niel, prélat d'Irlande, appela cela une guerre pieuse et légale, et le pape (Urbain VIII) lança une tulle datée de Mai 1643, accordant pleine et absolue rémission de leurs péchés à ceux qui y avaient pris part « en faisant bravement leur devoir d'extirper et de déraciner entièrement le levain pestilentiel de la contagion hérétique. »

L'INQUISITION OU « SAINT OFFICE »

            C'est à Dominique, l'esprit principal de cette croisade, qu'est attribué l'honneur d'avoir inventé l'infernale Inquisition ; toutefois Benoît, dans son zèle à attribuer à Dominique l'honneur d'être le premier Inquisiteur Général, est très incertain quant à la question de savoir si l'idée en vint au pape Innocent lui-même ou à St. Dominique. Elle fut établie premièrement par le pape Innocent III en 1204.

            St. Dominique était un monstre dépourvu de tout sentiment de compassion, qui semblait trouver ses principales délices dans les scènes de torture et de souffrances. Durant la croisade contre les Albigeois, il dirigea et encouragea, un crucifix à la main, les saints guerriers dans leurs exploits de mort et de destruction. L'Inquisition ou St. Office est aujourd'hui un tribunal de l'église catholique romaine pour découvrir, réprimer et punir l'hérésie et les autres offenses contre l'église de Rome * [ La Chaire de St. Pierre, p. 589.]. Mais aux jours de Dominique cette Inquisition n'avait pas de tribunal légal et les instruments de torture n'étaient pas perfectionnés comme ils le furent plus tard. Néanmoins, Dominique, bien qu'il ne possédât point de système semblable, sut trouver de nombreux moyens de torture, en disloquant les jointures, en arrachant les nerfs et en lacérant les membres de ses victimes ; ou encore en brûlant sur un bûcher ceux dont les convictions restaient inébranlables par les autres procédés et qui ne voulaient pas renoncer à leur foi et à leurs libertés.

            Avec le mandat qu'il avait reçu du pape Innocent III de punir de la confiscation, du bannissement et de la mort les hérétiques qui ne voudraient pas recevoir son évangile, Dominique stimula le zèle de la magistrature civile et de la populace au massacre des Vaudois hérétiques ; il livra d'un seul coup 180 Albigeois aux flammes. C'est pour une telle fidélité au service de l’Antichrist qu'il fut canonisé comme un saint, et qu’il est adoré et prié aujourd'hui par les catholiques romains. Le bréviaire romain (une sorte de livre de prières) parlant de St. Dominique, loue « ses mérites et ses doctrines qui illuminèrent l'église, son génie et son courage qui détruisirent les hérétiques toulousains, et ses nombreux miracles qui allèrent même jusqu'à ressusciter  les morts ». Le missel romain (qui comprend le service en rapport avec la célébration du souper du Seigneur) fait l'éloge de ses mérites et indique les prières à faire pour être aidé temporairement par le moyen de son intercession. C'est ainsi que l'Antichrist continue à soutenir et honorer ses fidèles héros.

            Il serait impossible d'exprimer brièvement une conception exacte des horreurs de l'Inquisition, ou de la peur terrible qu'elle inspirait au peuple. Ceux qui ne louaient pas hautement l'Antichrist, ou qui osaient  s'aventurer à critiquer ses méthodes, étaient aussitôt  suspectés d'hérésie ; et, sans avertissement, sans occasion de se justifier, ils étaient liés et emprisonnés dans un donjon pour un temps indéfini, jusqu’à ce que le moment parût convenable pour les juger ; — l’accusateur et l'accusation leur étant souvent inconnus. On procédait secrètement à ces jugements et la torture était souvent employée pour extorquer des confessions. Les tortures infligées étaient généralement si épouvantables qu'on peut à peine y croire aujourd'hui dans nos pays de liberté ; cependant leur réalité est confirmée par une évidence que les historiens catholiques romains eux-mêmes ne peuvent nier et les vaines tentatives qu'ils font pour les excuser ne font qu'affirmer la chose. Les instruments de torture, des reliques de l'Inquisition, existent toujours et rendent tout reniement sans valeur. Le « Saint Office » employa même des médecins pour surveiller la marche de la torture et l'arrêter lorsque la mort semblait prête à délivrer la victime ; il lui était alors permis de guérir en partie, pour que la torture puisse lui être appliquée une deuxième et même une troisième fois. Ces tortures n'étaient pas toujours infligées comme châtiment pour punir l'hérésie ; elles avaient généralement pour but de forcer l'accusé à se confesser, à se rétracter ou à dénoncer d'autres personnes, suivant le cas.

            L'Inquisition, tout en ayant perdu la plus grande partie de ses horreurs, était encore terrible durant nôtre présent siècle. L'historien des guerres de Napoléon, décrivant la prise de Tolède par son armée, mentionne incidemment l'ouverture des prisons de l'Inquisition et dit : 

            « Des tombeaux semblaient s'ouvrir et de pâles figures semblables à des fantômes sortaient des donjons qui exhalaient une odeur sépulcrale. Des barbes touffues retombant sur la poitrine et de longs ongles crochus semblables à des griffes d'oiseaux défiguraient ces squelettes dont la poitrine haletante respirait l'air frais pour la première fois depuis de longues années. Beaucoup d'entre eux étaient devenus estropiés, la tête inclinée en avant, les bras et les mains tombant, pendant raides et inertes. Ils avaient été enfermés dans des casemates si basses qu'ils ne pouvaient pas s'y tenir debout ; et en dépit des soins des chirurgiens (de l'armée), beaucoup d'entre eux moururent le même jour. Le jour suivant, le général Lasalle,  accompagné par plusieurs officiers de son état-major, inspecta minutieusement les lieux. Le nombre des instruments de torture faisait tressaillir même ces hommes habitués aux horreurs des champs de bataille.

            Dans le renfoncement d'une voûte souterraine, contiguë à la salle privée des interrogatoires, se trouvait une statue en bois faite par des moines et représentant la vierge Marie. Une auréole dorée entourait sa tête et elle tenait dans sa main droite une bannière. Tous furent à première vue frappés de suspicion, en ce que, malgré la robe de soie qui descendait depuis les épaules de chaque coté en larges plis, elle était revêtue d'une sorte de cuirasse. Un examen plus attentif montra que le devant du corps était garni de petites lames de couteaux étroites et de clous très effilés, avec leurs pointes et tranchants tournés vers le spectateur, les bras et les mains avaient des jointures, et un mécanisme derrière la cloison mettait la statue en mouvement. Un des serviteurs de l'Inquisition fut appelé par ordre du général pour qu'il fît manœuvrer la machine, comme il la nomma. Lorsque la statue étendit les bras comme pour presser tendrement quelqu'un sur son cœur, on y plaça le havresac bien garni d'un grenadier polonais pour remplacer la victime vivante. La  statue l'embrassa et l'étreignit de plus en plus, et lorsque, sur commande, le serviteur fit ouvrir les bras de la  statue et la fit retourner à sa position précédente le havresac était perforé à une profondeur de cinq à huit centimètres et restait suspendu aux pointes des clous et des lames de couteaux. »

            Des «  roues » de différentes sortes furent inventées et appliquées comme moyens de torture ; une des méthodes les plus simples est ainsi expliquée : La victime, dépouillée de tous ses vêtements, avait les bras attachés derrière le dos avec une forte corde par laquelle, au moyen d'une poulie, elle était relevée sur ses pieds, auxquels des poids étaient attachés. On laissait ainsi retomber le malheureux plusieurs fois et on le relevait par des secousses qui disloquaient des jointures des bras et des jambes, tandis que la corde pénétrait jusqu'aux os dans la chair frémissante.

            Quelque chose qui rappelle de tels outrages faits au nom de Christ vient d'être récemment exposée au grand jour. L'imprimerie d'une Société biblique installée à Rome et manquant de place, avait loué une grande maison près du Vatican. Au plafond, un anneau énorme et étrange attira l'attention et après examen on acquit la certitude que l'endroit dans lequel était maintenant imprimée la Bible, « l'Épée de l'Esprit, qui est la Parole de Dieu, » par laquelle l'Antichrist a été déjà rendu  « impuissant » à opprimer et à exterminer les saints, était justement une chambre de torture au temps de l'Inquisition, la boucle de la poulie ayant probablement été usée à rouer de nombreuses pauvres victimes bâillonnées.

            Ceux qui étaient convaincus d'hérésie étaient quelquefois condamnés à ce qu'on appelait un autodafé, ou « acte de foi ». L'autorité ecclésiastique renvoyait le condamné au pouvoir séculier, tandis que le clergé, sous prétexte de miséricorde, implorait les magistrats de montrer de la compassion pour le condamné, et, élevant la croix, il invitait la victime à se rétracter et sauver sa vie présente et à venir. Les magistrats savaient ce qu'ils avaient à faire, ils ne montraient de miséricorde que pour ceux qui se rétractaient et gagnaient ainsi le titre de Défenseurs de la Foi et d'exterminateurs de l'hérésie. L'hérétique condamné, revêtu d'un habit jaune bariolé de dessins de chiens, de serpents, de flammes et de démons était conduit au lieu de l'exécution, attaché sur le bûcher et livré aux flammes.

             Torquemada, un autre fameux Inquisiteur Général, fournit une illustration marquante de l'esprit de l'Antichrist. Des écrivains catholiques romains admettent qu'il fit mourir, brûlées vives, 10.220 personnes, hommes et femmes. Llorente, qui fut secrétaire général  de l'Inquisition pendant trois ans, et avait en mains toutes les preuves documentaires, montre, dans ses rapports (en 4 volumes) publiés en 1817, que de 1481 à 1808, il n'y eut pas moins de 31.912 personnes brûlées vives et environ 300.000 condamnées à la torture et à diverses autres peines, par ordre de ce seul St. Office. Chaque pays catholique en Europe, en Asie et en Amérique a eu son Inquisition.

            Nous ne pouvons retracer ici les persécutions de l'Antichrist contre tout ce qui sentait les réformes, la liberté de conscience ou la liberté politique. Il suffit de dire que ces persécutions s'étendirent sur toutes les contrées où la Papauté avait pris pied : en Allemagne, Hollande, Pologne, Italie, Angleterre, Irlande, Écosse, France, Espagne, Portugal, Abyssinie, aux Indes, à Cuba, au Mexique et dans quelques états de l'Amérique du Sud. Faute de place nous ne pouvons raconter tous les cas individuels qui pourraient servir à montrer que beaucoup de martyrs étaient de vrais saints et des héros, qui, par une grâce spéciale, furent rendus capables tout en mourant lentement dans les plus horribles souffrances, de chanter des hymnes de louange et d'actions de grâces au vrai Chef de la véritable Église et qui, semblables à Lui, prièrent pour leurs ennemis, lesquels, comme cela leur avait été prédit, les persécutaient à cause de Lui. * [ Nous renvoyons les lecteurs français qui désireraient des détails plus complets sur ces temps terribles et les scènes qui s'y rapportent, à l'Histoire de l’Angleterre par Macaulay ; à l'Histoire de la Réformation par Merle d’Aubigné ; à l'ouvrage du prof. Gaussen : « Le Souverain Pontife et l'Église de Rome », ainsi qu'à la brochure de François Délilez : « Christ et l'Antichrist », etc. ]

            Il nous est impossible aussi, pour les mêmes raisons, d'insister sur les terribles, navrantes et épouvantables tortures infligées à quelques-uns des joyaux du Seigneur à cause de leur fidélité à leurs convictions. Ceux qui ont fait des recherches assez minutieuses sur ce sujet estiment que dans l'espace de 1300 ans la Papauté, directement ou indirectement, causa la mort de cinquante millions de personnes. Et l'on peut dire en toute certitude que le génie humain et satanique s'éleva au plus haut degré dans l'invention de nouvelles et horribles tortures contre les adversaires religieux et politiques de l'Antichrist ; les hérétiques, surtout, furent poursuivis avec une fureur décuplée. En plus des formes ordinaires de la persécution et de la mort, qui déchiraient, brûlaient, noyaient, transperçaient ou tuaient avec des flèches ou des fusils, des gens diaboliques recherchaient quelles étaient les parties du corps humain les plus sensibles et les plus délicates, qui pouvaient le plus faire souffrir leurs victimes. Ils faisaient couler du métal fondu dans les oreilles ; la langue était arrachée et à sa place on coulait du plomb fondu dans la bouche ; des lames de couteaux étaient fixées à des roues de manière à ce que les victimes pussent être peu à peu hachées en morceaux ; des pinces et des tenailles rougies au feu étaient appliquées sur les parties les plus sensibles du corps ; les yeux étaient arrachés, ainsi que les ongles, avec des fers rouges. Les victimes étaient pendues par des trous percés au travers de leurs talons. Des martyrs furent contraints à sauter depuis des éminences sur de longues piques placées au-dessous, où ils mouraient lentement dans d'atroces souffrances. D'autres eurent la bouche remplie de poudre à canon qui, allumée, faisait sauter la tête en pièces ; d'autres encore furent battus en pièces sur des enclumes ; il y en eut d'autres qui furent gonflés d'air avec des soufflets jusqu'à ce qu'ils éclatent, ou étouffés avec des pièces arrachées de leur propre corps, ou avec de l'urine, des excréments, etc, etc.

            Il serait impossible de croire à certaines de ces atrocités diaboliques, si elles n'étaient si bien prouvées. Elles servent à montrer la profondeur de dépravation dans laquelle le cœur humain peut descendre et ce que peut devenir la droiture du cœur de l'homme et ses bons instincts sous l'influence d'une religion fausse et contrefaite. L'esprit de l'Antichrist dégrada et rabaissa le monde autant que l'esprit du vrai Christ et le pouvoir et l'influence du vrai royaume de Dieu auraient élevé et ennobli et qu'ils, élèveront et ennobliront durant le Millénium les cœurs des hommes et leurs actions. Cela est représenté, bien que dans une faible mesure, par les progrès de la civilisation et l'accroissement de la justice et de la miséricorde depuis que le pouvoir de l'Antichrist a commencé à décliner et que la Parole de Dieu commence à être entendue et écoutée, quoique encore superficiellement.

            Nous ne pouvons pas concevoir de stratagème mieux combiné pour tromper et opprimer l'humanité. On tirait avantageusement parti de toute disposition dépravée et des faiblesses des hommes déchus ; on fit appel à toute vile passion et chacune fut stimulée et récompensée. Les vicieux furent ainsi attirés et enrôlés comme dévots, tandis que les gens de race plus noble furent engagés par d'autres moyens — par un semblant de piété hypocrite et extérieure, — une sorte de renoncement à soi-même et de charité manifestés dans ses institutions monastiques, mais qui ne servaient réellement qu'à en faire dévier beaucoup bien loin du sentier de la vertu. Les gens viveurs et frivoles trouvèrent d'amples satisfactions dans le faste, le décor, la pompe et les cérémonies. Les gens audacieux et chevaleresques les trouvèrent dans ses missions et ses croisades,  de même que les scélérats dans ses indulgences et les bigots fanatiques et cruels dans ses entreprises d'oppression de ceux qui s'opposaient à l'Antichrist.

            Remplis d'horreur et d'étonnement, nous nous demandons comment il se fait que les rois et les princes, les empereurs et le peuple tout entier aient permis de telles atrocités ? Comment ne se sont-ils pas levés depuis longtemps et n'ont-ils pas abattu l'Antichrist ? La réponse est donnée dans les Écritures (Apocalypse 18 : 3) : «  Les nations ont été « enivrées » (stupéfiées) ; elles ont perdu leurs sens en buvant le vin mêlé (le mélange de fausses et vraies doctrines) qui leur avait été donné par l'église apostate. Elles ont été trompées par les prétentions de la Papauté. Et pour dire la vérité, elles ne sont encore qu'en partie réveillées de leur stupeur ; car si les ambassadeurs des rois, en fléchissant le genou devant le pape, ne s'adressent plus à lui comme ils le faisaient autrefois, en lui disant :  « Agneau de Dieu qui ôte les péchés du monde »  et ne le regardent plus comme un  « Dieu ayant toute puissance au ciel et sur la terre », ils sont cependant encore bien loin de reconnaître la vérité, c'est-à-dire que la Papauté a été et qu'elle est encore la contrefaçon satanique du vrai royaume.

            Tandis que les rois et les soldats se lassaient de cette œuvre inhumaine, il n'en était pas ainsi de la sainte (?) hiérarchie ; et nous trouvons le Concile Général de Sienne déclarant en 1423 que la propagation de l'hérésie dans diverses parties du monde, due à la négligence des Inquisiteurs, était une offense à Dieu, une injure au catholicisme et la perdition des âmes. Les princes furent conjurés, par la miséricorde de Dieu, d'exterminer l'hérésie, s'ils voulaient échapper à la vengeance divine ; et des indulgences plénières furent accordées à tous ceux qui s'engageraient dans l'œuvre de destruction ou procureraient des armes dans ce but. Ces arrêtés furent publiés chaque dimanche dans les églises. Beaucoup de théologiens et d'historiens catholiques romains mirent leur plume au service de cette cause injuste, justifiant, recommandant et louant la persécution de l'hérésie. Le cardinal Bellarmin, par exemple, déclara que « si les apôtres ne firent pas appel au bras séculier, c'est parce que de leurs jours il n'y avait pas de princes chrétiens ». Le docteur Dens, un célèbre théologien catholique romain, publia en 1578 un ouvrage de théologie qui est considéré par les papistes de nos jours comme une autorité classique, principalement dans leurs universités, où elle occupe le même rang que Blackstone occupe dans la loi civile anglaise. Ce travail respire d'un bout à l'autre l'esprit de persécution. Il condamne les chefs de l'hérésie à la confiscation de leurs biens, au bannissement, à l'emprisonnement et à la peine de mort avec privation du droit de sépulture chrétienne.

            Une des malédictions autorisées, employée contre les protestants et publiée dans le « Pontifical romain » est ainsi conçue :

            «  Puisse le Dieu tout-puissant et tous ses saints les maudire de la malédiction dont le diable et ses anges sont maudits ! Qu'il les retranche de la terre des vivants. Que la mort la plus abjecte les surprenne et qu'ils descendent vivants dans l'abîme. Que leur semence soit détruite de dessus de la terre ; qu'ils périssent par la faim et la soif, par la nudité ou toute autre détresse ! Que toutes  les misères, les pestes et les tourments soient sur eux. Que tout ce qu'ils ont soit maudit ; qu'ils soient maudits partout et toujours. Qu'ils soient maudits parlant et se taisant. Qu'ils soient maudits au dedans et au dehors qu'ils soient maudits du sommet de la tête à la plante des pieds ; que leurs yeux deviennent aveugles et leurs oreilles sourdes ; que leur bouche devienne muette et que leur langue se colle à leur gosier. Que leurs mains ne touchent plus et que leurs pieds ne marchent plus ; que tous les membres de leurs corps soient maudits. Que la malédiction reste sur eux, debouts ou couchés, dès maintenant et à toujours, et qu'ainsi leur lampe soit éteinte en la présence de Dieu, au jour du jugement. Que leur sépulture soit avec les chiens et les ânes. Que les loups affamés dévorent leurs cadavres. Que le diable et ses anges soient leurs compagnons à toujours ! Amen, Amen ; qu'il en soit ainsi, ainsi soit-il ! »

            Tel est l'esprit de la Papauté et tous ceux qui ont l'esprit du vrai Christ devraient facilement reconnaître une contrefaçon si basse.

            Puisque la véritable cause de ces erreurs de conduite réside dans les erreurs de doctrine, il n'y a pas de doute que si les circonstances étaient de nouveau favorables, les doctrines étant les mêmes, leur mauvais esprit et leurs mauvais fruits apparaîtraient certainement sous peu, par les mêmes actes d'injustice, d'oppression, de superstition, d'ignorance et de persécution et on aurait recours à toutes sortes de moyens pour restaurer, soutenir et étendre le royaume contrefait de Dieu. Nous citons comme preuve quelques incidents tout récents, venus à notre connaissance :

            « Le 7 Août 1887, à Ahuehuetitlan, état de Guererro, Mexique, un missionnaire protestant, indigène, nommé Abraham Gomez, fut mis à mort en même temps que deux de ses aides, par des indigènes, sur l'instigation d'un prêtre catholique romain, le Père Vergara, qui, la veille, en célébrant la messe, avait recommandé à ses ouailles de faire un exemple du ministre de Satan qui était arrivé au milieu d'eux ; il avait ajouté qu'ils pouvaient le tuer en toute sécurité, comptant sur la protection du chef de la police aussi bien que du prêtre. La parole du prêtre fit loi pour ce peuple enténébré, aussi bien que pour les autorités civiles. Le corps mutilé du pauvre missionnaire fut traîné par les rues et soumis à toute sorte d'indignités, comme un avertissement pour d'autres. Il ne put être obtenu aucun recours pour ce meurtre. »

            L'Indépendant de New-York ayant attiré l'attention sur ce massacre sanglant, la riposte suivante fut faite par le Freeman (L'homme libre), un influent journal catholique romain de New-York :

            «  Lorsqu'ils [les missionnaires protestants] voient d'honnêtes gens s'agenouiller au son de l'angélus en l'honneur de l'Annonciation et de l'Incarnation, ils disent que la Bible abolira bientôt de telles superstitions. Si une lumière brûle devant une statue de la mère de Dieu : Ah ! crie le missionnaire, nous instruirons bientôt ce peuple plongé dans les ténèbres à mettre en pièces ces symboles ! et ainsi de suite. Si le massacre de quelques missionnaires de cette sorte faisait rester chez eux ceux qui leur ressemblant nous aimerions presque dire — nous sommes si méchants, nous autre papistes  — : Que la danse continue et que la joie déborde ! »

            Un ministre du nom de C. G. Moule raconte une douloureuse histoire qui a fait le tour de la presse sur la persécution qui eut lieu à Madère contre Robert Kelley et les personnes qui avaient été converties par son moyen environ un millier de gens, y compris les  enfants ; ils furent frappés de l'exil pour avoir reçu une parcelle de la vérité.

            Dans la soi-disant  « Prusse protestante », le pasteur Thummel fut arrêté pour  « insultes faites à l’église  catholique romaine ». Dans une brochure qu’il publia  il critiquait la Papauté et l'une de ses remarques « insultantes » était que la Papauté est une apostasie « édifiée sur la superstition et l'idolâtrie ».

            Récemment il y eut un différend entre la Prusse et l’Espagne au sujet des îles Carolines et le pape fut choisi comme arbitre ou juge pour trancher le différend  (cela nous rappelle un peu sa puissance précédente et sa politique comme arbitre ou juge suprême des nations). Il décida en faveur de l'Espagne. Un vaisseau  de guerre, cinquante soldats et six prêtres furent aussitôt envoyés par l'Espagne ; dès leur arrivée, un missionnaire américain, Mr Doane, fut fait prisonnier et fut séparé de ses convertis sans autre cause que son refus d’abandonner sa mission, son œuvre et ses propriétés aux  prêtres  et parce que les îles appartiennent maintenant à l’Espagne et l’Espagne au Pape, aucune autre religion que celle du pape ne pouvait y être tolérée.

            Un ami de l'auteur, ex-catholique romain dit que voyageant récemment en Amérique du Sud, il fut assailli à coups de pierres et obligé de fuir pour sauver sa vie parce  qu'il n'avait pas voulu se découvrir et s'agenouiller avec la foule sur le passage du prêtre romain portant le crucifix et l'hostie. Un cas semblable, dans lequel trois Américains furent battus par les prêtres, attaqués par le peuple et arrêtés par la police dans la ville de Madrid, en Espagne, pour une offense du même genre, est encore sans doute dans l'esprit de beaucoup de ceux qui lisent les journaux.

            Le « Catholique converti » extrait ce qui suit du  « Watchman » , journal catholique romain publié à St. Louis (Mo) :

            « Le protestantisme ! Nous voudrions l'abattre et le dépecer ! Nous voudrions l'empaler et le pendre pour les nids de corbeaux. Nous voudrions le déchirer avec des pinces et le brûler avec des fers rougis au feu ! Nous voudrions le remplir de plomb fondu et l'enfoncer dans le feu de l'enfer à 200 mètres de profondeur. »

            Il est absolument probable, si nous regardons aux temps passés, que si le Rédacteur du Watchman, ayant un tel esprit, en avait le pouvoir, il aurait bientôt étendu ses menaces, non seulement au protestantisme, mais à tous les protestants.

            Tout dernièrement, à Barcelone, Espagne, par ordre du gouvernement, un grand nombre d'exemplaires de la Bible furent brûlés, — naturellement à l'instigation de l'église de Rome. Ce qui suit, traduit de la « Bannière Catholique », l'organe de la papauté en cette ville, montre que la papauté approuva et reconnut cet acte. Il dit :

            « Béni soit Dieu de ce que nous revenons enfin aux temps où ceux qui propageaient l'hérésie étaient punis d'un châtiment exemplaire. Le tribunal de la Ste Inquisition doit bientôt être rétabli ; son règne sera plus glorieux et portera plus de fruits que dans le passé. Notre cœur catholique déborde de foi et d'enthousiasme ; et l'immense joie qui nous inonde, en commençant de recueillir les fruits de notre campagne actuelle, dépasse tout ce que nous pouvions imaginer. Quel jour de plaisir ce sera pour nous, lorsque nous verrons les anti-cléricaux se tordre dans les flammes de l'Inquisition ! »

            Pour encourager une autre croisade, le même journal dit :

            « Nous croyons devoir publier les noms des saints hommes entre les mains desquels tant de pécheurs ont souffert, afin que les bons catholiques puissent vénérer leur mémoire :

Par Torquemada.

Hommes et femmes brûlés vifs.   10.220
Brûlés en effigie. 6.840
Condamnés à d'autres châtiments. 97.371

Par Diego Desa.

Hommes et femmes brûlés vifs. 2.592
Brûlés en effigie. 829
Condamnés à d'autres châtiments. 32.952

Par le cardinal Jiminez de Cisneros.

Hommes et femmes brûlés vifs. 3.564
Brûlés en effigie. 2.232
Condamnés à d'autres châtiments. 48.059

Par Adrien de Florence.

Hommes et femmes brûlés vifs. 1.620
Brûlés en effigie. 560
Condamnés à d'autres châtiments. 21.835
Nombre total des hommes et des femmes brûlés vifs 

sous le ministère de 45 saints Inquisiteurs Généraux.

35.534
Total des brûlés en effigie. 18.637
Total des condamnés à d'autres châtiments 293.533

Total général

347.704

LE MILLENIUM PAPAL

            De même que le véritable royaume du vrai Christ doit avoir une durée de mille ans, ainsi l'imitation papale de ce royaume considéré au temps de sa plus grande prospérité, dura de 800 à 1800, comme accomplissement du règne millénaire prédit en Apocalypse 20. Les catholiques regardent la période depuis 1800, pendant laquelle la Papauté a graduellement perdu tout son pouvoir temporel, où elle a subi de nombreux affronts de la part des nations qui la soutenaient autrefois, et ou elle a été grandement dépouillée des territoires, revenus et privilèges si longtemps revendiqués et possédés, comme étant le « peu de temps » d'Apocalypse 20 : 3,7, 8, durant lequel Satan doit être délié, à la clôture du Millénium.

            Les dates qui marquent le commencement et la fin du millénium papal d'ignorance, de superstition et de fraude, sont clairement indiquées dans l'histoire. Un écrivain catholique romain * [  La Chaire de St-Pierre. ] parle ainsi du commencement de cet empire religieux : « Le couronnement de  Charlemagne comme empereur d'Occident par le pape Léon III en l'an 800 fut réellement le commencement du Saint Empire Romain ** ».[« Le St-Empire Romain » fut le titre de l'institution politique du moyen âge. Il eut son point de départ en  Charlemagne. Fisher, dans son Histoire universelle, page 262 le décrit ainsi : « Théoriquement, ce fut l'union entre le monde état et le monde-église ; une communauté  indivisée sous l'Empereur, et le Pape, ses chefs séculiers et spirituels, ordonnés du ciel (?) ». Puisque les papes donnaient l'onction aux empereurs, comme remplaçant du Christ, ils en étaient par conséquent les véritables chefs.]

            Bien que la papauté eût été organisée longtemps auparavant, comme système religieux, et qu'elle eût été « élevée » au pouvoir en 539, ce fut cependant Charlemagne qui le premier établit réellement et reconnut formellement le pouvoir temporel du pape. De même que Charlemagne fut le premier empereur du Saint Empire Romain en 800, François II en fut le  dernier. Il abandonna volontairement ce titre en 1806.*[ Par la bataille de Marengo, en 1800, et celle d'Austerlitz, en 1805, l'Allemagne se trouva deux fois aux pieds de Napoléon. Le principal résultat de cette dernière défaite fut l'établissement de la Confédération du Rhin sous le protectorat du souverain français. Cet événement mit fin au vieil Empire Germanique ou Saint-Empire, après une durée d'un millier d'années ». — Histoire Universelle de White, page 508. ]  De même qu'avant l'an 800 la papauté s'éleva, aidée par la bête romaine [le peuple] et par ses « cornes » [puissances] ainsi, depuis l'an 1800, elle a perdu son autorité temporelle sur les rois et les peuples, et elle a été déchirée et pillée par ceux qui la soutenaient autrefois (Apocalypse 17 :16, 17). Aujourd'hui, bien qu'elle reçoive toujours des honneurs et possède encore une grande influence sur les consciences du peuple, la Papauté se lamente sur la perte de tout ce qui ressemble à une domination temporelle.

            Celui qui étudie attentivement ce sujet remarquera qu'il existe quatre périodes plus ou moins distinctement marquées du développement et de l'exaltation de l'Antichrist, et un nombre égal qui indiquent clairement sa chute.

            Les quatre dates de son développement sont :

            1. — Dans les jours de Paul, vers l'an 50 : Le commencement du travail secret de l'ambition inique apparut.

             2. — De l'an 300 à 494 **,[ L'écrivain catholique de « La Chaire de St Pierre » montre clairement (page 128) que la juridiction pontificale lutta longtemps pour la possession de la place de chef de l'église et qu'elle n'en obtint que graduellement la reconnaissance et l'autorité ; cette domination fut généralement reconnue dès l'année 494. Après avoir donné en détail les actes des différents conciles, évêques, empereurs, etc, qui avaient reconnu l'évêque de Rome comme Souverain pontife, l'écrivain conclut ainsi :

             «  Ces paroles furent écrites à une date fort éloignée déjà en 494. ... A tout prendre, il ressort donc clairement de ce témoignage  authentique précédent, que la primatie de la chaire de St. Pierre (l'évêché de Rome) s'était déjà tellement développée au 5e  siècle, que le pape fut alors universellement regardé comme le centre de l'unité chrétienne, — le Gouverneur Suprême et l'Instructeur de l'Église de Dieu, le Prince des évêques, l'Arbitre définitif de tous les appels pour les causes ecclésiastiques dans toutes les parties du monde, et le Juge et Modérateur des Conciles Généraux qu'il présida par ses légats ».] la Papauté, l'homme du péché s'organisa en hiérarchie, c.-à-d., l'église s'organisa graduellement et les papes furent reconnus comme étant ses chefs, représentant Christ, régnant dans l'église et sur les nations.

            3. — L'an 539 fut, ainsi que cela sera montré plus loin (Vol. III, chapitre 3), la période dans laquelle les papes commencèrent à exercer l'autorité et le pouvoir civils.

            4. — La période d'exaltation commença en l'an 800, lorsque, comme nous l'avons déjà démontré, le Saint Empire Romain fut formé et que le pape, couronnant Charlemagne empereur, fut reconnu lui-même comme Roi des rois, Empereur des empereurs, « un autre Dieu sur la terre ».

            Les quatre périodes de la chute de l'influence papale sont les suivantes :

            1. — La période de la Réformation qui commença aux environs * [« ... de l'an 1309 par les écrits de Marsile suivi par Wyclef, Huss, Luther, etc. »  (éd. 1937). ] de l'an 1400 par les écrits de Wyclef, suivi par Huss, Luther, etc.

            2. — La période des succès de Napoléon, la dégradation des papes et l'abrogation finale du titre d'Empereur du Saint Empire Romain par François II de  1800 à 1806.

            3. — Le rejet final du pape comme gouverneur de Rome et de ce qu'on appelait les États pontificaux par ses sujets et par le roi d'Italie, en 1870 ; de ce fait l'Antichrist demeura sans la moindre autorité temporelle.

            4. — L'extinction finale de cette hiérarchie contrefaite, près de la fin du « jour de la colère » et du jugement déjà commencé, qui se terminera, comme nous l'avons montré, par les « temps des nations », avec l'année 1914.

PEUT-ON ENCORE EN DOUTER ?

            Nous avons retracé la naissance de l'Antichrist,  comme provenant d'une « apostasie » dans l'église chrétienne ; nous avons entendu sa prétention blasphématoire d'être le Royaume de Christ, et son pape, le Vicaire de Christ « un autre Dieu sur la terre » ;  nous avons entendu ses discours enflés de vanité et pleins de blasphèmes, s'arrogeant les titres et les pouvoirs appartenant au vrai Seigneur des seigneurs et Roi des rois ; nous avons vu combien terriblement il a accompli la prédiction : « II consumera les saints »,  nous avons vu que la vérité, écrasée et déformée, aurait été entièrement ensevelie sous l'erreur, la superstition et la politique cléricale [priestecraft), si le Seigneur, au moment convenable, n'était intervenu en suscitant des  réformateurs, aidant ainsi ses saints, comme il est écrit : « Les sages du peuple enseigneront la multitude ; et ils tomberont par l'épée et par la flamme, par la captivité et par le pillage, plusieurs jours. Et quand ils  tomberont, ils seront secourus avec un peu de secours ! »  — Daniel 11 : 33, 34 D.

            En présence de tous ces témoignages, est-il permis ; de douter que ce que les prophètes et les apôtres furent inspirés à écrire minutieusement ne soient les principaux traits caractéristiques de la Papauté ? Nous pensons qu'il ne devrait subsister aucun doute dans les esprits non prévenus que la Papauté est l'Antichrist, l'homme du péché, et qu'il est impossible à un homme d'accomplir ces prédictions. Le succès sans pareil de la Papauté comme contrefaçon du Christ, en trompant le monde entier, a accompli pleinement la prédiction de notre Maître, lorsque, après avoir parlé de son propre rejet il dit : « Si un autre vient en son propre nom, celui-là vous le recevrez ». — Jean 5 : 43.

            On aura remarqué, sans doute avec surprise, qu'en traitant ce sujet, nous avons généralement omis de parler des vilenies et des grossières immoralités des papes et d'autres dignitaires, comme aussi de l'œuvre ténébreuse de l’expédient pratiqué par les Jésuites et autres ordres secrets qui font toute espèce d'œuvres de police secrète pour la Papauté. C'est avec intention que nous avons procédé de cette manière, non parce que ces faits ne seraient pas vrais, puisque des écrivains catholiques romains même les reconnaissent en partie, mais parce que nous n'avions pas besoin de telles preuves pour étayer nos arguments. Nous avons montré que la hiérarchie papale (même si elle avait été composée des hommes les plus moraux et les plus justes, ce qui n'est pas le cas, toute l'histoire est là pour en témoigner) est « l'homme du péché », l'Antichrist, la contre-façon et la fausse représentation du Royaume Millénaire de Christ, habilement arrangée pour tromper. 

            Les paroles de Macaulay, historien anglais, servent à montrer que quelques-uns, sans avoir de lumière prophétique spéciale, ont pu reconnaître dans l'étonnant  système de la Papauté la contrefaçon du plus merveilleux de tous les systèmes, le Royaume de Dieu, encore à venir. Il dit :

            «  II est impossible de nier que la constitution de  l'église de Rome ne soit le chef-d'œuvre de la sagesse humaine [nous dirions satanique]. Il n'y a vraiment rien qui aurait pu soutenir une telle doctrine contre de pareils assauts, si ce n'est une constitution de ce genre. L'expérience de 1.200 années mouvementées, l'habileté ingénieuse et les soins inlassables de quarante générations d'hommes d'état, ont amené cette institution à un degré de perfection tel que parmi les inventions de l'habileté politique elle occupe la place la plus élevée. »

FIN DÉFINITIVE DE L'ANTICHRIST

            Nous avons suivi la marche de la Papauté jusqu'au temps présent, au jour de l'Éternel — le temps de la présence d'Emmanuel. Cet homme du péché s'est développé, a fait son terrible travail et a été frappé par l'épée de l'Esprit — la Parole de Dieu. L'esprit de la bouche de Christ l'a rendu impuissant, en dépit de son ardent désir de persécuter ouvertement et d'une manière générale les saints. Nous nous demandons. maintenant : « Que devons-nous attendre ? Que dit l'apôtre concernant la fin de l'Antichrist ? »

            Dans 2 Thessaloniciens 2 : 8-12, l'apôtre Paul déclare concernant l'Antichrist : « Que le Seigneur consumera par le souffle de sa bouche et qu'il anéantira par l'éclat de sa présence ». La lumière de la vérité pénétrera chaque sujet. En mettant en relief le bien et le mal, elle conduira à la grande lutte entre ces deux principes et entre les partisans humains de l'un et de l'autre et causera le grand temps de détresse et de colère. Dans cette lutte, l'injustice et le mal tomberont  et le bien et la vérité triompheront. Parmi les maux qui existent maintenant et qui seront finalement et complètement détruits, se trouve l'Antichrist avec lequel presque toute espèce de théorie et de pratique du mal  est plus ou moins en rapport direct. Ce sera cet éclat resplendissant, cette brillante lumière du soleil de la présence du Seigneur qui produira ce jour de détresse, par lequel et dans lequel l'Antichrist et tous les autres systèmes du mal seront détruits. « Dont la présence est selon [accompagnée par, ou durant] l'efficace de Satan [une énergie et une action sataniques], en toute puissance, et signes et miracles de mensonge, et en toute séduction d'injustice chez ceux qui périssent, parce  qu'ils n'ont pas reçu l'amour de la vérité pour être sauvés ou en être préservés. Et à cause de cela,  Dieu leur envoie une énergie d'erreur [une puissance d'égarement, Seg.] pour qu'ils croient le mensonge, afin que tous ceux qui n'ont point cru la vérité, mais qui ont  pris plaisir dans l'injustice soient jugés » indignes de participer au Royaume Millénaire, comme co-héritiers avec Christ.

            D'après nous, ces paroles impliquent que dans le temps de la présence du Seigneur (le temps actuel — depuis 1874), par ce système de l'Antichrist (un des principaux agents de Satan pour tromper et maîtriser  le monde) aussi bien que par tous ses autres agents, le diable opposera une résistance désespérée au nouvel ordre de choses qui est sur le point d'être établi. Il tirera parti de chaque petite circonstance, de toutes les faiblesses innées à la famille humaine et de son égoïsme, pour enrôler leurs cœurs, leurs mains et leur plume dans cette lutte finale contre la liberté et l'entière élucidation de la vérité. Des préjugés seront éveillés là où il n'en existerait aucun si la vérité était clairement vue. Un zèle passionné sera évoqué et des unions de partisans se formeront qui en tromperont et égareront beaucoup. Il en sera ainsi, non parce que Dieu n'a pas fait la vérité assez claire pour guider tous les vrais  consacrés, mais parce que ceux qui feront trompés le seront pour ne pas s'être suffisamment empressés à rechercher la vérité et à en user comme de la nourriture au temps convenable. Il sera ainsi manifeste que la classe égarée ne reçut pas la vérité dans l'amour pour elle, mais plutôt par formalisme ou par crainte. L’apôtre semble assurer que dans cette lutte à mort finale de l'Antichrist, même s'il semble gagner un pouvoir croissant dans le monde par de nouveaux stratagèmes, par des tromperies et des combinaisons, le vrai Seigneur de la terre, le Roi des rois, prévaudra cependant au temps de sa présence ; et finalement, durant le grand  temps de détresse, il anéantira complètement l’Antichrist et détruira pour toujours sa puissance et ses tromperies.

            Quant à la forme exacte que prendra cette lutte finale, nous ne pouvons faire que des suppositions, appuyées principalement sur les tableaux symboliques donnés dans l'Apocalypse sur cette lutte. Nous prévoyons la constitution graduelle de deux grands partis  dans le monde, desquels les saints fidèles et vainqueurs se tiendront séparés. Ces deux grands partis seront composés : d'un côté, par les socialistes, les libres-penseurs, les incrédules, les mécontents, et les vrais amis de la liberté dont les yeux commencent à s’ouvrir sur l’état de choses amené par le despotisme et le mauvais  gouvernement religieux et politique. De l’autre côté s'associeront peu à peu ceux qui sont opposés aux libertés humaines et à l'égalité : les empereurs, les rois, les aristocrates ; et la contrefaçon du Royaume de Dieu,  l'Antichrist, se trouvera en parfaite harmonie avec eux et les soutiendra, tout en étant soutenu lui-même par les despotes civils de la terre. Nous nous attendons aussi à ce que la politique de l'Antichrist sera quelque peu modifiée et adoucie pour chercher à s'attirer même  la sympathie et la coopération pratique (non l’union réelle) des extrémistes de toutes les dénominations protestantes qui justement maintenant recherchent une union nominale les unes avec les autres et avec Rome, oubliant que la seule et véritable union est celle qui est produite et maintenue par la vérité, et non par les credo, les conventions et les lois. Cette coopération entre protestants et catholiques peut sembler improbable à quelques-uns ; mais nous voyons des signes évidents de son approche rapide. Elle est hâtée par les agissements secrets de la Papauté parmi ses adeptes, laquelle fera élire, pour occuper des places en vue dans les affaires gouvernementales, les hommes politiques désireux de coopérer avec elle.

            On peut s'attendre à voir bientôt surgir des lois par lesquelles la liberté personnelle sera peu à peu restreinte en alléguant la nécessité et le bien-être public jusqu'à ce que degré par degré il devienne finalement nécessaire de formuler quelque « simple loi de religion » et qu'ainsi l'Église et l'état pourront être jusqu'à un certain point unis pour gouverner les États-Unis d'Amérique. Ces lois, aussi simples qu'elles puissent être faites, pour convenir à toutes les vues religieuses soi-disant orthodoxes (ou populaires), seront calculées pour réprimer et prévenir un accroissement subséquent en grâce et en connaissance de ce qui est maintenant la nourriture au temps convenable. Le prétexte en sera probablement pour prévenir le socialisme, l'incrédulité et l'éruption politique des classes inférieures et des classes indépendantes.

            Il est évident que dans un avenir très prochain, même avant que la gravité de la grande détresse de ce jour de la colère ait éclaté sur le monde et ruiné l'ordre social tout entier sur la terre (préparant la terre  nouvelle et meilleure promise sous le vrai Christ), il y aura une heure sévère de tentation et d'épreuve pour l'Église vraiment consacrée, comme ce fut le cas dans les jours de triomphe de la Papauté ; avec cette différence qu'aux jours actuels les méthodes de persécution seront plus raffinées et mieux en rapport avec les méthodes plus civilisées de notre époque. Les piques, les pinces et les roues auront plutôt la forme de sarcasmes, de dénonciations, de restrictions des libertés et de boycottages sociaux, financiers et politiques. Mais concernant cela et les nouvelles combinaisons que l'Antichrist pourra former dans cette lutte finale contre l'établissement du vrai royaume millénaire, nous en parlerons plus loin.

            En terminant ce chapitre, nous aimerions encore une fois pénétrer le lecteur de ce fait que la Papauté est l'Antichrist ; non à cause de la perversité de sa morale, mais parce qu'elle est la contrefaçon du vrai Christ et du vrai Royaume. C'est parce que beaucoup de protestants manquent de reconnaître ce fait qu'ils seront trompés et amenés à coopérer avec la Papauté en opposition au vrai Roi de gloire.

                     AURORE MILLÉNAIRE

Tout se meut en avant ! L'ère heureuse commence,

L'astre de ce qui fut disparaît au couchant,

La cloche d'or résonne et la parade avance ;

Bataillon qui se hâte au rythme d'un beau chant !

La théorie obscure est fondement qui croule,

Le sommet s'illumine et la Vérité luit,

Les forces d'aujourd'hui, des frontières en foule

Font des fantômes vains qui s'effacent sans bruit.

Frère, pourquoi tarder  ? Ma sœur, pourquoi te taire ?

Sors au soleil levant, veille pour les fruits mûrs.

Poète, assez de pleurs, barde, échappe au mystère,

Peintre, enfin, dans le ciel prends des feux pour nos murs.

Sors au soleil levant, sors avec l'alouette,

N'attends pas le midi, sans trêve, à l'œuvre encore,

Car tout se meut, rapide, et l'ère heureuse est prête,

Ce qui fut disparaît, et voici l'âge d'or.

Sur l'ordre du grand Roi la céleste lumière

Se répand dans sa gloire, et s'étend, et s'accroît.

Les vieux credo s'en vont, ils tombent en poussière,

Mais un chemin meilleur aux feux du jour se voit.

Oh ! soyons donc tous prêts pour l'œuvre sans égale,

Travaillons nuit et jour, nous sommes peu, luttons,

Moissonnons, puisqu'il faut, à l'aube aux tons d'opale,

Moissonnons dans le champ — pour le droit, combattons.

Tout se meut en avant ! Le Jubilé du monde

Enfin va remplacer les siècles de chagrins,

II vient, mon œil le voit, plein d'extase profonde,

Le sommet resplendit, — Christ est avec les siens !

 

*  *  *

Retour haut de page